Le rôle des banques centrales étrangères sur la liquidité du marché des obligations du gouvernement du Canada

Introduction

Imaginez que vous mangez avec des amis dans un restaurant bondé un vendredi soir. Après une heure, vous avez tous terminé votre repas, mais vous décidez de rester un peu plus longtemps à table pour continuer de discuter.

Le fait de rester plus longtemps à table n’est pas sans conséquence. Évidemment, vos amis et vous avez le droit de rester attablés après votre repas. En fait, vous pourriez même commander des boissons ou des desserts, ce qui générerait plus de revenus pour le restaurant. Cependant, cela réduit le nombre de tables disponibles pour les autres clients et peut causer des temps d’attente plus longs ou amener le restaurant à refuser certains clients.

D’une certaine façon, les actifs financiers sont comme les tables dans un restaurant. Quand des investisseurs gardent leurs actifs pendant de longues périodes, ce qu’on appelle un comportement d’achat à long terme, moins d’actifs sont disponibles pour les autres investisseurs, ce qui peut faire diminuer la liquidité des marchés secondaires.

Nous examinons le comportement de négociation des banques centrales étrangères et son incidence possible sur la liquidité du marché des obligations du gouvernement du Canada1. Notre analyse s’appuie sur de récents projets réalisés par le personnel de la Banque du Canada qui visaient à mieux comprendre le rôle des gestionnaires d’actifs concernant la liquidité des marchés canadiens des titres à revenu fixe (Sandhu et Vala, 2023; Bédard-Pagé et autres, 2021). La Banque surveille la liquidité sur les marchés secondaires et dispose de différents outils pour favoriser la liquidité dans certaines circonstances. En effet, la liquidité et le bon fonctionnement des marchés des titres à revenu fixe sont importants pour la transmission de la politique monétaire et la stabilité du système financier.

Nous estimons que les banques centrales étrangères détiennent au moins de 12 à 21 % du flottant des obligations du gouvernement du Canada, soit le volume des obligations du gouvernement du Canada en circulation qui ne sont pas détenues par la Banque. De plus, les banques centrales étrangères ont tendance à conserver leurs obligations du gouvernement du Canada plus longtemps que d’autres participants aux marchés.

Ce comportement d’achat à long terme peut promouvoir la stabilité étant donné que les décisions de négociation des banques centrales étrangères peuvent être moins sensibles aux conditions de marché que celles d’autres types de gestionnaires d’actifs. Plus précisément, au plus fort de la période d’illiquidité des marchés en mars 2020, les banques centrales étrangères avaient un volume négligeable d’opérations, tandis que d’autres types de gestionnaires d’actifs ont vendu des obligations du gouvernement du Canada, ce qui a entraîné des tensions sur la liquidité des marchés (Sandhu et Vala, 2023).

En revanche, le fait de conserver des titres longtemps peut diminuer le volume d’obligations du gouvernement du Canada disponibles sur les marchés secondaires et réduire possiblement la liquidité. Nous remarquons que les banques centrales étrangères ne prêtent qu’une petite part de leurs obligations sur le marché des pensions, ce qui est un autre signe de comportement d’achat à long terme. De plus, nous constatons une relation entre l’illiquidité et la détention d’un volume important d’obligations du gouvernement du Canada par les banques centrales étrangères. Cela s’explique par le fait que leurs avoirs ont une relation positive et statistiquement significative avec le volume d’emprunt des négociants principaux du Programme d’opérations de cession en pension de titres (POCPT) de la Banque, qui a été conçu pour favoriser la liquidité sur les marchés du financement par titres.

Bien que nos résultats montrent que le comportement d’achat à long terme des banques centrales étrangères peut contribuer à l’illiquidité, ce n’est qu’un volet du tableau. La participation des banques centrales étrangères au marché des obligations du gouvernement du Canada comporte de nombreux avantages en plus de contribuer au maintien de la stabilité en période de turbulences. Par exemple, leur demande constante d’obligations du gouvernement du Canada peut réduire les coûts de financement pour l’État (Lane, 2019; Pomorski, Rivadeneyra et Wolfe, 2014)2.

