Le gouverneur Tiff Macklem explique comment l’inflation reflète de plus en plus l’évolution de la demande intérieure et quels indicateurs la Banque surveille pour ramener l’inflation à la cible de 2 %.
La demande intérieure dépasse l’offre
Une grande partie de la poussée d’inflation que nous connaissons actuellement découle de la hausse des prix de l’énergie, des aliments et des biens échangeables. Comme bon nombre de ces prix sont fixés sur les marchés internationaux, la politique monétaire canadienne n’a pas d’effet sur eux.
Des facteurs mondiaux peuvent aussi expliquer pourquoi l’inflation a légèrement diminué après avoir atteint un sommet en juin :
- Les prix de certains produits de base ont reculé par rapport à leurs niveaux très élevés
- Les goulots d’étranglement du côté de l’offre ont commencé à se desserrer
- Les coûts d’expédition sont en baisse
Cependant, les sources d’inflation propres à notre économie gagnent en importance. En plus de la montée des prix des biens, nous observons aussi une hausse de la demande de services qui, à son tour, fait augmenter les prix.
Les entreprises font état de pénuries de main-d’œuvre généralisées. Parallèlement, la croissance des salaires s’est accélérée et continue de toucher plus de secteurs. La demande augmentant plus vite que l’offre, les entreprises répercutent les coûts plus élevés sur leur clientèle.
C’est ici que le relèvement des taux d’intérêt entre en jeu. En haussant les taux d’intérêt, nous élevons le coût d’emprunt des ménages et des entreprises. Cela freinera les dépenses et permettra à l’offre de rattraper la demande.
Nous n’avons pas de prise sur la conjoncture internationale, mais la politique monétaire nous permet d’influencer l’équilibre entre l’offre et la demande dans l’économie canadienne et, du même coup, d’apaiser les pressions inflationnistes au fil du temps. »
Nous devons remonter les taux d’intérêt
Nous avons augmenté les taux d’intérêt cinq fois depuis mars, et nous constatons déjà des résultats. Dans des secteurs de l’économie, comme le logement, qui sont plus sensibles au relèvement des taux d’intérêt, l’activité a commencé à ralentir. De plus, nous surveillerons de près les éléments suivants :
- La demande – pour voir comment la croissance des taux d’intérêt ralentit l’économie
- L’offre – pour voir à quelle vitesse les problèmes se résolvent
- L’inflation – pour voir comment elle réagit à la hausse des taux d’intérêt
L’inflation est encore trop forte. Elle dépasse largement la cible depuis plus d’un an, et les attentes d’inflation sont à la hausse. Plus cette situation dure, plus il devient probable que la population canadienne base ses plans à long terme sur les taux d’inflation actuels. Cela peut devenir en soi une source de pression inflationniste.
Lorsque ce genre d’attentes d’inflation s’enracinent, nous devons relever encore plus les taux d’intérêt pour restaurer la stabilité des prix, ce qui affaiblit l’économie.
Bref, il y a encore à faire. Il nous faudra d’autres informations avant d’envisager de pouvoir revenir à une approche plus fine dans laquelle les décisions sont prises au cas par cas. »
Sans la stabilité des prix, rien ne va
Une inflation forte cause de l’incertitude pour tout le monde et des inégalités. Une inflation élevée fait baisser le pouvoir d’achat des travailleurs et des entreprises. Elle complique aussi la vie des personnes à bas revenu et à revenu fixe.
Nous voulons une économie dans laquelle les revenus gagnés par les Canadiens conservent leur valeur. Nous savons que les gens n’ont pas à se soucier de l’inflation lorsqu’elle est à environ 2 %, c’est-à-dire à un niveau bas et stable : elle passe alors presque inaperçue dans leur quotidien.
Tous les Canadiens font face à une augmentation du coût de la vie. C’est pourquoi nous avons pris des mesures vigoureuses pour rétablir la stabilité des prix. Il faudra du temps pour y arriver, mais nous allons ramener l’inflation à la cible de 2 %. Nous devrions tous l’envisager.
Nous le savons, nous sommes loin d’un retour à la cible de 2 %. Il faudra du temps pour y arriver. Ce ne sera pas un long fleuve tranquille, ça aussi nous le savons, mais nous ne pouvons pas nous permettre de laisser s’installer une inflation élevée. »