Rapport sur la politique monétaire – Juillet 2024 – Point de mire
L’inflation dans le secteur des biens hors énergie a enregistré un recul marqué dans de nombreux pays, tandis qu’elle reste élevée dans le secteur des services hors logement. L’examen des facteurs à l’origine des récentes variations peut donner des indications sur la direction potentielle de l’inflation, du moins à court terme.
L’inflation concernant les biens hors énergie, depuis son sommet de 7,2 % en septembre 2022, est descendue jusqu’à 0,3 % en juin, ce qui est sous sa moyenne historique. Du côté des services hors logement, l’inflation a connu en revanche une hausse récente et avoisine sa moyenne historique.
Secteur des biens hors énergie
L’inflation dans le secteur des biens hors énergie a enregistré un recul marqué dans de nombreux pays. La baisse des coûts des intrants est la principale explication de ce recul, y compris au Canada1 .
En 2021, les coûts des intrants ont grandement augmenté sous l’effet de facteurs comme la perturbation des chaînes d’approvisionnement attribuable à la pandémie, les intempéries et les prix élevés de l’énergie. Peu après, la hausse des prix des aliments s’est accélérée. Atteignant un sommet au milieu de 2022, ces pressions sur les coûts ont ensuite commencé à s’atténuer et la croissance des prix des aliments a enregistré un recul constant (graphique 18).
La baisse a été généralisée
L’inflation dans le secteur des biens hors aliments et énergie a aussi connu une baisse importante, passant d’un sommet de 5,8 % en juin 2022 à -0,5 % en juin 2024. Cette diminution est générale. On note de fortes décélérations dans toutes les grandes catégories, voire des réductions de prix au regard des pics récents dans la plupart des catégories.
Les coûts plus bas ont été le principal facteur. Cette baisse se voit tout particulièrement dans les frais de transport et les prix de l’énergie, qui avaient grimpé en 2021 avec la perturbation des chaînes d’approvisionnement durant la pandémie. Pour bon nombre de produits finis importés, comme les vêtements, et pour les biens intermédiaires, comme les plastiques et les produits chimiques, les taux d’inflation ont également enregistré des replis notables.
De plus, puisque les dépenses de consommation qui portent sur une grande partie des biens hors aliments et énergie sont discrétionnaires par nature, l’affaiblissement de la demande intérieure a aussi contribué au recul de l’inflation. Cette faiblesse des dépenses discrétionnaires est d’ailleurs confirmée par les résultats de l’enquête sur les attentes des consommateurs au Canada et de l’enquête sur les perspectives des entreprises.
Services hors logement
L’inflation dans le secteur des services hors logement s’est chiffrée à 2,9 % en juin au Canada, ce qui est près de sa moyenne historique. Ce taux est inférieur aux niveaux observés aux États-Unis et en zone euro, lesquels restent de l’ordre de 4-5 % (graphique 19).
Au Canada, l’inflation dans le secteur des services hors logement s’est située à environ 2 % une bonne partie de la dernière année, bien en dessous de sa moyenne historique. Cette faiblesse résultait de plusieurs facteurs, comme l’apparition d’une offre excédentaire et la baisse particulièrement abrupte des prix des services de communication.
Des tensions inflationnistes sous-jacentes demeurent
Quoi qu’il en soit, la croissance des prix entourant les services hors logement s’est redressée ces derniers mois, dans un contexte où le rythme des baisses de prix provenant des services de communication s’est modéré. En fait, sans les prix des services de communication, l’inflation dans le secteur des services hors logement serait de 3,8 % (graphique 19, ligne jaune). Cette observation donnerait à penser qu’il reste des tensions inflationnistes sous-jacentes dans cette catégorie.
Dans le but de mieux comprendre ces tensions inflationnistes sous-jacentes, le personnel de la Banque du Canada a calculé le taux d’inflation médian pour les services hors logement en se fondant sur les prix d’environ 10 000 services distincts2. Ce taux est encore élevé par rapport à la normale, ce qui porte à croire qu’il reste des tensions inflationnistes (graphique 20).
Les microdonnées de l’Enquête sur la population active (EPA) semblent par ailleurs signaler que la forte croissance des coûts de main-d’œuvre a pu continuer à être une source de pressions à la hausse sur l’inflation. Le graphique 20 compare le taux d’inflation médian dans le secteur des services hors logement et une mesure de la croissance des salaires calculée à partir des microdonnées3. Il en ressort une corrélation évidente entre les deux séries de données.
Même si cette mesure de la croissance des salaires a été volatile, elle a diminué par rapport à son sommet. Il y aurait donc lieu de penser que l’inflation dans le secteur des services hors logement se modérera si la croissance des salaires continue à fléchir.
Notes
- 1. Les coûts des intrants correspondent à une estimation fondée sur la moyenne pondérée des coûts liés à la chaîne d’approvisionnement, à savoir les coûts des importations, de la production, du transport et de la main-d’œuvre.[←]
- 2. Ce taux est la médiane pondérée de tous les taux d’inflation non nuls concernant les services hors composantes liées au logement présents dans les microdonnées sur les prix à la consommation. Pour en savoir plus sur cet ensemble de données, voir O. Bilyk, M. Khan et O. Kostyshyna, « Pratiques d’établissement des prix et inflation durant la pandémie de COVID-19 : ce que révèlent les microdonnées sur les prix à la consommation », note analytique du personnel 2024-6 (avril 2024). Le grand avantage de cette mesure est qu’elle est moins sensible à l’influence des valeurs hors norme, à l’image des prix des services de communication dans les récentes données de l’IPC.[←]
- 3. Cette mesure de la croissance des salaires repose sur les microdonnées de l’EPA. Elle fait abstraction des changements de caractéristiques des travailleurs pour obtenir un prix de la main-d’œuvre corrigé des variations de la qualité. Pour plus de renseignements, voir F. Bounajm, G. Galassi et T. Devakos, « Beyond the averages: Measuring underlying wage growth using LFS microdata », note analytique du personnel de la Banque du Canada (à paraître).[←]