Les banques centrales gèrent des portefeuilles de réserves de change

Les banques centrales – et, dans une moindre mesure, d’autres autorités comme les États – sont des gestionnaires de portefeuilles de réserves de change. Les réserves de change sont des actifs libellés en monnaie étrangère. Ces réserves permettent aux banques centrales d’intervenir sur leurs marchés des changes, ce qui peut aider à :

  • promouvoir les exportations d’un pays
  • réduire les sorties de capitaux
  • gérer la volatilité des marchés

De plus, les réserves peuvent constituer une source de liquidités pouvant être mise à profit pour notamment respecter des obligations financières internationales ou fournir des devises à des institutions nationales.

Comme les réserves sont détenues par mesure de précaution, les banques centrales et les États gèrent habituellement ces portefeuilles dans le but de préserver le capital et de maintenir la liquidité. L’objectif de générer des rendements vient communément en troisième, à condition que les deux premiers soient atteints. Par conséquent, les réserves de change sont en général constituées de titres très liquides ou de haute qualité, tels que des obligations d’État et des bons du Trésor bien notés ainsi que des titres émis par des organismes d’État ou des pouvoirs publics locaux (Pomorski, Rivadeneyra et Wolfe 2014).

À l’échelle mondiale, les réserves de change libellées en dollars canadiens ont augmenté au cours des dernières années et représentent 2,39 % de l’ensemble des réserves, ce qui est peu comparativement aux devises comme le dollar américain ou l’euro (Fonds monétaire international, 2024). Toutefois, cette part peut être importante, car les marchés financiers canadiens sont plus petits que ceux de certains autres pays.

Les banques centrales étrangères sont des acteurs importants du marché des obligations du gouvernement du Canada

Nous avons remarqué la présence des banques centrales étrangères sur le marché en examinant leurs avoirs en obligations du gouvernement du Canada. Étant donné l’absence d’un ensemble complet de données sur les avoirs des banques centrales étrangères, nous évaluons leurs avoirs en obligations du gouvernement du Canada à l’aide de trois méthodes et de deux ensembles de données différents. Combinées, les différentes méthodes nous donnent une idée du niveau des avoirs des banques centrales étrangères.

  • Premièrement, nous utilisons les données sur les avoirs des banques centrales étrangères qui sont sous la garde de la Banque. Cependant, ces données excluent les banques centrales étrangères ayant une autre institution qui assure la garde de leurs placements canadiens.
  • Deuxièmement, nous avons recours aux données du Système d’établissement de relevés des opérations sur le marché (SEROM) pour recenser les opérations de vente et d’achat d’obligations du gouvernement du Canada sur les marchés secondaires où les banques centrales étrangères étaient des contreparties, et nous en soustrayons les obligations échues pour estimer leurs avoirs (voir Sandhu et Vala, 2023 pour une description de ces données). Ces données comprennent un ensemble plus vaste de banques centrales étrangères. Toutefois, le recensement ne commence qu’en octobre 2019, donc nous excluons de notre estimation toutes les obligations achetées et détenues avant cette date. De plus, nous ne prenons pas en compte les opérations sur le marché primaire ni celles effectuées par des courtiers qui ne sont pas tenus d’indiquer leurs opérations dans le SEROM.
  • Troisièmement, nous nous servons de la deuxième méthode où nous utilisons les données du SEROM et nous incluons les avoirs initiaux en date d’octobre 2019 que la Banque garde pour le compte de banques centrales étrangères.

Le graphique 1 montre la fourchette des avoirs estimés des banques centrales étrangères à l’aide de nos trois méthodes. Les avoirs de ces banques centrales représenteraient au moins de 12 à 21 % du flottant des obligations du gouvernement du Canada, ce qui montre que les banques centrales étrangères détiennent une part importante de ce type d’obligations, peu importe la méthode d’estimation utilisée3.

Ces estimations peuvent toutefois sous-estimer les avoirs des banques centrales étrangères. En effet, même si nous combinons les deux ensembles de données, nous n’avons pas les données concernant les avoirs initiaux des banques centrales étrangères sous la garde d’une autre institution que la Banque du Canada.

