Vue d’ensemble
La présente note analytique contient l’évaluation de 2024, par le personnel de la Banque du Canada, de la production potentielle au pays. Entre 2023 et 2027, la croissance annuelle de la production potentielle devrait se situer autour de 2 % en moyenne. Par rapport à l’évaluation d’avril 2023 (Champagne, Hajzler et autres, 2023), le niveau de la production potentielle à court terme a été revu à la hausse, mais il devrait demeurer à peu près le même d’ici 2026 (tableau 1).
Cette révision reflète principalement la croissance démographique plus forte que prévu, sous l’effet d’un afflux de nouveaux arrivants au Canada depuis la deuxième moitié de 2022. La croissance de la production potentielle en 2023 reste relativement inchangée, et ce, parce que la contribution plus importante qu’escompté de la croissance démographique a été compensée par la faiblesse de la productivité tendancielle du travail. Pour la période 2024-2026, les investissements et la productivité totale des facteurs (PTF) tendancielle devraient être moins élevés. La croissance démographique devrait également être plus faible en 2025 et en 2026, au regard des mesures récemment annoncées par le gouvernement fédéral, qui visent à réduire les arrivées de résidents non permanents. Nous examinons des scénarios de risques à la hausse et à la baisse, et nous établissons une fourchette autour de nos estimations de référence, en mettant l’accent sur l’incertitude entourant la croissance démographique et les investissements des entreprises.
Tableau 1 : Projections de la production potentielle par rapport aux estimations d’avril 2023
Production potentielle | Révisions du niveau de la production potentielle | ||
---|---|---|---|
Croissance annuelle | Fourchette de croissance | ||
2023 | 2,3 (2,3) | (1,4–3,2) | 0,8 |
2024 | 2,5 (2,1) | 2,1–2,8 | 1,2 |
2025 | 1,7 (2,1) | 1,1–2,4 | 0,8 |
2026 | 1,5 (2,2) | 0,9–2,2 | 0,1 |
2027 | 1,7 | 1,1–2,4 | —— |
Nota : Les taux estimés en avril 2023 sont indiqués entre parenthèses. La fourchette de la croissance de la production potentielle correspond à l’étendue méthodologique déduite des scénarios de risque présentés dans le tableau 2.
Révisions de la production potentielle
Par rapport à l’évaluation d’avril 2023, la production potentielle est 0,8 % plus élevée en 2023 et 1,2 % plus élevée en 2024 (tableau 1, colonne 3). Ces révisions à la hausse reflètent surtout la progression plus vive que prévu de la taille de la population en âge de travailler, portée par un afflux de nouveaux arrivants au Canada, qui alimente facteur travail tendanciel (FTT). Les révisions apportées par Statistique Canada aux données historiques du produit intérieur brut (PIB) expliquent également les estimations plus élevées de la production potentielle en 2023, quoique dans une moindre mesure.
Révisions des données historiques
imprévue de la croissance démographique est le principal facteur qui explique notre révision de la production potentielle par rapport à l’évaluation d’avril 2023. En 2023, le Canada a connu un afflux record de résidents permanents et de résidents non permanents, incluant les titulaires de permis de travail temporaire et de permis d’études. Ces flux ont grandement contribué à la progression de la population en âge de travailler1. La majorité des nouveaux arrivants étaient des résidents non permanents. Le nombre net de nouveaux résidents non permanents a dépassé 800 000 en 2023, ce qui excède de beaucoup les flux observés en 2022 et les attentes établies dans l’évaluation de 2023. La taille de la population canadienne à la fin de 2023 était environ 2,3 % plus élevée qu’anticipé au moment de l’évaluation de l’année dernière2.
