Les programmes d’octroi de liquidités aux marchés de la Banque du Canada : les leçons de la pandémie

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Introduction

Bonjour et merci de m’avoir invité pour parler de certaines des mesures prises par la Banque du Canada au début de la pandémie de COVID-19 afin d’assurer la liquidité et le bon fonctionnement des marchés.

On vous avait promis qu’on vous en parlerait, et c’est ce que je compte faire aujourd’hui. Mais, dans un discours sur la liquidité des marchés, je m’en voudrais de ne pas parler d’abord de l’agitation récente dans les systèmes bancaires américain et d’outre-mer. Alors, je vais vous donner brièvement notre point de vue.

Les récentes tensions dans le système bancaire mondial

Aux États-Unis, l’effondrement de la Silicon Valley Bank et de la Signature Bank la même fin de semaine a montré comment une large base concentrée de déposants non assurés, conjuguée à une chute de la valeur des actifs, peut mener à des paniques bancaires. Les autorités américaines ont réagi en prenant le contrôle de ces deux banques et en offrant un soutien extraordinaire à leurs déposants. Et la Réserve fédérale est intervenue en mettant en place un nouveau mécanisme de financement à terme pour les banques qui ont besoin de liquidités.

Peu après, Credit Suisse a subi de fortes pressions du marché. Les autorités suisses ont facilité son rachat par UBS, assurant ainsi la continuité des opérations pour les clients et les contreparties financières de Credit Suisse. Ces événements ont provoqué certaines tensions dans le système financier, mais les marchés fonctionnent.

Les banques mondiales sont plus résilientes aujourd’hui qu’il y a quinze ans, à l’éclosion de la crise financière mondiale. Avec les réformes qui ont été mises en place depuis la crise, elles ont été obligées d’augmenter considérablement leurs réserves de fonds propres et de liquidités. Le système bancaire est ainsi plus sûr et mieux en mesure de résister aux tensions.

Le système bancaire canadien est réputé partout dans le monde pour sa stabilité. Cette réputation bien méritée tient à sa structure, conjuguée aux saines pratiques de gestion des risques de nos institutions financières et à nos cadres de réglementation et de supervision rigoureux. Les banques canadiennes ont bien résisté à la crise financière mondiale, et leur résilience a été renforcée depuis avec la mise en place de nouvelles normes mondiales plus élevées. Mais on sait qu’on n’est pas à l’abri des contrecoups de ce qui arrive ailleurs. Le système financier est hautement intégré à l’échelle mondiale, alors quand il y a des tensions financières à l’étranger, elles peuvent avoir des conséquences négatives chez nous.

La Banque a pour mandat de promouvoir la stabilité du système financier. Ça veut dire qu’on est prêts à intervenir s’il y a des tensions graves et généralisées, et à fournir des liquidités en soutien au système financier. On l’a fait lors de la crise financière mondiale de 2008-2009, et on est intervenu de nouveau pendant les graves perturbations des marchés qui sont survenues au début de la pandémie de COVID-19.

On a ajusté nos mécanismes exceptionnels d’octroi de liquidités en fonction des leçons qu’on a tirées de nos interventions lors de la crise financière mondiale. De la même façon, l’examen de nos interventions durant la pandémie va nous permettre d’améliorer et de mieux cibler nos réponses advenant un autre épisode de turbulences sur les marchés.

Je vais maintenant passer au sujet principal : les leçons tirées de la pandémie de COVID-19 et ce qu’on peut attendre de la Banque si on devait encore faire face à de graves tensions sur le système financier.

Les mesures prises durant la pandémie de COVID-19

Comme on s’en souvient tous, il y a presque exactement trois ans, la propagation rapide d’un nouveau virus a paralysé la planète. Une grande partie de l’économie a été mise à l’arrêt, et les marchés financiers mondiaux ont connu des perturbations encore jamais vues.

Cette situation a créé un vent de panique chez les entreprises et les ménages, qui s’inquiétaient d’être sans revenu pendant des mois, ainsi que chez les participants au marché qui, eux, faisaient face à des risques financiers en forte augmentation.