Graphique 1 : Les banques centrales étrangères détiennent une part importante du flottant des obligations du gouvernement du Canada

Les banques centrales étrangères détiennent leurs titres longtemps

La liquidité des marchés n’est jamais parfaitement avantagée par un comportement d’achat à long terme :

  • D’une part, les investisseurs qui conservent leurs titres peuvent favoriser la stabilité des marchés en période de turbulences, contrairement à d’autres investisseurs qui effectueraient des opérations rapidement en réponse aux fluctuations des marchés et amplifieraient ainsi les tensions sur ces marchés. Par exemple, Sandhu et Vala (2023) montrent que les fonds de couverture et d’autres clients de courtiers ont vendu des obligations du gouvernement du Canada au plus fort des turbulences en mars 2020 et ont ainsi accentué les tensions sur la liquidité des marchés. Cependant, nous constatons que les activités de négociation des banques centrales étrangères étaient négligeables durant cette période.
  • D’autre part, les investisseurs qui conservent leurs titres peuvent aussi réduire la liquidité parce qu’ils limitent effectivement le nombre de titres disponibles pour les autres participants aux marchés. Ce comportement du côté des banques centrales étrangères peut avoir des conséquences potentielles plus grandes que s’il s’agissait d’autres types de participants aux marchés, étant donné leur présence importante sur le marché des obligations du gouvernement du Canada.

À partir de données du SEROM, nous calculons la période entre l’achat d’une obligation par chaque banque centrale étrangère et la date à laquelle cette même obligation a été vendue ou est arrivée à échéance. Pour estimer cette période de détention, nous tenons seulement compte des obligations qui ont été à la fois achetées et vendues ou qui sont arrivées à échéance durant notre période d’échantillonnage. Il est possible que certaines obligations aient été achetées avant cette période ou vendues après, mais nous excluons ces opérations de notre calcul. Pour chaque banque centrale étrangère, nous utilisons une pondération en fonction du volume pour regrouper les périodes de détention des différentes obligations. Ensuite, nous prenons la période de détention médiane de ces différentes banques afin de produire une estimation pour l’ensemble du secteur.

Le graphique 2 compare les périodes de détention estimées des banques centrales étrangères à celles d’autres types de participants aux marchés. Les banques centrales étrangères sont celles dont la période de détention estimée est la plus longue, soit environ quatre mois, ce qui laisse supposer qu’elles sont le type de gestionnaires d’actifs qui conservent le plus leurs titres. Ce comportement est peut-être lié au fait qu’une banque centrale accorde moins d’importance aux rendements, puisque ses objectifs de placement diffèrent de ceux des autres types de gestionnaires d’actifs. Cette situation pourrait toutefois se traduire par un nombre moins élevé d’activités de négociation et donc des périodes de détention plus longues.

Graphique 2 : Les périodes de détention estimées sont plus longues pour les banques centrales étrangères que les autres gestionnaires d’actifs

Les banques centrales étrangères prêtent une petite partie des titres qu’elles détiennent sur le marché des pensions

Les investisseurs qui conservent des titres longtemps pourraient compenser les effets négatifs de ce comportement sur la liquidité des marchés s’ils prêtaient leurs titres à d’autres participants sur les marchés du financement par titres. Afin de voir dans quelle mesure les banques centrales étrangères le font, nous utilisons les données sur les opérations de pension du SEROM pour calculer le volume d’obligations du gouvernement du Canada qu’elles prêtent sur le marché des pensions, c’est-à-dire leur position brute de mise en pension.

Le graphique 3 montre que les banques centrales étrangères ont prêté pour environ 6 milliards de dollars d’obligations du gouvernement du Canada, en moyenne, chaque jour de juin 2023 à juin 2024. Cette position brute de mise en pension est nettement inférieure à celle des caisses de retraite et des fonds de couverture, et légèrement inférieure à celle des gestionnaires de patrimoine. Les assureurs et les autres types de participants aux marchés ont des positions minimes. Quant aux banques centrales étrangères, leur position brute de mise en pension ne représente qu’environ entre 0 et 4 % du total de leurs avoirs en obligations du gouvernement du Canada, ce chiffre variant selon la méthode d’estimation utilisée.

