Messages clés
Nous élaborons un cadre sectoriel – qui tient compte des impacts de la numérisation, du vieillissement de la population et des politiques climatiques – pour mieux comprendre les sources de la croissance de la productivité totale des facteurs (PTF) au Canada. Nos constatations sont les suivantes :
- La PTF devrait croître de 0,5 % par année en moyenne pendant la décennie 2020, soit une croissance légèrement inférieure à celle de la décennie précédente (0,7 %) et à la moyenne historique (0,6 %) (voir graphique 1).
- Le secteur des services devrait représenter environ deux tiers de la croissance de la PTF pendant les années 2020 et remplacer ainsi le secteur manufacturier comme principal moteur de croissance (graphique 1, barres jaunes).
- La numérisation de l’économie continuera de contribuer à la croissance de la PTF, à hauteur d’un quart de la croissance dans les années 2020 (graphique 2, barres bleues).
- Le vieillissement de la population ne devrait pas peser sur la croissance de la PTF pendant la décennie 2020 car la proportion des jeunes travailleurs et des travailleurs âgés est appelée à diminuer (graphique 2, barres jaunes). Ces deux groupes étant relativement moins productifs que les travailleurs dans la force de l’âge, le recul de leur part respective au sein la population stimule la croissance de la PTF.
- Les politiques climatiques mises en œuvre et annoncées ont un effet positif, mais mineur, parce qu’il est restitué uniquement à travers la réaffectation des ressources entre les secteurs (graphique 2, barres vertes).
Graphique 1 : La croissance de la PTF devrait ralentir pendant la décennie 2020
Graphique 2 : La numérisation et le vieillissement de la population soutiendront la croissance de la PTF durant la décennie 2020
Contexte
La croissance de la productivité du travail est importante à long terme pour l’économie, car elle soutient le niveau de vie ainsi que la croissance de la production potentielle et des salaires réels. Or, le Canada a connu un long déclin de la croissance de la productivité du travail au cours des trois dernières décennies (graphique 3, figure a). Ce ralentissement s’est accentué après la chute des prix des matières premières en 2014, le secteur des ressources naturelles enregistrant une forte baisse des investissements et de l’accumulation du capital1. Les investissements des entreprises devraient rebondir dans les années à venir (Banque du Canada, 2024); cependant ils ne suffiront pas à combler l’écart créé dans l’accumulation du capital depuis 20142. Par conséquent, les gains de productivité du travail devront provenir d’autres sources.
Dans ce contexte, la croissance de la PTF pourrait jouer un rôle crucial dans la stimulation de la croissance de la productivité du travail. Cette dernière, qui connaît une décélération constante depuis les années 1960, s’est redressée dans les années 2010 (graphique 3, figure b)3. Dans les années 2010, la croissance de la PTF expliquait environ 50 % de la croissance de la productivité du travail (contre un peu moins du tiers de 1961 à 1999). Reste à savoir dans quelle mesure ce rebond se maintiendra.
Pour estimer la direction probable que prendra la croissance de la PTF jusqu’en 2030, nous utilisons une approche sectorielle ascendante en prenant en compte trois facteurs structurels majeurs4 :
- La numérisation
- Le vieillissement de la population
- Les politiques climatiques
Notre approche consiste à créer des prévisions sectorielles de la PTF qui incluent les impacts de ces facteurs structurels. Nous nous servons du modèle G-Cubed, un modèle d’équilibre général multisectoriel, pour évaluer les effets des politiques climatiques et prévoir la part de chaque secteur qui permettra d’obtenir la PTF globale à partir des profils sectoriels (voir l’encadré 1)5.
Graphique 3 : La croissance de la productivité canadienne est en baisse
Graphique 3 : La croissance de la productivité canadienne est en baisse
Croissance annuelle moyenne
Sources : Statistique Canada et calculs de la Banque du Canada
Dernières observations : 2023 (figure a) et 2019 (figure b)
Dans le contexte économique actuel, trois facteurs structurels revêtent une importance particulière.
Premièrement, un nombre croissant de travaux indique que la numérisation (par exemple, Anderton, Botelho et Reimers, 2023) et les nouvelles technologies comme l’intelligence artificielle (entre autres, Trammell et Korinek, 2024; Comunale et Manera, 2024) pourraient stimuler la croissance économique. L’accélération de la numérisation pendant la pandémie de COVID-19 pourrait ouvrir d’importantes pistes de croissance au Canada, en particulier dans les domaines où le Canada est à la traîne par rapport aux autres pays avancés6, 7.
Deuxièmement, le fort afflux récent de nouveaux arrivants est en train de modifier la pyramide des âges de la population canadienne. Cette évolution pourrait affecter la productivité, les travailleurs étant plus productifs dans la force de l’âge (voir, par exemple, Maestas, Mullen et Powell, 2023; Vandenbroucke, 2021; Tang et MacLeod, 2006).
Troisièmement, les mesures prises pour atténuer les répercussions des changements climatiques entraîneront des changements notables dans les systèmes de production du Canada (par exemple, une réaffectation des ressources) qui pourraient avoir une incidence sur leur efficacité (Parker, 2023).
Encadré 1 : Présentation du cadre
Encadré 1 : Présentation du cadre
Nous utilisons une approche ascendante pour estimer la croissance générale de la productivité totale des facteurs (PTF) dans le secteur des entreprises. La Figure 1-A illustre les quatre principales étapes de cette approche.
Figure 1-A : Représentation visuelle du cadre sectoriel
Figure 1-A : Représentation visuelle du cadre sectoriel
Nota : « PTF » signifie « productivité totale des facteurs ». La Banque du Canada détient une licence pour utiliser le modèle G-Cubed.
Étape 1 : Élaborer un scénario de référence concernant le niveau de la PTF dans chaque secteur (voir Scénario de référence).
Étape 2 : Intégrer les effets de la numérisation et du vieillissement de la population au scénario de référence sectoriel.