La croissance de la population, en particulier celle de la population en âge de travailler, a une incidence directe sur le FTT. De plus, les taux d’emploi des nouveaux arrivants sont généralement plus élevés que la moyenne globale (Champagne, Ens et autres, 2023). En même temps, la hausse du FTT réduit la proportion de capital par travailleur, ce qui pèse sur la productivité du travail. Les entreprises seront donc poussées à investir en machines et en matériel pour suivre la progression de la population active et de la demande globale, mais il faudra du temps pour que le stock de capital rattrape le facteur travail. L’effet net des révisions démographiques en 2023 est une hausse de 1,7 % de la croissance du FTT, qui est partiellement compensée par une baisse de 1,3 % de la productivité tendancielle du travail. Cela équivaut à une augmentation de la croissance de la production potentielle de 0,4 point de pourcentage en 2023 (graphique 1).
Les changements touchant à la production potentielle depuis l’évaluation de 2023 tiennent aussi compte des nouvelles données publiées par Statistique Canada :
- Les mises à jour des comptes nationaux comprennent des révisions des données historiques concernant le PIB et les investissements.
- La principale mise à jour des données sur les flux et les stocks concerne les estimations de 2022 du stock global de capital.
Ensemble, ces mises à jour ont influé sur les estimations historiques de la PTF et de la croissance de la PTF tendancielle, ce qui se traduit par une croissance potentielle plus élevée en 2021-2022, mais plus basse en 2023 (graphique 1, barres vertes)3. Enfin, dans notre modèle de cohortes, les mises à jour de données liées au marché du travail ont eu peu d’incidence sur la croissance estimée du FTT et de la production potentielle4.
Graphique 1 : La croissance de la production potentielle a été revue à la hausse pour 2024 et à la baisse pour 2025-2026, surtout en raison de l’évolution attendue de la dynamique de croissance démographique
Révisions des projections
Au cours de la période de projection, on s’attend à ce que la taille de la population soit plus importante qu’anticipé au moment de l’évaluation de 2023. C’est le principal facteur à l’origine des révisions à la hausse de la production potentielle en 2024. Toutefois, on s’attend à ce que la croissance démographique ralentisse, et ce, en raison de l’engagement récemment pris par le gouvernement fédéral de réduire la d’ici environ trois ans. Comme cela fera diminuer la contribution de l’évolution démographique d’ici la fin de la période de projection, nous avons revu à la baisse la croissance potentielle (graphique 1).
La croissance de la productivité du travail a été particulièrement faible depuis le début de la pandémie de COVID-19, et on s’attend à ce que cette faiblesse persiste plus longtemps qu’envisagé auparavant. La timidité de la croissance de la productivité durant la période de projection reflète à la fois l’approfondissement du capital plus lent que prévu et la faible croissance de la PTF.
Bien que la faiblesse de la croissance de la PTF s’explique en partie par des facteurs temporaires qui persistent depuis la reprise économique postpandémique, les données laissent croire que des facteurs structuraux à long terme sont aussi à l’œuvre. Nous avons élaboré une approche sectorielle ascendante afin de mieux comprendre les sources de la croissance dans le secteur des entreprises (encadré 1). Nous appuyant sur cette analyse pour comprendre la faiblesse récente de la croissance globale de la PTF et l’extrapoler pour les années à venir, nous avons abaissé la PTF tendancielle postulée à long terme (graphique 1, barres rouges). Ce changement correspond à une diminution de la croissance de la production potentielle d’à peu près 0,2 point de pourcentage en moyenne en 2024-2026.
Dynamique de la croissance de la production potentielle
Après une chute marquée durant la pandémie, la croissance de la production potentielle s’est établie en moyenne à un peu plus de 2 % en 2021-2022. Elle s’est raffermie en 2023, et elle devrait rester vigoureuse en 2024 avant de diminuer progressivement durant la période de projection. La solide croissance en 2023 et en 2024 est attribuable à la forte croissance du FTT, laquelle devrait ralentir jusqu’en 2027 (graphique 2, barres bleues)5. Cette dynamique découle presque entièrement de l’évolution démographique attribuable à l’immigration et aux objectifs récemment annoncés pour 2027 à propos des résidents non permanents.
