Résultats de l’enquête de l’hiver 2017-2018 | Vol. 14.4 | 8 janvier 2018

Les résultats de l’enquête sur les perspectives des entreprises menée cet hiver montrent que les répondants sont encore confiants : les perspectives de vente restent encourageantes, malgré un certain ralentissement. Parallèlement, les pressions sur la capacité de production et sur le marché du travail sont devenues plus manifestes et confortent les projets d’embauche et d’investissement des entreprises.

Vue d’ensemble

  • Les répondants demeurent optimistes à l’égard de la progression de leurs ventes, mais s’attendent à un certain ralentissement. Après la vigueur généralisée qu’a connue la croissance des ventes, bon nombre d’entreprises escomptent une expansion stable ou un retour à un rythme plus tenable, surtout dans le secteur des biens et en ce qui concerne la demande des clients canadiens.
  • Les entreprises comptent étendre leurs activités pour répondre à la demande soutenue, comme le montre le rebond des intentions d’investissement et d’embauche observé depuis l’enquête de l’automne.
  • En raison de la forte demande et du resserrement du marché du travail, l’indicateur des pressions sur la capacité de production et celui des pénuries de main-d’œuvre se sont inscrits en hausse. Selon les résultats de l’enquête, les ressources inutilisées dans l’économie se concentrent surtout maintenant dans les régions productrices d’énergie.
  • Les entreprises prévoient une accélération de la croissance du prix des intrants due à la hausse des cours des produits de base. La transmission, au prix des extrants, de la variation du prix des intrants et des pressions émergentes sur les salaires reste limitée, du fait des forces de la concurrence. Les attentes d’inflation s’avèrent modestes et sont les mêmes qu’au troisième trimestre.
  • Hormis l’augmentation des taux préférentiels, les conditions du crédit sont demeurées essentiellement inchangées.
  • L’indicateur de l’enquête s’est redressé et est presque revenu à son sommet de l’été, ce qui fait foi de l’optimisme généralisé des répondants.

Activité économique

Dans l’ensemble, les entreprises ont vu s’accélérer la croissance de leurs ventes (Graphique 1), sous l’effet de la récente expansion généralisée de la demande constatée dans toutes les régions. Le solde des opinions concernant la croissance attendue des ventes au cours des douze prochains mois demeure positif (Graphique 2, barres bleues), les répondants faisant état de la robustesse des marchés immobiliers, de la persistance de la demande étrangère et du soutien tangible que représentent les dépenses de relance du gouvernement fédéral. Cependant, le solde des opinions a encore reculé par rapport au sommet atteint cet été, ce qui corrobore l’avis partagé par bon nombre d’entreprises qui estiment que la croissance de leurs ventes reviendra à un niveau plus normal, après la vigueur récente – souvent qualifiée d’insoutenable par les répondants.

Graphique 1 : Croissance passée des ventes

Graphique 2 : Croissance future des ventes

Plusieurs entreprises ont aussi indiqué que la concurrence (en particulier dans le secteur du détail et dans la chaîne d’approvisionnement connexe) ainsi qu’une réglementation plus restrictive assombrissent les perspectives de croissance de leurs ventes. Les indicateurs des ventes futures se sont améliorés par rapport à il y a douze mois (Graphique 2, courbe rouge), mais l’optimisme est moins généralisé que dans les enquêtes antérieures, le redressement de la demande intérieure montrant des signes d’essoufflement.

Globalement, les répondants prévoient une accélération de la croissance des exportations, à la faveur d’une nouvelle amélioration des indicateurs des ventes futures aux clients étrangers. Par ailleurs, les opinions à l’égard de l’économie américaine sont plus positives en raison des réformes fiscales attendues et de la forte demande des consommateurs américains. Bien que les répondants se préoccupent de plus en plus de la renégociation de l’Accord de libre-échange nord-américain et de la montée du protectionnisme en général, la plupart croient que le dynamisme de l’économie aux États Unis et la faiblesse du dollar canadien stimuleront leurs ventes au cours des douze prochains mois.

L’indicateur des intentions d’investissement pour les douze prochains mois a rebondi pour s’établir près des sommets atteints après la récession (Graphique 3). Les projets visant à augmenter les investissements sont généralisés dans l’ensemble des régions et des secteurs. Plusieurs répondants ont dit observer des conditions de la demande favorables et des pressions accrues sur la capacité de production, et comptent, en retour, augmenter leurs capacités. D’autres investissent dans le cadre de projets pluriannuels ou dans une optique de rattrapage à la suite d’une période de sous-investissement. Cela dit, divers facteurs continuent de peser sur les plans des entreprises : les contraintes fiscales et réglementaires sont plus souvent citées, et quelques répondants ont aussi fait mention, entre autres facteurs, des incertitudes entourant la politique commerciale des États-Unis.