- Étape 2a : Élaborer une projection par secteur pour les variables « intensité numérique » et « vieillissement de la population » (voir Impacts de la numérisation et Impacts du vieillissement de la population).
- Étape 2b : Estimer la relation historique entre la PTF et ces facteurs structurels (voir Annexe).
Combiner les étapes 2a et 2b pour déterminer les impacts de la numérisation et du vieillissement de la population sur le niveau de la PTF dans chaque secteur.
Étape 3 : Utiliser le modèle d’équilibre général multisectoriel G-Cubed (McKibbin et Wilcoxen 2013) pour atteindre deux objectifs :
- Étape 3a : Évaluer l’incidence des politiques climatiques annoncées et mises en œuvre jusqu’à présent sur la réaffectation du capital et du travail au sein des secteurs. Cette réaffectation vient moduler la PTF globale en modifiant la part nominale de chaque secteur. Comme à l’étape 2, il faut intégrer ces changements marginaux au scénario de référence (voir Impacts des politiques climatiques).
- Étape 3 b : Établir une projection de la part nominale de chaque secteur.
Étape 4 : Combiner les profils de la PTF pour chaque secteur, en tenant compte de l’influence des facteurs structurels et de la part nominale respective des secteurs pour calculer une PTF globale avec la méthode d’agrégation de Domar (Domar, 1961)8.
Scénario de référence
Nous avons commencé notre analyse en établissant une prévision du niveau de la PTF par secteur (voir encadré 1, étape 1)9 Nous avons supposé que les tendances sectorielles des dernières décennies se poursuivraient (les hypothèses sont propres à chaque secteur; voir tableau 1). Nous avons ainsi pu créer des profils de référence dans lesquels l’impact des facteurs structurels ne dépasse pas la moyenne historique.
Tableau 1 : Résumé des hypothèses utilisées dans les projections
Élément de la projection | Hypothèse | Précisions* |
---|---|---|
Profils sectoriels de référence pour la productivité totale des facteurs | Croissance moyenne des dernières décennies; période propre à chaque secteur (voir colonne suivante) | Début de la projection : 2020 Période retenue pour le calcul de la moyenne historique Agriculture : 1980-2019 Extraction minière, pétrolière et gazière : 1985-2019 Services du gaz : 1995-2019 Raffinage du pétrole, fabrication de biens durables : 2009-2019 Transports, services : 1990-2019 Fabrication de biens non durables : 2000-2019 Construction : croissance de 0 % Services d’électricité : en lien avec la croissance démographique |
Intensité numérique par secteur | Augmentation annuelle moyenne de l’intensité numérique de 2013 à 2022, par secteur | Début de la projection : 2023 |
Proportion de jeunes travailleurs (29 ans et moins), par secteur | En lien avec la proportion projetée des personnes de 29 ans et moins dans la population en général (voir Annexe) | Début de la projection : 2024 Projections démographiques (Statistique Canada) |
Proportion de travailleurs âgés (50 ans et plus), par secteur | En lien avec la proportion projetée des personnes de 50 ans et plus dans la population en général (voir Annexe) | Début de la projection : 2024 Projections démographiques (Statistique Canada) |
Parts nominales des secteurs | Projections des parts établies avec le modèle G-Cubed (modèle d’équilibre général) | Début de la projection : 2020 |
* Le début de la période de projection diffère d’une composante à l’autre et dépend du dernier point de données disponible (voir tableau A-2).
Dans notre analyse, nous avons utilisé 11 secteurs analogues à ceux du modèle G-Cubed (étape 3 de l’encadré 1)10. Les profils de la PTF des différents secteurs sont hétérogènes, car ils reflètent les environnements pluriels dans lesquels les entreprises exercent leurs activités (graphique 4, figures a et b). Par exemple, le secteur de l’agriculture, de la foresterie et de la pêche est celui qui a connu la plus forte croissance depuis 1961 (graphique 4, figure a). Plusieurs facteurs ont contribué à la croissance de la PTF dans ce secteur en particulier :
- Économies d’échelle attribuables à l’augmentation de la taille des exploitations
- Numérisation des activités agricoles
- Hausse de la demande alimentaire en raison de la croissance démographique
- Réduction de la superficie des terres arables
Compte tenu des prévisions sur la croissance démographique, les gains de la PTF devraient se poursuivre.
À l’inverse, la productivité dans le secteur de l’extraction de pétrole brut et de gaz, a grandement diminué depuis le début des années 1970 (graphique 4, figure b). Cette baisse s’est poursuivie malgré des investissements massifs au cours des années 2000 et au début de la décennie 2010. Apparemment, les investissements réalisés avant la chute des prix des matières premières en 2014 auraient donc servi à augmenter la production plutôt qu’à améliorer l’efficacité des processus d’extraction. De plus, la place dominante qu’occupent les sables bitumineux dans ce secteur peut avoir contribué à en affaiblir la productivité, parce que cette forme d’extraction coûte plus cher et nécessite plus de capital (voir entre autres Loertscher et Pujolas, 2024). Au vu de ces facteurs, nous supposons que la PTF va continuer à baisser dans les années 2020. Une dynamique analogue expliquerait l’évolution de la PTF dans le secteur minier.
Graphique 4 : Les profils de référence pour la PTF varient selon le secteur
Graphique 4 : Les profils de référence pour la PTF varient selon le secteur
Niveau de la PTF, 1961-2030, base 100 de l’indice : 1961
Sources : Statistique Canada et calculs, estimations et projections de la Banque du Canada
Dernières valeurs du graphique : 2030
Dans l’ensemble, le secteur manufacturier a historiquement affiché une croissance constante de la PTF, bien que la branche des biens durables ait été durement touchée par la récession de 2008-2009 (graphique 4, figure a)11. Les services enregistrent également une croissance régulière depuis 1990, quoique plus lente (graphique 4, figure b). La croissance beaucoup plus faible de la PTF dans le raffinage du pétrole témoigne probablement du vieillissement des installations (graphique 4, figure a)12. Toutefois, dans la décennie 2010, la croissance positive de la PTF a repris dans ce secteur et devrait se prolonger. D’autres secteurs, comme la construction (graphique 4, figure b) et le transport (graphique 4, figure a), ont connu une hausse modérée de la PTF ces deux dernières décennies – cette tendance devrait se maintenir dans les années 2020.