Graphique 3 : La position brute de mise en pension des banques centrales étrangères est inférieure à celle d’autres gestionnaires d’actifs

Certaines banques centrales étrangères prêtent peut-être leurs obligations du gouvernement du Canada sur le marché des prêts de titres plutôt que sur le marché des pensions. Les banques centrales étrangères ayant recours à la Banque pour assurer la garde de leurs titres ne les prêtent probablement pas. Toutefois, nous ne sommes pas capables de mesurer l’activité de prêt de titres des banques centrales étrangères sous la garde d’autres institutions. Le faible niveau d’activité de prêt de titres des banques centrales étrangères tient notamment au fait que les actifs en dollars canadiens représentent une part minime de leur portefeuille. Par conséquent, les rendements supplémentaires qu’elles pourraient tirer en augmentant leurs activités de financement par titres sur les marchés canadiens n’en valent peut-être pas les coûts d’exploitation, comparativement aux rendements à tirer en prêtant des actifs dans d’autres devises. D’après les données à notre disposition, cette activité limitée sur les marchés, combinée au fait qu’elles conservent leurs titres plus longtemps, laisse supposer que les banques centrales étrangères pourraient causer une détérioration de la liquidité sur les marchés secondaires des obligations du gouvernement du Canada.

Les obligations détenues par les banques centrales étrangères tendent à être plus illiquides

Nous déterminons les cas d’illiquidité sur le marché des obligations du gouvernement du Canada à l’aide du POCPT de la Banque, qui, pendant sa période d’activité de juillet 2020 à octobre 2024, visait à favoriser la liquidité des marchés du financement par titres. Grâce à ce programme, la Banque a pu prêter ses titres du gouvernement du Canada à des négociants principaux à un faible taux en guise de soutien. Compte tenu de certaines conditions et restrictions du programme, ces négociants avaient surtout avantage à emprunter des obligations si leurs actifs étaient particulièrement illiquides sur les marchés secondaires.

À partir des données quotidiennes concernant les obligations, nous utilisons une régression linéaire simple pour évaluer le lien entre les volumes du POCPT et différents facteurs. Autrement dit, nous examinons une courte liste de facteurs qui pourraient expliquer les volumes du programme. Ces facteurs comprennent des caractéristiques propres aux obligations, comme leur échéance ou le fait qu’il s’agit ou non d’obligations de référence, ainsi que des paramètres propres au programme, comme les prix et les limites de soumission. Nous tenons également compte des obligations du gouvernement du Canada détenues par les banques centrales étrangères en consultant les données portant sur les titres dont la Banque assure la garde, puisque la série chronologique est plus exacte que celle des données du SEROM, qui exige d’accumuler les opérations au fil du temps pour estimer les avoirs.

Le tableau 1 présente les coefficients et la signification statistique de chaque facteur dans le modèle. Nos résultats indiquent ce qui suit :

  • Comme on peut s’y attendre en étudiant le lien entre les facteurs et la liquidité, les obligations dont le volume est plus élevé dans le POCPT ont tendance à :
    • afficher un flottant moins important
    • être des obligations de référence
    • avoir une durée résiduelle plus longue
    • avoir une échéance plus courte
  • Les avoirs des banques centrales étrangères ont une relation positive et statistiquement significative avec les volumes du POCPT. Concrètement, lorsque le volume d’une certaine obligation du gouvernement du Canada détenue par ces banques augmente de 1 milliard de dollars canadiens, son volume dans le POCPT augmente en moyenne de 220 millions de dollars canadiens.

