Le sous-gouverneur Nicolas Vincent parle des pratiques d’établissement des prix des entreprises, de leur évolution durant la pandémie et des raisons pour lesquelles elles demeurent un risque pour l’inflation.

Le sous-gouverneur Vincent s’adresse à la Chambre de commerce du Montréal métropolitain. Lisez le discours complet.

La pandémie a changé la façon dont les entreprises décident de leurs prix

Quand les restrictions liées à la pandémie de COVID-19 ont été levées, la demande de biens et services a dépassé l’offre, qui a été d’autant plus limitée à cause de l’invasion de l’Ukraine par la Russie. Étant donné la hausse du coût des intrants et le fait que les clients étaient prêts à payer plus cher pour leurs produits et services, les entreprises ont pu augmenter leurs prix de manière plus fréquente – et plus substantielle – que d’habitude.  

En temps normal, les prix ont une certaine rigidité. Autrement dit, les entreprises ne les ajustent pas trop souvent, même quand les coûts de leurs intrants ou la demande des consommateurs changent. L’explication est simple. C’est parce que changer un prix est un processus coûteux en ressources :

  • les entreprises doivent analyser les coûts des intrants et la demande des consommateurs
  • elles doivent aussi prendre en compte les prix de la concurrence et évaluer si un changement de prix leur fera perdre des clients
  • elles doivent ensuite utiliser ces informations pour déterminer le prix optimal, l’appliquer et le communiquer aux clients

Toutes ces étapes ont un coût, qui peut dépasser les avantages potentiels d’un ajustement de prix.

Cependant, lors de la reprise postpandémique, les entreprises ont vu le coût de leurs intrants augmenter rapidement et constaté que les clients avaient moins d’options étant donné la faiblesse généralisée de l’offre. Elles ont ainsi pu répercuter ces augmentations sur les consommateurs plus rapidement et dans une plus grande mesure que d’habitude.

On pense que cette réaction des entreprises – ici et à l’étranger – est intimement liée à la forte inflation durant cette période. »

Et maintenant?

Les pratiques d’établissement des prix se stabilisent, mais elles ne sont pas encore revenues comme avant la pandémie.

Les enquêtes de la Banque du Canada montrent que, depuis le début de l’année, les entreprises parlent moins de surchauffe de la demande et semblent recommencer à prêter une attention particulière aux prix de la concurrence. En analysant les informations fournies par les entreprises, on voit aussi des signes que les pratiques d’établissement des prix sont en train de se normaliser. Toutefois, on y recense encore un plus grand nombre de mentions de coûts élevés pour la main-d’œuvre et le financement qu’avant la pandémie.   

Un autre risque est que les pratiques récentes puissent s’enraciner pour des raisons qui ne sont pas liées à la pandémie. Certaines épiceries, par exemple, utilisent maintenant des étiquettes électroniques qui permettent de changer les prix à moindre coût. De plus, la consolidation réduit la concurrence dans certains secteurs.  

Le plus grand risque est que les pratiques récentes d’ajustements de prix plus fréquents et plus substantiels deviennent la norme. Si les détaillants s’attendent à ce que leurs fournisseurs et leurs compétiteurs changent souvent leur prix, et que les consommateurs sont disposés à continuer de payer plus cher au lieu de magasiner, cela crée un cercle vicieux. Les prix pourraient donc devenir plus sensibles aux chocs, ce qui viendrait compliquer le retour de l’inflation à la cible de 2 %.

Autrement dit, si les pratiques récentes devenaient la norme, ça pourrait compliquer le retour de l’inflation à un niveau bas, stable et prévisible. »

Les pratiques doivent revenir à la normale

L’inflation est descendue de façon marquée après avoir culminé à environ 8 % en juin 2022. Les coûts de nombreux intrants augmentent désormais plus lentement, et ont même diminué dans certains cas. Il reste à voir à quelle vitesse ces baisses seront répercutées sur les prix à la consommation.

En fin de compte, les changements de pratiques d’établissement des prix liés à la pandémie montrent l’importance de ramener l’inflation à la cible. Quand l’inflation est basse et stable, les modifications de prix sont plus susceptibles d’être remarquées, ce qui rend les entreprises plus hésitantes à répercuter leurs hausses de coûts sur leur clientèle.

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