Impacts de la numérisation
Nous avons mesuré l’intensité numérique par secteur en divisant les investissements réels des entreprises en ordinateurs et logiciels par l’ensemble des investissements réels13. L’intensité numérique a augmenté de manière notable au Canada depuis les années 1980, bien que l’on constate une croissance inégale d’un secteur à l’autre et d’une période à l’autre (graphique 5). Dans l’ensemble, la numérisation dans les secteurs de la production de biens s’est faite à un rythme plus rapide que dans le secteur des services jusqu’en 2019, même si les secteurs de la production de biens ont tendance à présenter un niveau de numérisation plus faible. La numérisation s’est accélérée dans le secteur des services pendant la pandémie, ce qui témoigne probablement de la propension qu’ont eue les employeurs à recourir aux technologies numériques pour remplacer les travailleurs dans les activités où les contacts sont fréquents avec la clientèle et qui présentent de grandes possibilités d’automatisation14.
Graphique 5 : L’intensité numérique a augmenté plus rapidement pendant la pandémie de COVID 19, en particulier dans le secteur des services
Nous avons établi une projection de l’intensité numérique par secteur en utilisant le taux de croissance annuel moyen des dix dernières années (2013-2022)15. L’intensité numérique moyenne devrait donc augmenter un peu plus rapidement dans le secteur des services que dans celui de la production de biens (graphique 5, barres rouges).
Notre analyse montre que, dans la plupart des secteurs, une numérisation accrue est largement associée à une augmentation de la PTF (voir les résultats de la régression dans l’Annexe). Il en ressort que c’est la productivité du secteur agricole qui a le plus profité de la hausse de l’intensité numérique, le secteur manufacturier arrivant en seconde place. Certains secteurs – dont l’extraction minière, pétrolière et gazière, de même que certaines filières des services (services professionnels et services d’hébergement et de restauration) – affichent une relation négative, mais non significative, entre l’intensité numérique et la PTF. Dans ces cas, la PTF suit une tendance à la baisse depuis les années 1980, ce qui indiquerait que l’intensité numérique peut avoir subi l’influence d’autres facteurs qui n’ont pas été pris en compte.
D’autres études sont arrivées à des résultats semblables. D’après des données à l’échelon des entreprises, la numérisation est corrélée positivement à la PTF et cette relation est plus forte dans le secteur manufacturier que dans le secteur des services (Gal et coll., 2019). Cependant, la numérisation n’est pas avantageuse pour toutes les entreprises : Anderton, Botelho et Reimers (2023), par exemple, ont constaté des impacts négatifs dans environ 10 % des secteurs qu’ils ont étudiés16.
En combinant les projections sectorielles et la relation historique estimée entre l’intensité numérique et la PTF (voir encadré 1, étape 2), nous avons constaté que la numérisation a eu un effet positif sur la croissance de la PTF dans le secteur des entreprises, en particulier pendant les années 1990 (graphique 6). Cela dit, l’effet de l’intensité numérique sur la croissance de la PTF varie sensiblement d’un secteur à l’autre.
Graphique 6 : La numérisation a eu un effet positif sur la croissance de la PTF
La numérisation dans le secteur des services contribue positivement à la croissance de la PTF depuis les années 1970. C’est de ce secteur que devraient provenir la plupart des gains de PTF liés à la numérisation au cours de la décennie 2020, gains qui seront probablement le prolongement des progrès amorcés pendant la pandémie. Le secteur manufacturier a également eu un rôle positif entre 1970 et 2010, mais cet apport sera probablement plus faible à l’avenir. Cette tendance s’explique peut-être par le fait que les investissements prévus dans les technologies numériques visent essentiellement à remplacer et à maintenir les technologies extrêmement innovantes implantées dans les années 1990 et 2000. Pour ce qui est de la catégorie Autre, la dynamique est gouvernée par le secteur de l’extraction minière, pétrolière et gazière, où la numérisation a eu des retombées modestes, voire négatives.
D’après nos résultats, la contribution de la numérisation à la croissance de la PTF devrait augmenter dans les années 2020 par rapport aux deux décennies précédentes (graphique 2 et graphique 6), un phénomène principalement dû à l’intensification de la numérisation pendant la pandémie et aux gains réguliers qui s’en sont suivis dans le secteur des services (lesquels sont amplifiés par la part nominale croissante de ce secteur). Ce sont là des résultats semblables, sur le plan qualitatif, à ceux des études faites aux États-Unis : l’apport des technologies de l’information à la croissance de la PTF s’est affaibli dans le secteur manufacturier et s’est renforcé dans le secteur des services pendant les périodes 1996-2004 et 2005-2019 (Byrne, 2022).
Impacts du vieillissement de la population
Nous avons évalué l’impact du vieillissement dans chaque secteur à partir de deux critères : la proportion des jeunes travailleurs (âgés de 29 ans et moins) et la proportion des travailleurs âgés (50 ans et plus). Dans l’ensemble, la proportion des jeunes travailleurs a rapidement diminué dans les années 1980, au moment où les baby-boomers sont entrés dans la force de l’âge (graphique 7, figure a). Dans les années 2000, les baby-boomers ont commencé à atteindre la cinquantaine, ce qui a donné lieu à une augmentation rapide de la proportion de travailleurs âgés. Pendant ce temps, la proportion des jeunes travailleurs a continué de s’amoindrir, mais moins rapidement qu’à la fin des années 1990. Dans la plupart des secteurs, la composition de la main-d’œuvre par âge a suivi la même évolution d’ensemble.
