Rapport sur la politique monétaire – Juillet 2024
L’économie mondiale devrait progresser à un rythme d’environ 3 % durant la période de projection, ce qui cadre avec son taux de croissance actuel. L’inflation reste supérieure aux cibles des banques centrales.
La croissance a beaucoup ralenti aux États-Unis, alors qu’elle s’est accélérée dans la zone euro après une période de faiblesse (voir le tableau 3, à la section Projections)
L’inflation reste supérieure aux cibles des banques centrales, tant aux États-Unis que dans la zone euro, en raison de la croissance soutenue des prix des services. Elle devrait diminuer graduellement à mesure que le marché du travail tendra vers un meilleur équilibre.
La Banque surveille ce qui se passe dans l’économie mondiale pour en comprendre les répercussions sur l’économie et l’inflation au Canada.
États-Unis
La croissance a décéléré aux États-Unis cette année. L’inflation est supérieure à la cible en raison de la croissance toujours vigoureuse des prix des services, mais elle devrait diminuer à mesure que les marchés du travail s’équilibreront.
La croissance de l’économie américaine a nettement ralenti
La croissance de l’économie américaine serait passée, en moyenne, d’à peu près 4 % dans la deuxième moitié de 2023 à environ 1½ % dans la première moitié de 2024.
La croissance de la consommation a décéléré, passant de plus de 3 % en moyenne dans la deuxième moitié de 2023 à environ 1½ % dans la première moitié de 2024. Cela tient en grande partie aux effets des hausses passées des taux d’intérêt, qui ont fait monter les coûts d’emprunt. La croissance du crédit à la consommation a ralenti, et les défauts de paiement sur cartes de crédit et les prêts en souffrance sont en hausse.
La croissance des dépenses publiques américaines s’est aussi modérée dans la première moitié de 2024. Cela s’explique surtout par l’incidence plus faible des mesures incitatives du gouvernement sur les dépenses en infrastructures, de même que par les contraintes législatives qui ont freiné l’augmentation des dépenses discrétionnaires de l’État fédéral.
Cette croissance plus modérée de la consommation et des dépenses publiques a ainsi contribué à ralentir l’expansion économique.
Cela dit, dans la deuxième moitié de 2024, la croissance du produit intérieur brut devrait atteindre environ 2 %, se redressant à mesure que la croissance des exportations et de la consommation s’accélérera. Il subsiste toutefois une part d’incertitude quant à la vigueur de ce redressement.
Selon la projection, la croissance devrait se chiffrer juste au-dessus de 2 % en 2025 et 2026. Ce taux est généralement conforme aux perspectives de croissance de la production potentielle. On s’attend à ce que l’augmentation des dépenses de consommation s’accélère en 2026 en réaction aux baisses de taux d’intérêt. Cela compensera partiellement le ralentissement des investissements des entreprises, qui devrait se produire à mesure que l’élan donné par diverses mesures incitatives gouvernementales s’essoufflera. En ce qui concerne la croissance des dépenses publiques, on prévoit qu’elle continuera de se modérer dans la deuxième moitié de 2024 et demeurera faible par la suite.
L’inflation reste au-dessus de la cible aux États-Unis
L’inflation a baissé aux États-Unis (graphique 12). Cependant, la forte augmentation des prix des services la maintient au-dessus de la cible de 2 % de la Réserve fédérale, et ce, même si le taux de croissance des prix des biens est revenu près de zéro, se rapprochant ainsi de sa moyenne historique (voir Point de mire : Facteurs derrière l’augmentation des prix des biens et services compris dans la mesure de l’inflation fondamentale).
Graphique 12 : L’inflation reste au-dessus des cibles des banques centrales
Taux de variation sur un an, données mensuelles
Sources : Statistique Canada, US Bureau of Economic Analysis et Eurostat via Haver Analytics et calculs de la Banque du Canada
Dernières observations : mai 2024 (États-Unis), juin 2024 (autres)
La vigueur de l’inflation dans le secteur des services est attribuable à deux facteurs :
- Les prix de certaines composantes de l’inflation qui sont fixés dans des contrats à long terme – comme les logements locatifs et l’assurance automobile – s’ajustent lentement et continuent d’augmenter en réaction aux pressions inflationnistes passées.
- L’augmentation des prix de certaines composantes volatiles du secteur des services – comme les services financiers – a été relativement forte dans la première moitié de l’année.
L’inflation aux États-Unis devrait s’atténuer progressivement dans les prochains trimestres, à mesure que l’inflation dans le secteur des services se modérera. On prévoit aussi que la détente en cours du marché du travail viendra contribuer à réduire les pressions sur les coûts. La hausse des frais de logement devrait pour sa part continuer de ralentir, principalement en raison de l’accroissement plus lent des prix des nouveaux contrats de location, qui se reflète graduellement dans les mesures officielles de l’inflation.
Dans l’ensemble, maintenant que la demande et l’offre sont largement équilibrées et que l’économie croît à un rythme plus modéré, les conditions sont en place pour un retour graduel de l’inflation à la cible de 2 % de la Réserve fédérale.
Autres grandes économies
La croissance se redresse dans la zone euro après une période de faiblesse, tandis qu’elle affiche un rythme modeste depuis quelques trimestres en Chine.
