Rapport sur la politique monétaire – Janvier 2025 – Économie canadienne
L’inflation demeure près de 2 %, et les baisses passées des taux d’intérêt stimulent la croissance économique au Canada. Dans le même temps, l’incertitude s’est accrue étant donné la menace faite par la nouvelle administration américaine d’imposer des droits de douane généralisés.
Selon les estimations, la croissance trimestrielle du produit intérieur brut (PIB) aurait avoisiné 1,4 % dans la deuxième moitié de 2024. Les conditions du marché du travail sont encore détendues et l’économie continue d’afficher une offre excédentaire modeste. Les dépenses ont commencé à se redresser du côté du logement ainsi que des biens et services sensibles aux taux d’intérêt.
L’inflation mesurée par l’indice des prix à la consommation (IPC) s’est maintenue autour de 2 % au cours des derniers mois, comme prévu dans le Rapport d’octobre.
Activité économique
La croissance du PIB a ralenti pour s’établir à 1 % au troisième trimestre, un taux inférieur aux prévisions présentées dans le Rapport d’octobre. On estime qu’elle a légèrement augmenté pour s’établir autour de 1,8 % au quatrième trimestre (graphique 1).
La croissance de la demande intérieure finale a été vigoureuse. Elle devrait avoir grimpé à environ 3,5 % au quatrième trimestre. Cette vigueur récente tient à la progression des dépenses de consommation qui reste forte et à la reprise de l’investissement résidentiel. En revanche, les investissements des entreprises demeurent faibles.
L’incertitude s’est accrue au cours des derniers mois parce que la nouvelle administration américaine a menacé d’imposer des droits de douane généralisés au Canada et à bon nombre de ses autres principaux partenaires commerciaux. Au pays, cette incertitude semble peser sur la confiance des consommateurs et des entreprises, ainsi que sur les intentions d’investissement. La menace de nouveaux droits de douane a également contribué à la récente baisse du dollar canadien par rapport à la devise américaine (Point de mire : Facteurs récents qui influent sur le taux de change Canada–États-Unis).
La croissance de la demande intérieure finale a été vigoureuse
Selon les plus récentes données disponibles, la croissance de la demande intérieure finale a été vigoureuse au quatrième trimestre, portée par la progression de la consommation par habitant et par une forte hausse de l’investissement résidentiel (graphique 2). Cela semble indiquer que les ménages réagissent aux taux d’intérêt plus bas. Par ailleurs, la croissance des dépenses publiques a ralenti et les investissements des entreprises sont demeurés stables.
La croissance de la consommation par habitant est retournée en territoire positif au troisième trimestre de 2024, et on estime qu’elle a continué sur sa lancée pour atteindre environ 1,6 % au quatrième trimestre. Cette hausse est soutenue par les baisses du taux directeur effectuées en 2024 et la solide progression du revenu disponible par habitant.
Selon les estimations, l’investissement résidentiel aurait fortement augmenté au quatrième trimestre de 2024, soit d’environ 15 % (graphique 3). La croissance robuste et continue des reventes de logements – qui fait grimper les coûts de transfert de propriété – et la hausse importante de la construction résidentielle ont été favorisées par les taux d’intérêt plus bas et la demande refoulée. En revanche, l’activité de rénovation est restée modérée.
Les investissements des entreprises ont été faibles, et on estime qu’ils sont demeurés stables au quatrième trimestre (graphique 4).
Même si la croissance des dépenses publiques a été forte pendant la majeure partie de 2024, elle devrait avoir ralenti au quatrième trimestre, conformément aux plans présentés dans les budgets et les énoncés économiques du gouvernement fédéral et des provinces.
Les exportations s’intensifient à court terme
Les exportations ont été faibles au cours des trois premiers trimestres de 2024, malgré la vigueur de la demande étrangère. Bien qu’une partie de cette faiblesse vienne probablement des défis qui continuent de se poser sur le plan de la compétitivité, il y a également des facteurs temporaires en jeu. Pensons notamment aux fermetures provisoires de certaines usines de véhicules automobiles au Canada et aux États-Unis.