Comme on craignait tous une catastrophe économique et financière, il y a eu une ruée vers les liquidités. Ce mouvement de panique a entraîné un grave dysfonctionnement de l’ensemble des marchés financiers ainsi que de sérieuses distorsions. Des participants de tous les horizons en recherche de liquidités vendaient massivement leurs titres d’emprunt1. Les liquidités se sont ainsi presque entièrement évaporées du jour au lendemain dans tous les marchés de titres à revenu fixe2. La Banque a alors réagi avec vigueur et rapidité en mettant en place divers programmes pour rétablir le fonctionnement des marchés.

On est donc intervenu énergiquement dans un éventail de marchés. En effet, on a lancé dix mécanismes d’octroi de liquidités et programmes d’achat d’actifs, dont neuf qui étaient nouveaux pour nous, et ce, en l’espace d’un mois environ.

On s’est penché récemment sur l’efficacité des programmes qu’on a mis en place. On vient, en fait, de publier une étude présentant nos résultats, et une autre va paraître prochainement3.

Je ne vais pas passer en revue aujourd’hui chaque point de notre analyse, mais j’aimerais prendre un peu de temps pour parler de nos deux plus grands programmes : les opérations élargies de prise en pension à plus d’un jour et le Programme d’achat d’obligations du gouvernement du Canada.

Les opérations élargies de prise en pension à plus d’un jour

Les opérations de prise en pension à plus d’un jour sont notre mécanisme phare d’octroi de liquidités, et on a abordé la pandémie avec un mode d’emploi bien étoffé pour ce programme. Je vais expliquer ce mécanisme un peu plus en détail.

Quand les marchés sont relativement stables, on utilise nos opérations régulières de prise en pension à plus d’un jour pour gérer notre bilan. Et quand ils sont tendus – comme dans cette période de crise causée par la pandémie mondiale –, on a recours aux opérations élargies de prise en pension à plus d’un jour pour soutenir le fonctionnement des marchés.

Notre plan privilégié pour pallier le grave dysfonctionnement des marchés consiste principalement à octroyer aux banques des prêts garantis sous forme de prises en pension. Puis, on compte sur les banques pour transmettre ces fonds à l’ensemble du système financier, notamment aux gestionnaires d’actifs institutionnels, qui participent activement aux marchés des pensions et en dépendent4.

Il faut aussi se rappeler que ces banques jouent un rôle actif comme teneurs de marché pour un éventail de titres, dont les obligations du gouvernement du Canada. Alors, en facilitant l’accès au financement, nos opérations élargies de prise en pension à plus d’un jour favorisent la négociation active de ces titres, en plus de soutenir le fonctionnement des marchés de façon plus générale.

En période de crise, on a recours aux opérations élargies de prise en pension à plus d’un jour plus souvent et pour des montants plus importants que nos opérations régulières de ce type. Dans le cas d’une crise majeure touchant l’ensemble des marchés, on peut aussi prolonger la durée de ces prises en pension. Grâce à notre mécanisme élargi de prise en pension à plus d’un jour, on a prêté environ 210 milliards de dollars aux institutions financières entre mars et juin 2020.

On a aussi assoupli les critères d’admissibilité des titres pour s’assurer que ces mesures allaient avoir l’effet voulu. C’était nécessaire en raison de la nature profonde et sans précédent du dysfonctionnement généralisé des marchés au début de la pandémie. Ça a aidé à prévenir certaines des pires conséquences financières de la pandémie.

Les résultats du Programme d’achat d’obligations du gouvernement du Canada

Contrairement à notre programme d’opérations de pension à plus d’un jour, le Programme d’achat d’obligations du gouvernement du Canada était complètement nouveau pour nous en 2020.

Durant la pandémie, on a utilisé ce programme de deux façons distinctes, d’abord comme outil de soutien au fonctionnement des marchés, puis comme outil de politique monétaire. Je vais vous parler surtout de la façon dont on s’en est servi pour améliorer le fonctionnement des marchés.

Pour mettre les choses en contexte, rappelons-nous qu’il est très inhabituel pour les marchés des titres du gouvernement du Canada d’être paralysés en période de tensions financières. Comme dans la plupart des crises de liquidité généralisées à l’ensemble des marchés, durant la crise financière mondiale, on a assisté à une ruée vers les titres de qualité. Les participants au marché se précipitaient pour acheter des obligations du gouvernement. Ces obligations deviennent des placements refuges. Les prix peuvent fluctuer fortement, mais en général, ce marché n’est pas une source de tensions systémiques.

