Le sous-gouverneur Paul Beaudry explique à des étudiants de l’Université Laval pourquoi la Banque du Canada tient compte des vulnérabilités financières, comme l’endettement des ménages, lorsqu’elle fixe les taux d’intérêt.
Facteurs financiers dans la mire
La Banque travaille fort pour comprendre l’incidence des facteurs financiers sur l’économie. Nous devons savoir combien d’argent les Canadiens empruntent et prêtent, et quelles en sont les répercussions sur notre politique de taux d’intérêt. La plus grande vulnérabilité de l’économie est le fort endettement des ménages.
Une politique appropriée aujourd’hui pourrait ne pas l’être demain
Les vulnérabilités financières sont un enjeu particulièrement épineux pour les banques centrales. Elles peuvent entre autres modifier les effets économiques des variations des taux d’intérêt au fil du temps. Une baisse de taux peut stimuler l’économie à court terme. Mais elle peut aussi encourager les gens à contracter de plus en plus de dettes, ce qui crée une vulnérabilité qui peut peser sur l’économie plus tard. Autrement dit, les vulnérabilités peuvent donner lieu à un arbitrage dont la banque centrale doit tenir compte.
La politique adoptée par la banque centrale pour favoriser l’atteinte de sa cible d’inflation à court terme pourrait compliquer son atteinte à long terme. »
L’arbitrage en action
Nous avons fait face à cet arbitrage en octobre dernier, lorsque nous devions prendre une décision concernant le taux directeur. L’économie mondiale semblait alors affaiblie. La Banque savait que cela pourrait freiner notre économie et faire descendre l’inflation sous la cible. Nous avons envisagé de baisser les taux par mesure de précaution, pour soutenir l’économie. Mais nous savions aussi qu’une baisse des taux d’intérêt pourrait faire monter en flèche les emprunts – surtout les prêts hypothécaires – et entraîner ainsi une accumulation supplémentaire de dettes. Nous avons compris que cette dette accrue pourrait ralentir notre économie et compliquer l’atteinte de notre cible d’inflation à l’avenir. Nous avons donc conclu que le gain à court terme pour l’économie ne surpassait pas le coût éventuel à long terme.
Bien comprendre l’arbitrage à l’aide de la croissance exposée au risque
Pour mesurer l’arbitrage, nous utilisons notre cadre de croissance exposée au risque. Cet outil nous permet notamment de comparer les gains que l’on obtiendrait sur le plan de la croissance en baissant les taux d’intérêt avec la proportion de la croissance qui serait à risque à cause des vulnérabilités. Le personnel de la Banque s’emploie à trouver d’autres façons d’analyser cet arbitrage.
[L’approche fondée sur la croissance exposée au risque] ne s’éloigne pas de notre objectif d’inflation : elle constitue simplement un outil de plus pour évaluer les risques qui pèsent à plus long terme sur nos perspectives d’inflation. »
La maîtrise de l’inflation demeure la priorité de la politique monétaire
La maîtrise de l’inflation demeure la mission première de notre politique monétaire, car la meilleure façon de contribuer à la prospérité économique des Canadiens est de maintenir l’inflation à un niveau bas, stable et prévisible. Il est important de prendre en compte les vulnérabilités parce qu’elles peuvent compliquer l’atteinte de nos objectifs en matière d’inflation. Et bien que la politique monétaire puisse contribuer à réduire les vulnérabilités financières, nous savons que d’autres politiques conçues pour rendre le système financier plus sûr, comme les politiques macroprudentielles, sont les premières lignes de défense de l’économie.
Il ne faut pas voir ce défi comme l’ajout d’un autre objectif ni comme un changement à l’importance que nous accordons à la cible d’inflation, mais simplement comme le fait que ces vulnérabilités pourraient compliquer l’atteinte de notre cible d’inflation à l’avenir. »