Tableau 1 : Modèle de régression appliqué aux volumes des opérations de pension sur titres

Tableau 1 : Modèle de régression appliqué aux volumes des opérations de pension sur titres
Variable indépendante Coefficient et signification
Avoirs des banques centrales étrangères (en milliards) 0,22***
Flottant (en milliards) -0,04***
Variable factice pour les obligations de référence 0,37***
Durée résiduelle (années) 0,01***
Échéance (années) -0,01***
Écart de soumission maximal (points de base) -0,09***
Limite de soumission maximale (milliards) -0,02***
Constante 1,53***
Nombre d’observations 45 341
Coefficient de détermination (R2) 0,210

Nota : Toutes les variables de régression sont statistiquement significatives au seuil de 1 % (***).

Même si nous ne pouvons pas déterminer de façon concluante si les banques centrales étrangères sont une cause d’illiquidité ou si elles achètent simplement des obligations déjà moins liquides, nos résultats montrent que leurs avoirs sont associés à de faibles niveaux de liquidité. Si ces banques se mettaient à prêter davantage leurs obligations du gouvernement du Canada sur les marchés du financement par titres, il est possible que les programmes comme le POCPT soient moins nécessaires et que les conditions de liquidité s’améliorent indépendamment des programmes de la Banque. Par exemple, la Banque a un programme de financement par titres qui lui permet de prêter des obligations du Trésor américain à partir des réserves en devises du Canada afin d’en bonifier les rendements tout en soutenant la liquidité des marchés.

Conclusion

Nous estimons que les banques centrales étrangères détiennent une part considérable du flottant des obligations du gouvernement du Canada, soit au moins de 12 à 21 %. Elles ont aussi tendance à conserver ces obligations plus longtemps que d’autres participants aux marchés. Même si ce comportement d’achat à long terme peut favoriser la stabilité en période de turbulences, il pourrait réduire la disponibilité des obligations du gouvernement du Canada sur les marchés secondaires, voire nuire à la liquidité. En effet, les banques centrales étrangères ne prêtent qu’une petite part de leurs obligations sur le marché des pensions, ce qui est un autre signe de leur tendance à conserver leurs titres longtemps.

Nous constatons aussi que la détention d’un plus grand volume d’obligations du gouvernement du Canada par les banques centrales étrangères est associée à une situation d’illiquidité sur le marché de ces obligations. Cela vient du fait que ce volume a une relation positive et statistiquement significative avec les volumes qui passent par le POCPT de la Banque. Néanmoins, la participation des banques centrales étrangères sur le marché des obligations du gouvernement du Canada génère plusieurs avantages importants, comme celui de favoriser la stabilité en périodes de turbulences.

Annexe

Robustesse des résultats concernant les périodes de détention

Pour calculer les périodes de détention, nous ne regardons que les obligations qui ont été achetées et vendues ou qui sont arrivées à échéance entre le 1er août 2020 et le 10 juin 2024. Nous excluons toute opération non appariée, c’est-à-dire les obligations vendues qui n’ont pas été rachetées ou les obligations achetées qui n’ont pas été revendues ou qui ne sont pas arrivées à échéance. Comparées à d’autres types de participants aux marchés, les banques centrales étrangères étaient à l’origine d’une proportion beaucoup plus grande d’opérations non appariées et donc exclues du calcul des périodes de détention. Les opérations non appariées indiquent des périodes de détention qui s’étendent possiblement au-delà de notre période d’échantillonnage, ce qui signifie que les banques centrales étrangères détiennent peut-être leurs titres encore plus longtemps que le temps estimé par nos calculs.

Robustesse des résultats concernant la régression

Nous nous penchons sur deux méthodes différentes pour vérifier notre approche servant à mesurer la relation entre le volume d’obligations détenues par les banques centrales étrangères et la liquidité. Les résultats de ces méthodes montrent que nos conclusions globales sont valables. Voici les méthodes en question :