La proportion respective de chaque groupe devrait diminuer avec le temps (graphique 7, figure b)17. L’afflux de nouveaux arrivants au Canada en 2024 devrait faire légèrement monter la proportion des jeunes travailleurs mais diminuer celle des travailleurs âgés, les nouveaux arrivants étant généralement plus jeunes que la moyenne de la population canadienne. Après 2024, la proportion des jeunes travailleurs devrait poursuivre son lent recul dans la plupart des secteurs, tandis que celle des travailleurs âgés demeurera stable.
En ce qui concerne la relation historique entre la PTF et le vieillissement de la population, nous observons une relation en U inversé, ce qui corrobore les résultats d’autres études (voir les résultats de la régression dans l’Annexe). En d’autres termes, l’augmentation de la proportion des travailleurs jeunes ou âgés a un impact négatif sur la PTF18. Cette relation en U inversé pourrait indiquer que les travailleurs jeunes et âgés sont moins productifs que les travailleurs dans la force de l’âge, comme le suppose la théorie de l’accumulation du capital humain au cours du cycle de vie (p. ex., Ben-Porath, 1967). D’un côté, les jeunes travailleurs, parce qu’ils ont moins d’expérience et de connaissances accumulées, doivent apprendre en travaillant, et de l’autre les travailleurs âgés, proches de la retraite, sont moins enclins à mettre à jour leurs compétences.
Graphique 7 : Les proportions des jeunes travailleurs et des travailleurs âgés devraient diminuer
Graphique 7 : Les proportions des jeunes travailleurs et des travailleurs âgés devraient diminuer
Proportion des travailleurs par groupe d’âge, données annuelles
Sources : Statistique Canada et calculs, estimations et projections de la Banque du Canada
Dernières observations : 2021 (figure a)
Dernières valeurs du graphique : 2030 (figure b)
Comme pour la numérisation, nous avons évalué les effets du vieillissement de la population sur la PTF en combinant les projections sectorielles de la PTF avec l’estimation de la relation historique entre la PTF et le vieillissement de la population (voir encadré 1, étape 2). Nous avons ainsi observé que, si les effets du vieillissement de la population sur la croissance de la PTF ont été importants par le passé, ils devraient être d’une ampleur plus limitée dans la décennie 2020 (graphique 8).
La diminution de la proportion des jeunes travailleurs a contribué positivement à la croissance de la PTF pendant la plupart des décennies analysées, l’impact le plus grand s’étant produit dans les années 1990. Pendant la décennie qui a suivi, l’arrivée de jeunes travailleurs dans les secteurs pétrolier et gazier a pesé sur la croissance de la PTF. Avant les années 2000, la proportion des travailleurs âgés a eu un impact limité. En revanche, l’augmentation de la proportion des travailleurs âgés a été préjudiciable à la croissance de la PTF de 2000 à 2020. En nous appuyant sur les projections démographiques, nous estimons que l’impact le plus fort de ce groupe d’âge sur la PTF est maintenant passé, ce qui crée les conditions propices à un rebond dans les années 2020.
Graphique 8 : Les effets du vieillissement de la population sur la croissance de la PTF devraient s’amoindrir
Impacts des politiques climatiques
Notre analyse se concentre sur l’évaluation des effets des réaffectations sectorielles résultant des politiques annoncées et mises en œuvre pour lutter contre les changements climatiques. Ces politiques climatiques sont intégrées dans le modèle G-Cubed sous la forme de taxes sur l’utilisation des combustibles fossiles, qui sont destinées à favoriser le désengagement des secteurs à fortes émissions19.
Nous avons relevé un faible impact positif (graphique 2, barres vertes) des politiques climatiques dans les projections réalisées pour les années 2020. Les effets positifs sur la PTF du secteur des entreprises résultent de la réaffectation du capital et de la main-d’œuvre des secteurs caractérisés par une faible croissance de la productivité (comme l’extraction minière, pétrolière et gazière) vers des secteurs plus productifs, par exemple les services (hors transports) et la fabrication de biens non durables (graphique 9, figure a). Ces effets sont contrebalancés par des baisses de la part nominale des secteurs à forte croissance de la productivité, comme le raffinage du pétrole, la fabrication de biens durables et l’agriculture. La baisse sensible de la part nominale de ces secteurs n’a pas d’impact significatif, car leurs parts respectives dans le secteur des entreprises sont modestes (graphique 9, figure b). L’impact mineur des politiques climatiques est aussi attribuable au fait que celles-ci ont été adoptées récemment et que la réaffectation des ressources prendra du temps.
Graphique 9 : Les politiques climatiques devraient faire baisser les parts nominales des secteurs à fortes émissions de carbone
Graphique 9 : Les politiques climatiques devraient faire baisser les parts nominales des secteurs à fortes émissions de carbone
Nota : Les parts nominales sectorielles correspondent à la production nominale brute sectorielle divisée par le PIB nominal du secteur des entreprises. La somme de toutes les parts sectorielles dans la figure b est supérieure à 1, car la production nominale brute comprend les intrants intermédiaires.
Sources : Statistique Canada et calculs, estimations et projections de la Banque du Canada
Dernières valeurs du graphique : 2030
Risques climatiques exclus de l’analyse
Les changements climatiques pourraient également avoir des effets directs sur la PTF, mais de manière très incertaine (NGFS, 2020; Bijnens et coll., 2024). Par conséquent, nous n’avons pas intégré ces effets dans nos projections de la PTF. Nous présentons plutôt les risques entourant nos projections, risques que nous classons en deux grandes catégories :
- Risques physiques : effets chroniques et aigus de l’accumulation des émissions de gaz à effet de serre
- Risques de transition : changements dans les politiques, les technologies et les marchés, les économies cherchant à éviter les risques physiques en réduisant les émissions
L’incidence des risques physiques sur la productivité est susceptible de varier d’un secteur à l’autre au Canada. Par exemple, les risques chroniques, comme les cycles saisonniers changeants, la hausse des températures et l’augmentation des niveaux de dioxyde de carbone dans l’atmosphère, peuvent avoir des effets positifs et négatifs sur les rendements agricoles20. De plus, la fréquence et la gravité accrues des phénomènes météorologiques extrêmes pourraient faire baisser la PTF, d’une part en réduisant la résilience des infrastructures, et d’autre part en accentuant la rareté des ressources et en perturbant les chaînes d’approvisionnement.