Graphique 2 : La croissance de la production potentielle devrait reculer durant la période de projection
Productivité tendancielle du travail
La croissance de la productivité tendancielle du travail a été négative en 2023. Elle devrait demeurer négative en 2024, alors que la forte croissance démographique continuera de faire augmenter le FTT et de réduire le capital par (graphique 2, barres jaunes). Elle devrait rebondir en 2025, sous l’effet d’un approfondissement du capital découlant d’une reprise des investissements des entreprises combinée à un ralentissement de la croissance démographique6. La croissance de la PTF tendancielle demeurera relativement stable, autour de 0,5 % par année, au cours de la période visée. L’encadré 1 présente une analyse plus poussée des moteurs de la PTF, qui est elle-même un important moteur de la productivité tendancielle du travail.
Encadré 1 : Productivité totale des facteurs
Encadré 1 : Productivité totale des facteurs
Auteurs : Dany Brouillette et Tessa Devakos
La productivité totale des facteurs (PTF) est un moteur important de la productivité du travail, mais elle est difficilement prévisible. Dans des évaluations précédentes de la production potentielle, on postulait que la croissance de la PTF convergerait progressivement vers son taux historique moyen à long terme. Ces dernières années, le taux de croissance de la PTF a eu tendance à tomber sous cette moyenne historique. Cette année, le personnel de la Banque du Canada a établi une approche sectorielle ascendante pour mieux comprendre les sources de la faiblesse de la croissance de la PTF dans le secteur des entreprises7. L’analyse met également en évidence le rôle joué par des facteurs structurels tels que la numérisation, le vieillissement de la population et les changements climatiques8, 9.
Cette décennie, la croissance de la PTF globale devrait être inférieure à sa moyenne historique d’environ 0,1 point de pourcentage (graphique 1-A). Cela s’expliquerait surtout par une contribution moindre des secteurs minier, pétrolier et gazier, en partie compensée par celle du secteur des services. On s’attend à ce que la croissance de la PTF décélère dans le secteur manufacturier, compte tenu de la croissance plus faible du secteur des biens durables. En effet, celui-ci devrait être moins productif qu’au début des années 2010, lorsqu’il avait fortement rebondi après la crise financière mondiale de 2008-2009. Dans le secteur pétrolier et gazier, la croissance de la PTF devrait recommencer à se contracter, après la brève remontée survenue à la fin des années 201010.
Graphique 1-A : La croissance de la productivité totale des facteurs devrait baisser
Pour ce qui est de la contribution des facteurs structurels :
- La numérisation (soit les investissements en matériel et logiciels informatiques) devrait continuer de soutenir la croissance de la PTF à moyen terme, à la suite du coup de fouet observé lors de la pandémie (graphique 1-B)11.
- Le vieillissement de la population ne devrait pas peser autant sur la croissance de la PTF à l’avenir. Cela s’explique par la diminution attendue de la part des jeunes et des travailleurs âgés, deux groupes qui sont généralement relativement moins productifs que les travailleurs dans la force de l’âge12.
- L’afflux de nouveaux arrivants devrait aussi contribuer à compenser positivement les effets du vieillissement de la population, du fait que les nouveaux arrivants sont généralement plus jeunes que le reste de la population
- Les effets des politiques de lutte contre les changements climatiques, reflétés par la réaffectation des ressources entre les secteurs, sont positifs mais très faibles, car ces politiques n’ont été mises en œuvre qu’au cours des dernières années13.
Graphique 1-B : Les facteurs structurels ont un effet marqué sur la productivité totale des facteurs
Facteur travail tendanciel
La contribution de la croissance du FTT à la croissance de la production potentielle devrait être de 3,0 points de pourcentage en 2024, avant de diminuer pour s’établir en moyenne à 0,7 point de pourcentage entre 2025 et 2027. Cela reflète principalement les flux exceptionnellement élevés de nouveaux arrivants, comme nous l’avons vu à la section précédente. L’augmentation récente des arrivées de résidents non permanents a aidé à compenser les tendances à long terme liées au vieillissement de la population et à la diminution des taux d’emploi tendanciels qui pèsent sur le FTT.