Graphique 3 : Intentions d’investissement

L’indicateur des intentions d’embauche s’est inscrit en légère hausse, les projets visant à accroître les effectifs étant généralisés (Graphique 4), tout particulièrement dans le secteur des services. Compte tenu de la forte demande et du plus grand nombre de répondants déclarant des pénuries de main-d’œuvre, les intentions d’embauche se sont surtout améliorées dans le centre du Canada. Parallèlement, les intentions d’augmenter les effectifs ont fléchi dans les Prairies, les entreprises invoquant la sous-utilisation de la main-d’œuvre ou la stabilité des perspectives de vente. Un certain nombre de répondants ont aussi indiqué que l’automatisation et les technologies réduisent leur besoin d’embaucher du personnel.

Graphique 4 : Intentions d’embauche

Pressions sur la capacité de production

La proportion d’entreprises qui auraient quelques difficultés ou de sérieuses difficultés à faire face à une hausse inattendue de la demande a augmenté à nouveau et se situe à son plus haut niveau depuis la récession de 2008-2009 (Graphique 5). Les pressions sur la capacité de production des entreprises sont répandues en Colombie-Britannique, mais elles sont aussi de plus en plus apparentes dans le centre du Canada, ce qui a poussé plusieurs entreprises à faire appel à des ressources flexibles, en se tournant notamment vers la sous-traitance, l’impartition, l’immigration et l’automatisation. Les résultats portent à croire qu’il subsiste une marge de ressources inutilisées dans les régions productrices d’énergie.

Graphique 5 : Pressions sur la capacité de production

Par ailleurs, les pénuries de main-d’œuvre sont de plus en plus courantes. Le solde des opinions concernant l’intensité des pénuries montre encore que la plupart des répondants estiment que les pénuries sont plus prononcées qu’il y a un an (Graphique 6, courbe rouge), même si c’est moins le cas dans les régions productrices d’énergie. Le nombre d’entreprises jugeant que des pénuries de main-d’œuvre limitent leur capacité à répondre à la demande est en hausse (Graphique 6, barres bleues). Les pénuries s’observent surtout dans les domaines des technologies de l’information, du tourisme et de l’hôtellerie, ainsi que de la construction et de l’immobilier, soit des sphères qui ont connu une forte demande.

Graphique 6 : Pénuries de main-d’œuvre

Prix et inflation

Globalement, les entreprises de la plupart des secteurs entrevoient une augmentation du rythme de progression du prix des intrants (Graphique 7). Cette hausse anticipée par les entreprises – particulièrement par celles du secteur des biens – traduit généralement l’idée que le renchérissement des produits de base (des métaux communs à l’énergie) fait monter le coût des matières premières. Comparativement aux enquêtes précédentes, les entreprises, dans l’ensemble, ne sont plus d’avis que la dépréciation du dollar canadien fait gonfler davantage le coût de leurs importations.

Graphique 7 : Prix des intrants

Malgré l’accélération de la croissance du prix des intrants, les répondants prévoient que, globalement, la croissance de leurs prix de vente se poursuivra à la même cadence (Graphique 8). Plusieurs entreprises ont indiqué que l’intensification des pressions concurrentielles les empêche de majorer le prix des extrants. Un certain nombre de répondants ont aussi évoqué des facteurs structurels, tels le cybercommerce et la mondialisation, comme des éléments ayant une incidence sur leurs stratégies de prix. La montée des coûts de la main-d’œuvre (Encadré 1), souvent liée au relèvement prochain du salaire minimum dans plusieurs provinces, et celle d’autres intrants hors main-d’œuvre continuent d’exercer des pressions haussières sur le prix des extrants.

Graphique 8 : Prix des extrants

Les attentes d’inflation, qui s’étaient inscrites en hausse à l’automne, sont restées largement inchangées (Graphique 9). Fondant bien souvent leurs attentes sur la tendance passée de l’inflation, une faible majorité de répondants estime encore que l’inflation s’établira dans la moitié inférieure de la fourchette de maîtrise de l’inflation visée par la Banque. Certaines des entreprises qui prévoient une inflation quelque peu supérieure évoquent pour cela le renchérissement de la main-d’œuvre, et en particulier le relèvement du salaire minimum. Prises dans leur ensemble, toutes les réponses recueillies se situent à l’intérieur de la fourchette visée par la Banque.

Graphique 9 : Attentes d’inflation

Conditions du crédit

Le solde des opinions concernant les conditions du crédit, qui se situe tout juste au-dessous de zéro, donne à penser que les conditions de financement sont demeurées essentiellement inchangées au cours des trois derniers mois (Graphique 10), si l’on exclut la hausse des taux préférentiels1. La plupart des entreprises dans l’ensemble des secteurs et des régions n’ont signalé aucun changement dans les conditions du crédit, et pour la vaste majorité, il est relativement facile d’obtenir du crédit. À la question sur l’incidence des récentes hausses du taux directeur de la Banque du Canada, certains répondants ont indiqué avoir constaté une légère augmentation des coûts d’emprunt, bien que celle-ci n’ait pas eu d’effet significatif sur leurs activités.