La transition vers une économie à faibles émissions de carbone pourrait influer sur la PTF de diverses manières. Les investissements dans des mesures d’adaptation, notamment la construction de digues ou de murs de protection contre les crues, peuvent atténuer les risques liés à un réchauffement progressif et aux catastrophes. Toutefois, ces investissements pourraient réduire la PTF à court terme en détournant les capitaux des actifs productifs. Les frictions sur le marché du travail pourraient empêcher la réaffectation des travailleurs des secteurs à fortes émissions, ce qui entraînerait une hausse du chômage structurel et une baisse de la PTF en raison de la dépréciation du capital humain (Ortego-Marti, 2020). A contrario, les politiques climatiques pourraient dynamiser l’innovation dans le secteur des technologies vertes, et les connaissances qui en découleraient pourraient stimuler la PTF globale à long terme (Acemoglu et coll., 2023)21.
Analyse sectorielle
Nous avons calculé les contributions sectorielles à la croissance de la PTF du secteur des entreprises en combinant les impacts de tous les facteurs structurels22. Cette croissance devrait être plus faible pendant les années 2020 par rapport aux décennies précédentes et à la moyenne historique (graphique 1). Le secteur de l’extraction minière, pétrolière et gazière devrait freiner la croissance de la PTF, l’apport du secteur manufacturier va diminuer, alors que le secteur des services devrait compenser cet effet modérateur.
Avant 2000, le secteur manufacturier était le principal contributeur à la croissance de la PTF (graphique 1, barres bleues). Après une décennie difficile marquée par une récession aux États-Unis en 2001 et la récession de 2008-2009, la croissance de la PTF a repris, mais plus timidement23. Un ralentissement qui, pour ce secteur, témoigne à la fois d’une baisse de la croissance moyenne de la PTF et d’une part nominale plus faible. Par exemple, dans les années 2020, la croissance de la PTF dans le secteur de la fabrication de biens durables devrait représenter un tiers de la moyenne observée durant la période 1970-1999, tandis que la part nominale du secteur de la fabrication de biens non durables devrait diminuer de 40 %.
Depuis les années 2000, c’est le secteur des services qui est devenu le moteur de la croissance de la PTF (graphique 1, barres jaunes). Moins touché par les récessions des années 2000, ce secteur devrait le plus profiter de la numérisation (graphique 6). La croissance de la PTF devrait y être environ 2,4 fois supérieure à sa moyenne de la période 1970-1999. Le secteur des services devrait aussi poursuivre son expansion dans les années 2020, et sa part nominale devrait être supérieure d’un tiers à ce qu’elle était au cours de la période 1970-1999.
Le secteur de l’extraction minière, pétrolière et gazière a freiné la croissance de la PTF durant la majeure partie des décennies précédentes et devrait continuer à le faire pendant les années 2020 (graphique 1, barres vertes). Cette évolution s’est produite malgré des investissements massifs dans les années 2000 et au début des années 2010. On a émis l’hypothèse que, compte tenu des prix élevés du pétrole, les investissements ont été orientés vers l’extraction de ressources supplémentaires plutôt que vers l’amélioration de la productivité. En revanche, la chute des cours pétroliers en 2014 a favorisé l’innovation, ce qui a stimulé la croissance de la PTF dans ce secteur à la fin des années 2010.
En ce qui concerne les autres secteurs (graphique 1, barres rouges), l’apport de l’agriculture devrait représenter environ 80 % de la croissance de la PTF dans la décennie 2020.
Conclusion
Nous proposons un outil qui décompose la croissance de la PTF en contributions sectorielles. L’analyse intègre trois facteurs structurels – la numérisation, le vieillissement de la population et les politiques climatiques – et mesure leur impact respectif. Dans l’ensemble, nous nous attendons à ce que la croissance globale de la PTF ralentisse dans les années 2020 et soit inférieure à la moyenne historique ainsi qu’à la moyenne des années 2010.
Notre approche ne vise pas à établir une prévision de la croissance annuelle de la PTF, mais elle est utile pour anticiper sa trajectoire probable à moyen terme et aux fins de l’analyse de scénarios. Outre les risques climatiques évoqués ci-dessus, la projection s’accompagne de nombreux autres risques.
Notre définition de la numérisation constitue un risque positif, parce qu’elle n’intègre pas directement des technologies émergentes telles que l’intelligence artificielle ou les services infonuagiques, deux éléments qui pourraient améliorer la productivité plus que nous ne l’escomptons24. Notons en revanche que la numérisation rapide qui a eu lieu pendant la pandémie de COVID-19 pourrait limiter les progrès à venir si les entreprises ont déjà réalisé une grande partie des transformations numériques qu’elles avaient prévues.
Les changements démographiques induits par les nouveaux arrivants au Canada (y compris les résidents non permanents) pourraient avoir une incidence sur la croissance de la PTF s’ils viennent modifier davantage la pyramide des âges au sein de la population canadienne. Comme il est tributaire de l’évolution des politiques d’immigration, ce risque peut être positif ou négatif. Les politiques qui réduisent davantage l’immigration – par exemple, en abaissant les cibles – pourraient atténuer la baisse attendue de la proportion des travailleurs âgés et freiner la croissance de la PTF25. Des politiques qui feraient grossir ces flux auraient l’effet inverse.
Enfin, dans notre scénario de référence, nous avons supposé que le rythme projeté de croissance de la PTF dans chaque secteur suivrait la moyenne historique. Nous avons aussi tenu pour acquis que la relation historique entre la PTF, la numérisation et le vieillissement de la population demeurerait stable dans le temps. Tout écart par rapport à ces hypothèses influerait sur la trajectoire projetée de la PTF. Par exemple, l’émergence de l’intelligence artificielle pourrait accroître les gains de la PTF par unité d’investissement par rapport à la moyenne prépandémique.