Selon les estimations, la croissance des exportations aurait rebondi pour atteindre environ 4,6 % au quatrième trimestre, principalement sous l’effet d’une forte hausse des exportations d’or et de produits pharmaceutiques, qui ont tendance à être très volatiles. Ce récent rebond serait également attribuable à la réouverture de certaines usines automobiles. Par ailleurs, l’augmentation des exportations de pétrole a favorisé encore plus la croissance des exportations au quatrième trimestre.
On estime que la croissance des importations a augmenté pour s’établir autour de 2,9 % au quatrième trimestre. Cette estimation tient à un regain des importations de véhicules automobiles, partiellement contrebalancé par de faibles importations de machines et de matériel, lesquelles sont freinées par la confiance mitigée des entreprises.
Pressions sur la capacité
L’économie canadienne demeure en situation d’offre excédentaire modeste. On estime que l’écart de production se situait entre -1,25 et -0,25 % au quatrième trimestre, une fourchette pratiquement identique à celle postulée au troisième trimestre. En raison de révisions à la hausse du niveau du PIB, l’offre excédentaire est un peu moins importante qu’au moment de la publication du Rapport d’octobre (Révisions des projections, section Projections). Sur le marché du travail, un large éventail de données indiquent une détente persistante (graphique 5).
Le marché du travail reste détendu
Le taux de chômage est quelque peu supérieur à ce qu’il était au moment de la publication du Rapport d’octobre, et ce sont les jeunes et les nouveaux arrivants qui demeurent les plus touchés. La croissance de l’emploi s’est activée, mais le rythme d’augmentation de la population en âge de travailler a ralenti (graphique 6). Au cours des derniers mois, les gains d’emploi moyens ont suffi à maintenir le ratio de l’emploi par rapport à la population en âge de travailler.
Même si la croissance des salaires demeure tenace, les données les plus récentes commencent à indiquer certains signes de modération. Le ralentissement se manifeste surtout dans la progression des salaires au sein du secteur privé. Toute croissance des salaires fait augmenter la demande, ce qui a certains effets sur l’inflation. Cependant, les salaires dans le secteur privé influent surtout sur le coût de production des biens et services de consommation. Dans ce secteur, la croissance des salaires selon les données de l’Enquête sur la population active (EPA) s’est rapprochée de celle concernant la rémunération horaire dans les comptes nationaux (graphique 7). Dans le secteur privé, elle est passée à 3,4 % en décembre, en baisse par rapport aux 4,6 % communiqués dans le Rapport d’octobre. Quant à la croissance des salaires du secteur privé mesurée d’après les microdonnées de l’EPA, qui tiennent compte des changements de composition, elle est descendue à 3,4 % en décembre, comparativement à 4 % en septembre.
La modération de la croissance des salaires a réduit le risque que la hausse des prix de certains services s’avère plus persistante que prévu (Risques, Rapport sur la politique monétaire d’octobre 2024).
Inflation
L’inflation est restée près de la cible de 2 %, comme prévu dans le Rapport d’octobre (graphique 8). Elle a été de 1,8 % en décembre selon l’IPC, tandis que les mesures de l’inflation fondamentale privilégiées par la Banque, l’IPC-méd et l’IPC-tronq, ont été respectivement de 2,4 et 2,5 %.
La Banque estime que l’inflation sous-jacente est proche de 2 %. Rien n’indique que les pressions inflationnistes sont généralisées. La part des composantes de l’IPC qui affichent un taux d’augmentation de plus de 3 % se situe maintenant sous sa moyenne historique. Les attentes d’inflation sont revenues en grande partie à la normale.
L’inflation est restée autour de 2 %
L’inflation mesurée par l’IPC reste proche de 2 %. La hausse des prix des services liés au logement est la seule composante majeure à être au-dessus de sa moyenne historique (graphique 9). En particulier, l’augmentation des loyers et du coût de l’intérêt hypothécaire demeure élevée, mais elle a ralenti.
En même temps, l’inflation mesurée par les autres principales composantes de l’IPC s’est généralement tenue en dessous des moyennes historiques. De plus, le congé de TPS/TVH pèse sur l’inflation à court terme, surtout dans des catégories comme la restauration et les biens semi-durables. D’ici mars 2025, ce congé de taxes aura pris fin et la hausse des prix dans ces catégories reprendra.
