Le gouverneur Tiff Macklem discute de l’incidence qu’aurait un conflit commercial sur l’économie et la politique monétaire du Canada. Il décrit également les enjeux sur lesquels la Banque du Canada se concentre dans le cadre du renouvellement de son cadre de politique monétaire.
Le gouverneur Macklem s’adresse à la Chambre de commerce de Mississauga et la Chambre de commerce d’Oakville. Lisez le discours complet.
Les relations commerciales du Canada sont en train de changer
Les échanges commerciaux entre le Canada et les États-Unis ont augmenté au cours des 60 dernières années, chaque pays étant le marché d’exportation numéro un de l’autre. Toutefois, le président Trump a menacé d’imposer d’importants droits de douane sur les exportations canadiennes. Et le gouvernement canadien a déclaré qu’il riposterait. Les conséquences d’un conflit commercial à grande échelle seraient graves.
L’imposition de droits de douane élevés et durables pourrait provoquer un choc d’offre important et une baisse de la demande. Ce serait similaire à ce qui s’est passé au début de la pandémie. Mais si l’économie canadienne est revenue à la normale au sortir de la crise pandémique, il n’y aura pas de rebond cette fois-ci. L’économie finirait par recommencer à croître, mais à partir d’un point de départ plus bas. Il s’agit d’un changement structurel.
Si la menace tarifaire américaine se concrétise, les conséquences économiques seront graves. Un conflit commercial de longue durée ferait chuter les exportations et les investissements. Cela mènerait à des pertes d’emploi et ferait monter l’inflation dans les prochaines années, en plus d’abaisser notre niveau de vie à long terme. »
Comment les droits de douane nuiraient à l’économie
Un conflit commercial nuirait à la croissance et ferait monter l’inflation au Canada. L’effet sur la croissance passerait par les canaux suivants :
- Exportations – Les biens canadiens coûteraient plus cher aux États-Unis, faisant diminuer la demande. Cela ferait chuter les exportations canadiennes, ce qui causerait des pertes d’emploi et une baisse du revenu des ménages.
- Consommation – La baisse du revenu des ménages entraînerait une réduction des dépenses des consommateurs canadiens. Les mesures de rétorsion tarifaires rendraient également de nombreux produits importés plus chers, ce qui se traduirait par une nouvelle baisse de la demande et des dépenses.
- Investissements des entreprises – Confrontées à la hausse des coûts et à la baisse de la demande de la part des consommateurs, les entreprises mettraient de côté leurs projets d’investissement.
Les droits de douane feraient augmenter le coût des biens importés des États-Unis. Le dollar canadien pourrait également se déprécier, ce qui rendrait tous les biens et services importés encore plus chers. La hausse des prix alimenterait directement – et indirectement – l’inflation, qui dépasserait temporairement 2 %.
Le rôle de la politique monétaire durant un conflit commercial
Il n’y a pas grand-chose que les banques centrales peuvent faire lors d’un conflit commercial. Et la politique monétaire ne peut pas répondre simultanément à une croissance plus faible et à une inflation plus élevée. Toutefois, la Banque du Canada peut aider l’économie à s’adapter à un choc commercial.
Si des droits de douane sont imposés, la demande devrait chuter plus rapidement que l’offre. Cela nuirait à la croissance économique. Des taux d’intérêt plus bas pourraient contribuer à soutenir la demande pendant cette période. Mais le soutien que la politique monétaire peut apporter est limité par la nécessité de maîtriser l’inflation.
Les droits de douane entraîneront également une augmentation unique des prix à la consommation. Si les entreprises et les consommateurs commencent à s’attendre à des prix plus élevés, cette augmentation pourrait se transformer en une forte inflation persistante. Des taux d’intérêt plus élevés pourraient contribuer à ce que la hausse de l’inflation reste temporaire.
Notre rôle sera d’équilibrer les risques à la hausse pour l’inflation liés aux coûts plus élevés et les risques à la baisse liés à la demande plus faible. »
Lancement du renouvellement de notre cadre
Depuis 1995, le cadre de politique monétaire de la Banque a consisté à cibler un taux d’inflation de 2 %, soit le point médian d’une fourchette comprise entre 1 et 3 %. Le choc inflationniste postpandémique a mis notre cadre à l’épreuve comme jamais auparavant. Mais la politique monétaire a fonctionné, et l’inflation est revenue à 2 %.
L’économie canadienne est aujourd’hui confrontée à un monde où les chocs seront plus fréquents, et les changements, plus structurels. C’est pourquoi nous étudierons plusieurs questions clés lorsque nous amorcerons l’examen de notre cadre, un processus qui a lieu tous les cinq ans :
- Compte tenu de la multiplication à venir des chocs d’offre, avons-nous besoin d’étoffer nos stratégies pour atteindre la cible d’inflation?
- Comment mesurer au mieux l’inflation sous-jacente dans un contexte de volatilité accrue?
- Comment la politique monétaire interagit avec le marché du logement?
Puisque notre cadre de politique monétaire a bien fonctionné pendant des décennies, la barre pour le changer est placée très haut. Mais l’économie mondiale est en mutation, et la Banque doit être aussi préparée que possible à faire face à ce qui nous attend.
Le gouverneur Macklem répond aux questions des médias après son discours.