Mais, durant les premiers jours de la pandémie, les tensions financières étaient si fortes et inédites que les investisseurs cherchaient désespérément à vendre même leurs obligations du gouvernement du Canada, sans pour autant trouver d’acheteurs. La liquidité s’était complètement évaporée. C’est pourquoi, au début de la pandémie, la Banque a eu recours au Programme d’achat d’obligations du gouvernement du Canada comme outil pour favoriser le fonctionnement des marchés.

Si on utilise ce programme de nouveau dans l’avenir, on va tenir compte des leçons apprises. Je vais vous parler de certaines de ces leçons.

Premièrement, si notre intention est d’acheter des obligations du gouvernement du Canada strictement pour restaurer le fonctionnement du marché, on va l’indiquer clairement dès le départ pour qu’il n’y ait pas d’ambiguïté. On va faire savoir de façon très limpide que le programme vise à soutenir le fonctionnement des marchés – qu’il n’est pas censé être un outil de politique monétaire. Si notre objectif visant le fonctionnement des marchés n’est pas parfaitement clair, il pourrait y avoir de la spéculation sur les mesures de politique monétaire. C’est particulièrement important dans des périodes où la Banque resserre activement la politique monétaire.

Deuxièmement, l’envergure et la portée du programme seront progressives et reliées aux conditions du marché. Et tout comme nos obligations élargies de prise en pension à plus d’un jour, le programme sera temporaire et se déroulera sur une période relativement courte, déterminée à l’avance.

Troisièmement, étant donné que les achats visent à corriger le dysfonctionnement du marché, on va chercher à acheter des obligations du gouvernement du Canada à des prix qui pourraient être considérés comme dissuasifs. Ça veut dire qu’on ne va pas essayer d’augmenter les prix des obligations et de faire baisser leurs rendements. On va plutôt les acheter à des prix – et en quantités – qui incitent les participants du secteur privé à revenir dans le marché. Cette approche va permettre de réduire l’aléa moral. Et je vais revenir sur l’aléa moral dans un instant.

Enfin, une fois que les conditions se seront améliorées et que le fonctionnement des marchés sera revenu à la normale, on vendra les obligations achetées. En les vendant peu après ce retour à la normale, on sera capables de ramener notre bilan à sa taille d’origine assez rapidement. On réduira ainsi les conséquences involontaires sur la politique monétaire.

Voilà quelques-unes des leçons qu’on tire de l’utilisation de ce programme extraordinaire durant la pandémie. Et je veux être clair : la barre est très haute pour qu’on utilise à nouveau les achats massifs d’obligations du gouvernement du Canada afin de soutenir le fonctionnement des marchés, et ce, pour plusieurs raisons.

Comme je l’ai fait remarquer, on s’attend à ce que nos opérations de prêt d’urgence standard – comme le mécanisme élargi de prise en pension à plus d’un jour – fassent l’affaire pour soulager les problèmes de liquidité du marché obligataire dans la plupart des cas. Quand on prête beaucoup de liquidités aux banques par le biais de prises en pension à plus d’un jour, elles cherchent à en redistribuer une grande partie à l’ensemble du système financier.

Cependant, on pense que ce secteur financier intermédiaire non bancaire est devenu tellement gros que cette rétrocession de prêts ne suffirait pas à elle seule à prévenir un assèchement de la liquidité dans le marché des obligations du gouvernement du Canada. Dans ce cas, la Banque devrait intervenir. C’est ce qui m’amène à parler de notre mécanisme conditionnel de prise en pension à plus d’un jour.

Ce mécanisme nous permet de fournir directement des liquidités à d’autres entités que les contreparties bancaires habituelles de la Banque, comme les gestionnaires d’actifs, y compris les caisses de retraite5. Ce serait un atout inestimable si jamais on faisait face à un événement comme l’épisode de tensions liées aux fonds de pension dans le marché des obligations d’État britanniques à l’automne 2022. Si une situation similaire devait arriver au Canada, ce mécanisme pourrait réduire le besoin pour la Banque d’acheter directement des obligations, puisque les caisses de retraite auraient accès aux liquidités nécessaires pour couvrir les appels de marge.

Cependant, si on était confronté à un autre événement extrême qui causerait un dysfonctionnement majeur dans le marché des obligations du gouvernement du Canada – et pour lequel nos autres outils d’urgence seraient inefficaces – on pourrait bien se trouver dans une situation de dernier recours. Dans ce cas, on pourrait s’en remettre aux achats massifs d’obligations du gouvernement du Canada pour rétablir le fonctionnement des marchés.