L’inflation dans le secteur des biens reste légère
Le taux d’inflation dans le secteur des biens a été de -0,1 % en décembre, ce qui est conforme aux observations des derniers mois. L’offre excédentaire et l’atténuation passée des pressions sur les coûts continuent de peser sur la hausse des prix de nombreux biens. De plus, le congé temporaire de TPS/TVH a réduit la croissance des prix de certains biens, notamment les aliments, l’alcool, les vêtements pour enfants et les jouets. Ces facteurs ont été partiellement contrebalancés par la récente dépréciation du dollar canadien, qui a eu un léger effet inflationniste sur les prix des biens importés.
L’inflation a diminué du côté des services
L’augmentation des prix des services hors logement a ralenti pour atteindre 2 % en décembre, par rapport à 2,3 % en septembre. Elle a été freinée par le congé temporaire de TPS/TVH, surtout du côté des services alimentaires.
La hausse des prix des services liés au logement a perdu de la vitesse, passant de 5,8 % en septembre à 5,1 % en décembre. Cette baisse est venue d’un ralentissement de la croissance des loyers et du coût de l’intérêt hypothécaire. Bien que les loyers moyens demandés semblent avoir diminué en décembre selon des données récentes, la hausse des loyers persiste et demeure élevée. Cette persistance vient surtout du fait que les données continuent de s’ajuster graduellement aux augmentations passées des nouveaux loyers (Point de mire : Incidence de la fréquence des modifications de prix sur l’inflation, Rapport d’octobre 2024).
L’IPC-méd et l’IPC-tronq demeurent supérieurs à 2 % surtout à cause de la persistance des frais de logement élevés qui se répercute sur la distribution des variations des prix1. Dans le graphique 10, on peut voir la distribution des composantes de l’inflation en décembre 2024 par rapport à la normale historique (de 1995 à 2019). La distribution des composantes hors logement (graphique 10, courbes bleues) est en grande partie revenue à cette normale. En revanche, la hausse des frais de logement (graphique 10, courbes jaunes) est encore soutenue plus fortement que d’habitude par certaines composantes affichant un taux bien supérieur à 2 %.
Graphique 10 : La hausse des frais de logement demeure inhabituellement élevée et dispersée
Densité du taux de variation sur un an, données mensuelles
Sources : Statistique Canada et calculs de la Banque du Canada
Dernière observation : décembre 2024
Les attentes d’inflation sont presque revenues à la normale
Les attentes d’inflation des consommateurs et des entreprises sont presque revenues à la normale (graphique 11). Celles des consommateurs ont continué de se modérer durant le quatrième trimestre, tandis que les trois quarts des entreprises anticipent maintenant que l’inflation va rester entre 1 et 3 % pour tous les horizons.
Graphique 11 : Les attentes d’inflation sont largement revenues à la normale
Données trimestrielles et mensuelles
Sources : Consensus Economics, Banque du Canada et calculs de la Banque du Canada
Dernières observations : décembre 2024 (Consensus Economics), 2024T4 (enquête sur les attentes des consommateurs au Canada et enquête sur les perspectives des entreprises), 23 janvier 2025 (Le Pouls des leaders d’entreprise)
Notes
- 1. Par exemple, le coût de l’intérêt hypothécaire, qui représente 5,6 % du panier de l’IPC, a été exclu de l’IPC-tronq pendant la majeure partie des deux dernières années. Cette exclusion d’une catégorie prépondérante au fil du temps limite la mesure dans laquelle l’IPC-tronq peut exclure symétriquement la volatilité mensuelle des prix dans d’autres catégories. De ce fait, le coût de l’intérêt hypothécaire peut contribuer indirectement à l’IPC-tronq même s’il est exclu de la mesure. Cet effet indirect est devenu de plus en plus important en 2024. De plus, d’autres composantes du logement, comme le loyer, ont souvent été incluses dans l’IPC-trim, ce qui contribue directement à une partie de la vigueur restante de la mesure.[←]