Annexe
Estimation de la relation historique entre la productivité totale des facteurs, la numérisation et le vieillissement de la population
Cette relation est estimée à l’aide d’une régression à effet fixe fondée sur des données sectorielles annuelles :
\(\displaystyle\, TFP_{j,t} \) \(\displaystyle=\, \beta_{j}DI_{j,t-1} \) \(\displaystyle+\, γ_{1,k}S_{j,t}^k \) \(\displaystyle+\, γ_{2,k}S_{j,t}^k D_{2000} \) \(\displaystyle+\, \delta X_{j,t-1} \) \(\displaystyle+\, \alpha_{j} \) \(\displaystyle+\, \theta_{t} \) \(\displaystyle+\, \epsilon_{j,t} \) \(\displaystyle,\) \(\displaystyle (1)\)
où \(\displaystyle\, j\) représente le secteur et \(\displaystyle\, t\) le temps, \(\displaystyle\, \alpha_{j}\) et \(\displaystyle\, \theta_{t}\) sont des effets fixes sectoriels et temporels, et \(\displaystyle\, k\ \epsilon\ (jeunes, âgés)\). \(\displaystyle\, D_{2000}\) est une variable binaire égale à 1 pour l’année 2000 et après, et X désigne la productivité totale des facteurs (PTF) passée, la recherche-développement (R-D), les investissements dans les actifs incorporels et le niveau d’éducation26. Toutes les variables mesurent des niveaux.
Avec Anderton, Botelho et Reimers (2023), nous définissons l’intensité numérique dans un secteur donné par la quantité réelle d’investissements en ordinateurs et logiciels, divisée par les investissements réels totaux comptabilisés dans ce même secteur. Chaque secteur a son propre paramètre d’intensité numérique.
Le vieillissement de la population a été pris en compte au moyen de la proportion \(\displaystyle\, S_{j,t}^{jeunes} \) des jeunes travailleurs (29 ans et moins) dans chaque secteur et de la proportion des travailleurs âgés \(\displaystyle\, S_{j,t}^{âgés} \) (50 ans et plus). La relation estimée du vieillissement de la population est linéaire par segment, comme l’indique l’interaction entre les proportions et \(\displaystyle\, D_{2000}\).
Les paramètres estimés pour l’intensité numérique s’avèrent être essentiellement positifs, même s’ils ne sont pas tous significatifs (tableau A-1). En tenant compte des paramètres estimés pour le secteur manufacturier, nous notons que l’augmentation d’une unité de l’indice de numérisation de ce secteur produit une hausse de 1,49 unité dans l’indice de la PTF. Un test conjoint du caractère significatif de tous les paramètres de l’intensité numérique nous permet de rejeter l’hypothèse nulle selon laquelle ces paramètres sont tous égaux à zéro. La recherche-développement et les investissements dans les actifs incorporels ne jouent pas un rôle important, bien que les coefficients estimés soient significatifs27.
S’agissant du vieillissement de la population, nous constatons que les jeunes travailleurs sont relativement moins productifs que les travailleurs dans la force de l’âge. Par conséquent, une augmentation de la proportion des jeunes travailleurs réduit le niveau de la PTF. De plus, la proportion des travailleurs âgés a un impact négatif flagrant, mais seulement après l’année 2000. Les travailleurs âgés se révèlent tout aussi productifs que l’étaient les travailleurs dans la force de l’âge au cours des décennies précédentes.
Tableau A1 : Coefficients estimés de l’équation (1)
Variable | Coefficient estimé | Écart-type |
---|---|---|
Intensité numérique (IN) | ||
IN – Agriculture | 16,17*** | 1,827 |
IN – Extraction minière, pétrolière et gazière | -2,17 | 2,193 |
IN – Services publics | 0,01 | 0,287 |
IN – Construction | -0,44 | 0,328 |
IN – Fabrication | 1,49*** | 0,293 |
IN – Commerce de gros | 0,64*** | 0,117 |
IN – Commerce de détail | 0,64*** | 0,136 |
IN – Transport | 0,24 | 0,245 |
IN – Finance et assurances | 0,07 | 0,127 |
IN – Autres services | -0,08 | 0,057 |
IN – Information et loisirs | 0,02 | 0,102 |
Vieillissement de la population | ||
Proportion des jeunes travailleurs | -32,22*** | 9,138 |
Proportion des jeunes travailleurs après 2000 | 1,65 | 7,599 |
Proportion des travailleurs âgés | 4,03 | 14,180 |
Proportion des travailleurs âgés après 2000 | -27,28* | 15,360 |
Autres variables | ||
Effets de retardement PTF | 0,82*** | 0,021 |
Effets de retardement Intensité R-D | 0,03* | 0,016 |
Effets de retardement R-D après 2000 | -0,13** | 0,065 |
Effets de retardement Intensité des investissements dans les actifs incorporels | 0,00* | 0,002 |
Effets de retardement Intensité des investissements dans les actifs incorporels après 2000 | 0,02** | 0,007 |
Proportion des diplômés universitaires | -25,40 | 16,731 |
Proportion des diplômés universitaires après 2000 | 11,31 | 8,170 |
Variable binaire (années 1970) | -3,03 | 5,957 |
Variable binaire (années 1980) | -2,09 | 5,849 |
Variable binaire (années 1990) | -6,27 | 5,663 |
Variable binaire (années 2000) | -2,13** | 1,032 |
Constante | 30,29*** | 6,320 |
* Valeur significative au niveau 0,1; ** Valeur significative au niveau 0,05; *** Valeur significative au niveau 0,01
Nota : « PTF » signifie « productivité totale des facteurs »; « R-D » signifie « recherche- développement ».