Voilà qui fait le tour de l’aspect « fonctionnement des marchés » du Programme d’achat d’obligations du gouvernement du Canada.

Réduire l’aléa moral

Avant de passer à l’aspect « politique monétaire » de notre programme d’achat d’obligations du gouvernement, je veux parler d’un concept important dans le contexte des mesures sans précédent prises par la Banque au cours des trois dernières années : l’aléa moral.

L’aléa moral apparaît quand les investisseurs ou les participants au marché sentent qu’ils peuvent prendre des risques inhabituels sans en subir les conséquences si les choses tournent mal. Autrement dit, parce que la banque centrale est déjà intervenue une fois, ils en viennent à s’attendre à ce qu’elle intervienne encore au moindre signe de tension sur les marchés.

On prend l’aléa moral très au sérieux. Donc si on doit intervenir de nouveau, on va chercher à réduire cet aléa moral, comme on le fait toujours.

Premièrement, on va fournir des liquidités à titre exceptionnel, comme durant la pandémie, seulement dans des situations extrêmes où le système financier au complet fait face à des contraintes de financement.

Deuxièmement, comme je l’ai dit plus tôt, il va falloir intégrer l’application de prix dissuasifs à nos mesures exceptionnelles dans la mesure du possible, pour rendre le programme peu attrayant une fois les conditions financières plus favorables.

Et troisièmement, si ce n’est pas possible d’appliquer des prix dissuasifs, on va s’assurer que nos programmes sont bien structurés, du point de vue de la taille et de la durée. On va fixer d’avance leur durée – disons d’un à trois mois – pour qu’il soit clair que les mesures sont temporaires. Quand le programme va expirer, on pourra décider de le renouveler, de le rajuster ou de l’abandonner.

On songe aussi à recourir à des indicateurs pour déterminer quand mettre fin à certains programmes, possiblement avant leur date d’échéance préétablie. Ces déclencheurs pourraient être basés sur les prix ou l’activité. Ils seraient réglés à un seuil indiquant que le marché visé a recommencé à fonctionner correctement.

Je vais maintenant parler de l’aspect « politique monétaire » de notre Programme d’achat d’obligations du gouvernement du Canada.

Du soutien au fonctionnement des marchés à la politique monétaire

À l’été 2020, après que les marchés se sont rétablis du choc initial, on a annoncé qu’on changeait la fonction du Programme d’achat d’obligations du gouvernement du Canada pour en faire un outil de politique monétaire. C’est ce que la plupart appellent l’assouplissement quantitatif. Le but est d’aider la Banque à atteindre sa cible d’inflation de 2 % quand l’inflation est inférieure à la cible ou négative, et que notre taux directeur est déjà à son minimum absolu.

Comment ça fonctionne? Eh bien, quand notre taux directeur est à sa valeur plancher de 25 points de base, l’assouplissement quantitatif aide à réduire les taux d’intérêt tout le long de la courbe des taux. Ces taux d’intérêt plus bas favorisent les prêts aux ménages et aux entreprises, de même que la croissance économique en général.

Il nous reste du travail à faire pour évaluer en profondeur l’utilisation du Programme d’achat d’obligations du gouvernement du Canada comme outil de politique monétaire durant la pandémie. Ces travaux suivent leur cours, mais on a déjà fait ressortir quelques leçons apprises. Avec le recul, on aurait dû expliquer le changement d’objectif du programme plus clairement au public et aux participants du marché. À l’avenir, en temps de crise, on va éviter ce problème en faisant clairement la distinction entre les achats d’actifs effectués pour soutenir le fonctionnement des marchés et ceux effectués pour des raisons de politique monétaire.

Aussi, le passage du soutien au fonctionnement des marchés à la politique monétaire serait probablement un bon moment pour penser à recalibrer la portée du programme, et modifier sa structure et sa taille.

L’assouplissement quantitatif a été utilisé une seule fois dans notre histoire, durant la pandémie. Dans l’avenir, on pourrait se retrouver à nouveau dans une situation macroéconomique où notre taux directeur est à sa valeur plancher. Dans ces circonstances exceptionnelles, on pourrait avoir besoin de notre gamme élargie d’outils pour fournir plus de détente monétaire.

Aller de l’avant avec le resserrement quantitatif

Ça nous amène à aujourd’hui. Je vais maintenant passer à un sujet qui est plus d’actualité.