Les économies de la zone euro ont renoué avec la croissance
On s’attend à ce que le taux de croissance annualisé de l’activité économique dans la zone euro ait tout juste dépassé 1 % dans la première moitié de 2024, après avoir été au point mort dans la deuxième moitié de 2023. Une reprise s’est amorcée, surtout grâce aux services, tandis que les perturbations et les chocs passés de l’approvisionnement énergétique continuent de peser sur le secteur manufacturier.
Au cours de la période de projection, la croissance devrait se raffermir peu à peu pour avoisiner 1½ % en 2026, soutenue par la résilience du marché du travail, une hausse des revenus réels et une baisse progressive des taux d’intérêt.
L’inflation dans la zone euro a tourné autour de 2½ % ces derniers temps. La majeure partie des pressions inflationnistes restantes vient du secteur des services – surtout des composantes liées au tourisme, comme l’hébergement à l’hôtel et les services de restauration.
Le rythme actuel d’inflation devrait plus ou moins se maintenir au cours des prochains trimestres, notamment en raison de la croissance soutenue des salaires et de l’importante demande de services. Notons également que la forte demande liée à certains événements culturels et sportifs, comme les Jeux olympiques de Paris, devrait avoir un effet temporaire sur les prix, contribuant ainsi à maintenir l’inflation à un niveau élevé.
L’inflation devrait diminuer à compter de 2025 à mesure que ces facteurs ponctuels s’estomperont. Elle devrait ensuite poursuivre sa descente vers la cible de la Banque centrale européenne étant donné que les taux d’intérêt réels devraient demeurer restrictifs. De ce fait, on s’attend à ce qu’un modeste degré d’offre excédentaire persiste, ce qui contribuera à alléger les pressions exercées par les coûts de main-d’œuvre.
Les exportations et la croissance ont ralenti en Chine
L’économie chinoise a enregistré une modeste expansion ces derniers trimestres. C’est en grande partie grâce à la croissance généralisée des exportations, la baisse des prix des exportations chinoises ayant stimulé la demande étrangère. En revanche, la demande intérieure n’a que faiblement progressé. La réduction du levier d’endettement dans le secteur immobilier a freiné l’investissement, et la chute des prix du logement a pesé sur la confiance des consommateurs.
D’après la projection de la Banque, l’expansion économique chinoise devrait ralentir à mesure que la croissance des exportations se modérera. Ce ralentissement des exportations devrait être partiellement compensé par la contribution de l’État aux dépenses en infrastructures.
Ailleurs dans les pays émergents d’Asie, la croissance devrait être soutenue par la reprise en cours du tourisme et des exportations. Et dans l’ensemble des pays émergents importateurs de pétrole, elle devrait essentiellement maintenir son rythme actuel jusqu’à la fin de 2026.
Produits de base
Le prix du baril de Brent a fluctué autour de 85 $ US, soit le niveau présumé dans le Rapport d’avril et la projection actuelle (graphique 13; voir aussi Principaux éléments de la projection, à la section Projections).
En réponse à la demande plus faible que prévu, les membres de l’Organisation des pays exportateurs de pétrole et certains producteurs non membres ont prolongé leurs réductions de production au moins jusqu’à la fin de l’été.
Au Canada, la mise en exploitation commerciale du réseau agrandi d’oléoducs Trans Mountain a contribué à réduire l’écart entre les prix du West Texas Intermediate et du Western Canadian Select. En effet, cet écart avoisine désormais les 15 $ US, après s’être maintenu en moyenne à presque 20 $ US en 2022-2023.
L’indice des prix des produits de base non énergétiques de la Banque est légèrement inférieur à ce qu’il était au moment de la parution du Rapport d’avril. Les prix du bois d’œuvre ont baissé en raison du récent ralentissement de la construction résidentielle aux États-Unis. De même, les prix des métaux communs et des produits agricoles ont quelque peu baissé.
Conditions financières
Les conditions financières mondiales se sont assouplies depuis la publication du Rapport d’avril.
Les cours des actions américaines ont continué d’augmenter, en particulier dans le secteur technologique. Pour leur part, les rendements obligataires américains ont baissé en raison de données économiques plus faibles qu’anticipé et des attentes selon lesquelles la Réserve fédérale réduira bientôt ses taux d’intérêt. En ce qui concerne les obligations de sociétés, les écarts sont historiquement faibles et les émissions ont été robustes.
Les rendements obligataires canadiens ont également chuté depuis la parution du Rapport d’avril, ce qui s’explique par deux grands facteurs :
- Les données économiques canadiennes ont été plus faibles que ce à quoi les marchés s’attendaient.
- La trajectoire du taux directeur indiquée par le marché des swaps indexés sur le taux à un jour a diminué après la baisse du taux directeur de la Banque en juin.
Le rendement des obligations d’État canadiennes à deux ans est maintenant inférieur de presque 80 points de base à celui des obligations américaines équivalentes (graphique 14).
Enfin, la valeur du dollar canadien par rapport au dollar américain demeure essentiellement inchangée, se situant à environ 73 cents américains.
Graphique 14 : Depuis la parution du Rapport d’avril, les conditions financières mondiales se sont assouplies et le dollar canadien est resté stable
Données quotidiennes
Sources : Bloomberg Finance L.P. et calculs de la Banque du Canada
Dernière observation : 18 juillet 2024