Tableau A-2 : Sources des données
Variable | Source | Période |
---|---|---|
Productivité totale des facteurs | Statistique Canada, Tableau 36-10-0208-01 : Productivité multifactorielle, valeur ajoutée, facteur capital et facteur travail dans le secteur agrégé des entreprises et ses principaux sous-secteurs, selon des industries. | 1961-2019 |
Production brute nominale et PIB nominal | Statistique Canada, Tableau 36-10-0208-01 : Productivité multifactorielle, valeur ajoutée, facteur capital et facteur travail dans le secteur agrégé des entreprises et ses principaux sous-secteurs, selon des industries. | 1961-2019 |
Investissements dans les actifs corporels | Statistique Canada, Tableau 36-10-0097-01 : Flux et stocks de capital fixe non résidentiel, selon l’industrie et le type d’actif, Canada, provinces et territoires (x 1 000 000) | 1961-2022 |
Investissements dans les actifs incorporels | Statistique Canada, totalisations personnalisées | 1976-2016 |
Proportion de travailleurs par âge et par secteur | Statistique Canada, fichiers de microdonnées à grande diffusion de l’Enquête sur la population active | 1976-2023 |
Proportion des diplômés universitaires par secteur | Statistique Canada, fichiers de microdonnées à grande diffusion de l’Enquête sur la population active | 1976-2023 |
Projections démographiques | Statistique Canada, totalisations personnalisées | 1976-2030 |
Projection de la proportion de travailleurs par âge et par secteur
Si Statistique Canada n’établit pas de projections des travailleurs par groupe d’âge et par secteur, l’organisme en fait de la population totale par âge. Il s’avère que ces deux variables sont fortement corrélées dans le temps (plus de 0,9 en moyenne pour l’ensemble des secteurs).
Nous tirons parti de cette forte corrélation entre la proportion des jeunes travailleurs (travailleurs âgés) par secteur et celle des jeunes (personnes âgées) dans la population totale. En effet, pour chaque secteur, nous avons effectué une régression de la proportion des jeunes travailleurs (travailleurs âgés) \(\displaystyle\, \left(Share_{j,t}^{W,k}\right) \)sur la proportion de jeunes (personnes âgées) dans la population totale \(\displaystyle\, \left(Share_{t}^{Pop,k}\right) \):
\(\displaystyle\, Share_{j,t}^{W,k} \) \(\displaystyle=\, \alpha_{0} \) \(\displaystyle+\, \alpha_{1}Share_{t}^{Pop,k} \) \(\displaystyle+\, \alpha_{2}\alpha_{3}\left(Share_{t}^{Pop,k}\right)^2 \) \(\displaystyle+\, \alpha_{3}\left(Share_{t}^{Pop,k}\right)^3 \) \(\displaystyle+\, \epsilon_{j,t} \) \(\displaystyle,\) \(\displaystyle (2)\)
où \(\displaystyle\, j\) représente le secteur, \(\displaystyle\, t\) le temps et \(\displaystyle\, k\ \epsilon\ (jeunes, âgés)\). Nous avons ensuite réalisé une projection des proportions de travailleurs \(\displaystyle\, Share_{j,t}^{W,k} \) pour la période 2024-2030 en appliquant des paramètres estimés et les projections de Statistique Canada pour \(\displaystyle\, Share_{t}^{Pop,k} \).
Références
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Notes
- 1. La croissance de la productivité du travail peut être vue comme la somme de deux composantes : la contribution de l’accumulation du capital (mesurée par le ratio capital/PIB) et la PTF. Cette dernière mesure la variation de la production qui n’est pas attribuable à des changements (quantitatifs ou qualitatifs) dans les facteurs capital ou travail. La croissance de la PTF est souvent associée aux changements technologiques, aux changements organisationnels ou aux économies d’échelle.[←]
- 2. Si les investissements des entreprises avait crû selon leur rythme historique moyen (croissance trimestrielle de 0,9 %) après 2014, leur niveau aurait été plus élevé d’environ 65 % au quatrième trimestre 2023 qu’il ne l’est actuellement.[←]
- 3. Les données sur lesquelles s’appuie cette analyse ne portent pas sur l’année 2020 et n’intègrent pas les révisions historiques publiées par Statistique Canada le 16 avril 2024. Pour autant, la nouvelle cuvée de données ne remet pas en question les résultats de la présente étude.[←]
- 4. Voir Rosell, Dowsett et Paterson (2023), et Barr, Foltin et Tang (2023) pour une analyse du rôle des facteurs structurels dans la croissance future de la productivité.[←]
- 5. Le modèle G-Cubed a été élargi pour permettre l’évaluation des effets des politiques climatiques (McKibbin et Wilcoxen, 2013). Une version de ce modèle a été mise au point par le McKibbin Software Group pour que la Banque du Canada puisse l’utiliser dans le cadre d’une licence.[←]
- 6. Les domaines où le Canada accuse un retard sont les suivants : communication machine-machine, proportion des entreprises qui achètent des services infonuagiques et intensité des investissements dans les technologies de l’information et de la communication (OCDE, 2024).[←]
- 7. D’aucuns affirment que la numérisation de l’économie pourrait expliquer la baisse de la productivité, parce que les activités numériques sont mal mesurées. Selon les données disponibles actuellement, cette hypothèse ne peut toutefois expliquer la majeure partie du recul à long terme de la productivité au Canada (Bellatin et Houle, 2021) et aux États-Unis (Syverson, 2017).[←]
- 8. Les parts nominales sectorielles (également appelées pondérations de Domar) correspondent à la production brute nominale sectorielle divisée par le PIB nominal du secteur des entreprises.[←]
- 9. Nous avons retenu le niveau de la PTF parce que la croissance annuelle de la PTF fluctue trop pour être projetée.[←]
- 10. Le modèle G-Cubed compte 12 secteurs; toutefois, nous n’avions pas la PTF d’un de ces secteurs – l’extraction du charbon – en raison de l’insuffisance des données. Aux fins de l’analyse, nous avons intégré ce secteur au secteur « extraction minière, à l’exclusion de l’extraction de pétrole brut et de gaz ».[←]