Les mesures de politique monétaire qu’on a prises durant la pandémie ont fait monter la part des obligations du gouvernement du Canada dans notre bilan à un maximum d’environ 440 milliards de dollars. On travaille maintenant à normaliser notre bilan avec notre programme de resserrement quantitatif.

Quand on a commencé le resserrement quantitatif il y a à peu près un an, on a dit qu’on avait décidé de baser la mise en œuvre de la politique monétaire sur un système de valeurs plancher – ou un système de réserves abondantes – de façon permanente6. Il est important de comprendre que la quantité de soldes de règlement, ou réserves, nécessaire pour fonctionner dans un système de valeurs plancher dépasse le niveau à long terme demandé par le secteur bancaire7.

Vous vous demandez peut-être quel est alors le niveau idéal. Il n’y a pas encore de réponse définitive. On sait qu’il se trouve nettement en-dessous du niveau actuel d’environ 200 milliards de dollars. Selon nos meilleures estimations, il se situe quelque part entre 20 et 60 milliards de dollars, ou environ 1 à 2 % du produit intérieur brut du Canada. En comparaison, pour la Réserve fédérale américaine, le niveau de réserves à long terme nécessaire a été estimé récemment autour de 10 à 13 % du PIB américain8.

Ça signifie que le resserrement quantitatif arrivera à terme quand nos soldes de règlement auront atteint cette fourchette de 20 à 60 milliards de dollars. À ce moment-là, la Banque va recommencer à acheter des actifs dans le cadre de son processus normal de gestion de bilan9.

Comme une grande part d’incertitude entoure notre estimation du niveau de réserves nécessaire à long terme, on va surveiller les conditions de financement à court terme à mesure que nos soldes de règlement vont baisser. Et selon ce qu’on va observer, on pourrait devoir réviser notre estimation du niveau requis pour mettre en œuvre la politique monétaire dans un système de valeurs plancher.

Par exemple, si on voyait, dans le marché, une pression à la hausse persistante sur les taux des opérations de pension à un jour avant que les soldes de règlement atteignent notre estimation du niveau stable, ça pourrait très bien vouloir dire que notre estimation était trop basse.

Pour ce qui est de savoir quand le resserrement quantitatif va se terminer, ce sera probablement vers la fin de 2024 ou la première moitié de 2025. Cette prévision est basée sur la structure des échéances de notre portefeuille d’obligations actuel et sur l’estimation du profil de notre portefeuille à l’équilibre.

Le moment pourrait changer légèrement à mesure que la taille des autres portions de notre bilan – comme les dépôts du gouvernement et la monnaie en circulation – varient au fil du temps.

Il est important de rappeler qu’on travaille encore à rétablir l’équilibre entre l’offre et la demande. Notre principal outil pour le faire est notre taux directeur, qu’on a augmenté avec force, de 0,25 à 4,50 % en moins d’un an. Mais on doit continuer de normaliser notre bilan pour retirer le soutien de la politique monétaire.

Le resserrement quantitatif est en cours, mais ça va prendre encore du temps avant qu’il arrive à terme.

Conclusion

C’est maintenant le temps de conclure.

La pandémie de COVID-19 a certainement été un événement sans précédent qui a justifié une réponse forte de la part de la Banque. J’insiste encore sur le fait qu’il ne faut pas s’attendre à une intervention de cette nature et de cette ampleur à chaque épisode de turbulence sur les marchés.

Si on a encore besoin d’intervenir, on va faire certaines choses différemment la prochaine fois. Par exemple, on va mettre en place des mesures pour atténuer davantage l’aléa moral.

Après la crise financière mondiale, on a appris beaucoup en examinant attentivement l’efficacité de notre réponse. Ces leçons ont guidé notre réponse à la pandémie, tout comme celles qu’on est en train de tirer vont nous aider à mieux répondre aux crises futures.

Et c’est important de rester souple dans notre réponse en cette période d’incertitude. Rien que dans le dernier mois, on a observé d’importants changements : l’inflation globale a reculé, et l’appétit pour le risque dans les marchés mondiaux a diminué, en partie à cause des tensions accrues dans le secteur bancaire mondial dont j’ai parlé au début.