  • Nous appliquons la même régression aux volumes du POCPT, mais nous incluons des effets fixes pour chaque obligation et chaque jour. Ces effets fixes nous permettent de repérer plus rigoureusement toute différence entre les obligations et les journées, par rapport à notre modèle original. En utilisant cet autre modèle de régression, nous constatons que le volume d’obligations du gouvernement du Canada détenues par les banques centrales étrangères entretient encore une relation positive et statistiquement significative avec les volumes du POCPT.
  • Nous tenons aussi compte d’un modèle de régression basé sur une mesure de l’illiquidité autre que les volumes du POCPT. Dans ce modèle, la variable dépendante est l’écart de taux sur les opérations de pension, c’est-à-dire la différence entre le taux des opérations de pension à un jour et le taux moyen pondéré en fonction du volume, mesurée chaque jour pour chaque obligation. Lorsque l’écart est plutôt élevé, on peut en déduire que l’emprunteur d’une obligation dans le cadre d’une convention de rachat renonce à des revenus d’intérêt pour emprunter l’obligation, ce qui donne à penser que cette obligation est rare ou illiquide. Nos résultats restent généralement cohérents dans ce modèle.

Références

Bédard-Pagé, G., D. Bolduc-Zuluaga, A. Demers, J.-P. Dion, M. Pandey, L. Berger-Soucy et A. Walton. 2021. « COVID-19 crisis: Liquidity management at Canada’s largest public pension funds ». Note analytique du personnel 2021-11 de la Banque du Canada.

Feunou, B., J.-S. Fontaine, J. Kyeong et J. Sierra. 2015. « Foreign Flows and Their Effects on Government of Canada Yields ». Note analytique du personnel 2015-1 de la Banque du Canada.

Fonds monétaire international. 2024. « Currency Composition of Official Foreign Exchange Reserves ».

Lane, T. 2019. « La gestion des réserves de change au Canada : une question de prudence ». Discours prononcé devant le Peterson Institute for International Economics, Washington, 6 février.

Pomorski, L., F. Rivadeneyra et E. Wolfe. 2014. « Le dollar canadien comme monnaie de réserve ». Revue de la Banque du Canada, printemps, p. 1-11.

Sandhu, J. et R. Vala. 2023. « Les fonds de couverture soutiennent-ils la liquidité du marché des obligations du gouvernement du Canada? » Note analytique du personnel 2023-11 de la Banque du Canada.

Remerciements

Nous remercions Cassie Davies, Jean-Philippe Dion, Jeffrey Gao, Alexandra Lai, Stéphane Lavoie, Philippe Muller, Andreas Uthemann, Adrian Walton et Jonathan Witmer pour leurs commentaires utiles. Nous sommes également reconnaissants envers Rishi Vala pour son soutien analytique ainsi qu’envers Christina Harvey et Manu Pandey pour leur soutien concernant les données.

  1. 1. Par souci de simplicité, on entend par « banque centrale étrangère » toute banque centrale ou autorité autre que la Banque du Canada qui gère des réserves de change.[]
  2. 2. À titre d’exemple, Feunou et autres (2015) sont d’avis que les achats étrangers d’environ 150 milliards de dollars canadiens d’obligations du gouvernement du Canada ont fait baisser le rendement à 10 ans de 100 points de base entre 2009 et 2012, ce qui a fait diminuer les coûts de financement pour l’État.[]
  3. 3. Nos estimations concernant le volume d’obligations du gouvernement du Canada détenues par les banques centrales étrangères sont inférieures au total des réserves de change libellées en dollars canadiens publié par le Fonds monétaire international. Cette différence découle probablement de nos données limitées et du fait que les banques centrales étrangères investissent dans d’autres actifs canadiens qui sortent du cadre de notre analyse. Par exemple, les banques centrales étrangères pourraient également détenir des bons du Trésor du gouvernement du Canada, des titres émis par des provinces canadiennes ou d’autres titres canadiens.[]

Avis d’exonération de responsabilité

Les notes analytiques du personnel de la Banque du Canada sont de brefs articles qui portent sur des sujets liés à la situation économique et financière du moment. Rédigées en toute indépendance du Conseil de direction, elles peuvent étayer ou remettre en question les orientations et idées établies. Les opinions exprimées dans le présent document sont celles des auteurs uniquement. Par conséquent, elles ne traduisent pas forcément le point de vue officiel de la Banque du Canada et n’engagent aucunement cette dernière.

DOI : https://doi.org/10.34989/san-2024-26

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