- 11. Si tous les secteurs de fabrication de biens durables ont enregistré une croissance négative de la PTF en 2009, les baisses les plus importantes ont été subies dans les secteurs des engins de transport et de la première transformation des métaux. Cela s’explique très probablement par les conditions difficiles de l’industrie automobile vers 2009 et la baisse générale de la valeur des exportations canadiennes de métaux issus de la première transformation (p. ex., l’acier et l’aluminium).[←]
- 12. La raffinerie Sturgeon, qui a ouvert ses portes fin 2017 (à Redwater en Alberta), est la seule nouvelle installation du genre au Canada depuis 30 ans.[←]
- 13. Nous avons choisi cette définition parce qu’elle permet d’avoir des données sectorielles sur la période la plus longue. Il existe d’autres mesures de l’intensité numérique, fondées par exemple sur les dépenses dans le domaine des technologies de l’information et des communications, sur la taille de la main-d’œuvre présente dans les métiers du numérique et sur les dépenses en services numériques.[←]
- 14. Les emplois dans le secteur des services (par exemple vendeurs dans le commerce de détail, caissiers, secrétaires et adjoints administratifs) étaient les plus vulnérables face à l’automatisation opérée en contexte pandémique, à cause du risque accru de transmission de la COVID-19 et du potentiel d’automatisation de ces emplois (Chernoff et Warman 2023). De plus en plus d’études sont consacrées aux effets de la pandémie sur la numérisation (p. ex., Jaumotte et coll. [2023]; Mollins et Taskin [2023]).[←]
- 15. Cette période comprend notamment la pandémie, au cours de laquelle le Canada a connu une forte augmentation de la numérisation. L’hypothèse d’une période de 10 ans se veut un compromis entre deux points de vue : 1) la pandémie devrait être exclue parce qu’elle a été atypique; 2) la pandémie est devenue la nouvelle normalité.[←]
- 16. Par exemple, la collecte des déchets, les agences de voyages et les voyagistes, ainsi que les secteurs de l’électricité et du gaz.[←]
- 17. Les projections plus détaillées de la proportion de travailleurs par âge et par secteur se trouvent dans l’Annexe.[←]
- 18. Voir, par exemple, Feyrer (2007) pour les pays de l’OCDE, et Tang et MacLeod (2006) pour le Canada.[←]
- 19. Nous avons d’abord simulé les taxes sur le carbone actuellement annoncées (dont les crédits d’impôt à l’investissement annoncés dans le budget fédéral de 2023), puis nous avons intégré les autres mesures nécessaires pour atteindre les cibles d’émissions projetées, mesures qui ont pris pour nous la forme d’une taxe (fictive) supplémentaire sur les émissions. Nous avons ajusté ces taxes pour que les émissions projetées concordent avec les données issues de la modélisation d’Environnement et Changement climatique Canada concernant les politiques climatiques actuellement annoncées et mises en œuvre (gouvernement du Canada, 2022).[←]
- 20. Agriculture et Agroalimentaire Canada propose un portrait complet des impacts potentiels des changements climatiques sur l’agriculture canadienne (gouvernement du Canada, 2020).[←]
- 21. Certaines études confortent l’hypothèse selon laquelle les politiques climatiques favorisent l’innovation verte, mais apportent peu d’éléments probants qui attesteraient que les politiques climatiques auraient une incidence positive sur la croissance globale de la PTF à long terme (Lanoie et coll., 2011; Benatti et coll., 2023; Gugler, Szücs et Wiedenhofer, 2024).[←]
- 22. Gu et Willox (2023), ainsi que Haun et Sargent (2023), proposent d’autres décompositions sectorielles de la productivité du travail par source de croissance. Ils font également une comparaison de la croissance de la productivité au Canada et aux États-Unis.[←]
- 23. Notamment, la croissance de la PTF dans le secteur de la fabrication des biens durables a connu un important rebond au début des années 2010, après la récession de 2009. Cependant, la croissance moyenne s’est située en dessous de la moyenne à long terme au cours de la décennie suivante.[←]
- 24. Certaines de ces activités sont prises en compte dans notre analyse, à travers les investissements dans les ordinateurs et les logiciels.[←]
- 25. Cela s’explique par le fait que les nouveaux arrivants ont tendance à être plus jeunes que la population canadienne.[←]
- 26. Les investissements dans l’exploration minière sont combinés aux dépenses de recherche-développement, car seul le secteur de l’exploitation minière, pétrolière et gazière a réalisé des investissements de cette nature.[←]
- 27. Nous n’intégrons pas la recherche-développement ni les investissements dans les actifs incorporels (p. ex., la conception architecturale et technique, le capital organisationnel, le capital humain propre à l’entreprise et la publicité) dans notre mesure de l’intensité numérique parce que ces éléments ne contribuent pas directement à la numérisation, ou qu’ils pourraient éventuellement le faire, mais avec un décalage notable.[←]
Remerciements
Nous remercions Alexander Ueberfeldt et Craig Johnston pour leurs commentaires utiles et leur soutien à la rédaction. Nous remercions également Rachit Lumb et Mallory Long pour l’excellente assistance à la recherche. Enfin, nous remercions Colette Stoeber et Meredith Fraser-Ohman pour leur révision sans faille, ainsi que Judith Lefebvre et Eric Bannem pour le travail de traduction.
Avis d’exonération de responsabilité
Les notes analytiques du personnel de la Banque du Canada sont de brefs articles qui portent sur des sujets liés à la situation économique et financière du moment. Rédigées en toute indépendance du Conseil de direction, elles peuvent étayer ou remettre en question les orientations et idées établies. Les opinions exprimées dans le présent document sont celles des auteurs uniquement. Par conséquent, elles ne traduisent pas forcément le point de vue officiel de la Banque du Canada et n’engagent aucunement cette dernière.
DOI : https://doi.org/10.34989/san-2024-12