En même temps, le marché du travail au Canada demeure tendu, ce qui exerce une pression à la hausse sur les prix de nombreux services. On continue de s’attendre à ce que l’inflation mesurée par l’indice des prix à la consommation baisse dans les prochains mois, mais il va falloir que l’inflation fondamentale ralentisse davantage pour qu’elle retourne à la cible de 2 %.

On regarde aussi attentivement les tensions dans le système bancaire mondial, à l’approche de notre Rapport sur la politique monétaire d’avril. On va considérer les conséquences macroéconomiques de cette situation en évolution dans notre prochaine projection. En particulier, on va être attentifs aux effets de débordement possibles dans l’économie réelle, dans la mesure où les conditions financières se resserrent et qu’il y a des effets plus généraux sur la confiance.

Pour conclure, on va continuer à apprendre de nos actions et à améliorer nos cadres d’octroi de liquidités aux marchés pour favoriser le bien-être économique et financier des Canadiens. Et ce sera très important de vous tenir au courant des leçons apprises en cours de route.

Merci.

Je tiens à remercier Grahame Johnson de l’aide qu’il m’a apportée dans la préparation de ce discours.

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Les mesures d’octroi de liquidités aux marchés mises en place durant la pandémie — Le sous-gouverneur Toni Gravelle prononce un discours dans le cadre de la 21e Conférence sur les services financiers de la Banque Nationale.

  1. 1. Alors que de nombreux participants aux marchés cherchaient à se procurer davantage de liquidités par mesure de précaution, plusieurs étaient aussi confrontés à des exigences de marge nettement plus élevées, ce qui a fait monter la demande de liquidités. Les gestionnaires de fonds communs de placement à revenu fixe faisaient face à une hausse des flux de remboursements, laquelle est aussi en partie responsable de la vente des titres d’emprunt. Et les banques étaient aux prises avec une forte augmentation des tirages sur les marges de crédit, leurs sociétés clientes s’en servant par mesure de précaution pendant que l’économie était à l’arrêt.[]
  2. 2. Voir J.-S. Fontaine, C. Garriott, J. Johal, J. Lee et A. Uthemann (2021), COVID-19 Crisis: Lessons Learned for Future Policy Research, document d’analyse du personnel 2021-2, Banque du Canada.[]
  3. 3. Voir G. Johnson (2023), Revue des opérations sur les marchés liées à la COVID-19 menées par la Banque du Canada, document d’analyse du personnel 2023-6, Banque du Canada.[]
  4. 4. Le mécanisme permanent d’octroi de liquidités à plus d’un jour (MPOPJ) est aussi accessible aux membres de Paiements Canada sous réglementation prudentielle fédérale ou provinciale dont la solidité financière ne pose aucune inquiétude à la Banque du Canada. Pour en savoir plus sur MPOPJ et les opérations élargies de prise en pension à plus d’un jour, consulter le Cadre régissant les opérations sur les marchés et l’octroi de liquidités.[]
  5. 5. La Banque du Canada effectue des opérations sur les marchés avec un ensemble désigné de négociants principaux. Pour le mécanisme conditionnel de prise en pension à plus d’un jour, la liste des contreparties admissibles inclut non seulement ces négociants principaux, mais aussi d’autres intermédiaires financiers et gestionnaires d’actifs. Ces deux derniers groupes doivent tout de même remplir certains critères d’admissibilité. []
  6. 6. Voir l’avis aux marchés du 13 avril 2022 de la Banque du Canada, La Banque du Canada donne les modalités du resserrement quantitatif et annonce qu’elle continuera de baser la mise en œuvre de la politique monétaire sur un système de valeurs plancher.[]
  7. 7. T. Gravelle, R. Morrow et J. Wilmer (à paraître), Reviewing Canada’s Monetary Policy Implementation System: Does the Evolving Environment Support Maintaining a Floor System?, document d’analyse du personnel, Banque du Canada.[]
  8. 8. Voir D. Lopez-Salido et A. Vissing-Jorgenson (2022), Reserve Demand and Quantitative Tightening, Conseil des gouverneurs de la Réserve fédérale.[]
  9. 9. C’est donc dire qu’en temps normal, la Banque achète couramment des actifs pour compenser la croissance continue de la monnaie en circulation. Plus particulièrement, une fois le niveau stable atteint, on va recommencer à acheter des obligations du gouvernement du Canada et des bons du Trésor. On va aussi reprendre nos opérations régulières de prise en pension à plus d’un jour.[]