Graphique 10 : Conditions du crédit

Indicateur de l’enquête

L’indicateur de l’enquête, qui fait la synthèse des principales réponses recueillies, a presque regagné son sommet de l’été (Graphique 11). La forte croissance anticipée du prix des intrants et les intentions d’investissement, en particulier, ont concouru au redressement de l’indicateur, mais les résultats pour la quasi-totalité des questions de l’enquête dépassent leur moyenne historique et contribuent au niveau positif. L’indicateur de l’enquête montre que l’optimisme des entreprises est généralisé.

Graphique 11 : Indicateur de l’enquête

Encadré 1 : Les pressions salariales ne sont pas encore généralisées, mais elles s’accentuent à cause des hausses du salaire minimum

L’opinion qui prévaut parmi les entreprises est que les pressions sur la capacité de production se sont intensifiées au cours de la dernière année et qu’elles continueront de s’accroître dans les douze mois à venir. Les contraintes liées aux pénuries de main-d’œuvre sont les raisons le plus souvent évoquées, suivies par les capacités physiques insuffisantes. Toutefois, dans la plupart des régions, ces pressions ne se sont pas encore traduites par une généralisation des tensions salariales.

Dans l’enquête sur les perspectives des entreprises, on demande aux participants s’ils s’attendent à ce que dans les douze prochains mois, les hausses de leurs coûts de main-d’œuvre (salaires horaires) soient supérieures, inférieures ou à peu près les mêmes par rapport aux douze mois précédents. Même si le solde des opinions concernant les attentes des entreprises à l’égard de la croissance des salaires est un indicateur imprécis par rapport aux statistiques officielles en matière de rémunération, les données présentent une forte corrélation prospective avec la croissance de l’emploi dans le secteur des entreprises (Graphique 1-A). Cela pourrait être dû au fait que les entreprises formulent leurs prévisions en s’appuyant sur leur évaluation de la vigueur actuelle et future du marché du travail dans son ensemble. Par exemple, si le recrutement est difficile, elles estiment habituellement qu’elles devront revaloriser les salaires pour attirer et retenir les travailleurs. Ainsi, leurs attentes relatives aux salaires intègrent aussi des renseignements sur les conditions générales d’emploi. En outre, les résultats d’une étude publiée par la Banque révèlent que pour établir la rémunération de leurs employés, les gestionnaires canadiens tiennent compte d’abord et avant tout des taux salariaux du marché2.

Les données récentes montrent que les pressions s’exerçant sur la progression des salaires se sont légèrement accentuées. Elles sont répandues en Colombie-Britannique, où les entreprises ont dit éprouver des difficultés à recruter et à retenir des employés. Ces pressions sont attribuées en premier lieu à la concurrence sur le plan du recrutement, et en second lieu aux hausses du salaire minimum. En revanche, l’ordre d’importance de ces deux facteurs est inversé dans le cas des entreprises du centre du Canada. Dans les régions productrices d’énergie, où les attentes relatives à la croissance des salaires sont plus modestes, les répondants mettent l’accent sur le rattrapage salarial après une période de faible activité.

Graphique 1-A : Le solde des opinions concernant les anticipations de croissance des salaires est positif dans toutes les régions, à cause notamment des hausses du salaire minimum

  1. 1. Tout comme dans l’enquête auprès des responsables du crédit, le coût du crédit représente l’écart par rapport aux taux de base plutôt que le niveau des taux. Par conséquent, si l’augmentation du taux d’emprunt ne dépasse pas celle du taux directeur (ce qui signifie que l’écart par rapport aux taux préférentiels ne varie pas), les conditions du crédit mesurées dans l’enquête ne changent pas.[]
  2. 2. D. Amirault, P. Fenton et T. Laflèche (2013), Asking About Wages: Results from the Bank of Canada’s Wage Setting Survey of Canadian Companies, document d’analyse du personnel no 2013-1, Banque du Canada.[]

Le présent bulletin contient une synthèse de l’information qui a été obtenue dans le cadre d’entrevues réalisées par le personnel des bureaux régionaux de la Banque auprès des responsables d’une centaine d’entreprises, choisies en fonction de la composition du produit intérieur brut du secteur canadien des entreprises. Les données de l’enquête de l’hiver 2017-2018 ont été recueillies entre le 14 novembre et le 8 décembre 2017. Le solde des opinions peut varier entre +100 et ‐100. Les chiffres étant arrondis, le total des pourcentages n’est pas nécessairement égal à 100. Des précisions concernant le questionnaire de l’enquête et le contenu informatif des réponses obtenues sont présentées dans le site Web de la Banque du Canada. Les résultats de l’enquête constituent un condensé des opinions exprimées par les répondants et ne reflètent pas forcément le point de vue de la Banque du Canada.

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