Nous supposons que la croissance démographique restera vigoureuse en 2024, puis ralentira jusqu’en 2027 (graphique 3). La croissance démographique a une incidence majeure sur le FTT. Elle l’a fait augmenter de 3,1 points de pourcentage en 2023 et devrait faire de même en 2024. On s’attend à ce que cette contribution diminue pour s’établir à 0,9 point de pourcentage d’ici 2027, une fois que les nouvelles mesures du gouvernement fédéral en matière d’immigration entreront en vigueur. L’expansion démographique demeurera le principal moteur de la croissance du FTT tout au long de la période visée.
Le taux d’emploi tendanciel et le nombre tendanciel moyen d’heures travaillées ont moins d’incidence sur la croissance du FTT. La contribution du taux d’emploi tendanciel devrait rester faible dans les années à venir, conformément à la tendance plus générale observée avant la pandémie. Le vieillissement de la population, qui s’accompagne d’un recul du taux d’activité global, a contribué à une baisse graduelle du taux d’emploi tendanciel et du nombre tendanciel moyen d’heures travaillées.
Graphique 3 : Les changements démographiques influent sur la croissance du facteur travail tendanciel
Incertitude entourant le scénario de référence
Une bonne partie des composantes de la production potentielle ne peuvent être observées directement et sont difficiles à prévoir, ce qui génère de l’incertitude quant aux perspectives. Dans cette section, nous examinons les principaux risques qui pèsent sur ces dernières.
Croissance démographique
La croissance démographique a récemment été stimulée en grande partie par les flux de résidents non permanents, lesquels sont difficiles à prévoir. En mars 2024, le gouvernement fédéral a annoncé pour la première fois une cible en ce qui a trait à la proportion de résidents non permanents au sein de la population, qu’il souhaite atteindre d’ici environ trois ans.
L’effet cumulatif qu’aura cette nouvelle cible sur la croissance démographique au cours des trois prochaines années est relativement clair. Le solde net des résidents non permanents devra être négatif pour que la cible soit atteinte, mais il est difficile de prévoir avec certitude quand cela se produira. Plus précisément, la croissance démographique pourrait varier grandement d’une année à l’autre, selon la rapidité ou la lenteur des ajustements nécessaires des flux de résidents non permanents. De plus, le gouvernement fédéral publie une fourchette cible pour les nouveaux résidents permanents dans le cadre du (dont les limites inférieures et supérieures varient entre 30 000 et 50 000 de part et d’autre de la cible). Le scénario de référence pour la croissance démographique repose sur les niveaux des cibles d’immigration, et les risques sont circonscrits en fonction de la fourchette cible du gouvernement.
Par conséquent, en plus de notre scénario de référence, nous utilisons des scénarios de croissance démographique plus élevée ou plus faible, et ce, afin de montrer les risques à la hausse et à la baisse qui planent sur nos perspectives de production potentielle pour la période de 2024 à 2027 :
- Le scénario de croissance élevée ajoute 1,0 point de pourcentage par année aux projections d’augmentation de la population.
- Le scénario de croissance faible retranche 0,4 point de pourcentage par année des projections d’augmentation de la population.
La pondération plus importante appliquée dans le scénario de croissance élevée vise à rendre compte des nombreuses voies offertes aux nouveaux résidents non permanents dans le cadre du Programme de mobilité internationale du Canada, qui pourraient être difficiles à restreindre à court terme. On compte notamment parmi ces voies celles offertes aux demandeurs d’asile et aux conjoints de travailleurs qualifiés. Pour la période de projection, ces scénarios reflètent surtout les différentes hypothèses concernant l’évolution des flux nets de résidents non permanents. Le risque que les flux de résidents permanents soient inférieurs ou supérieurs aux cibles annuelles est aussi à prendre en compte, mais dans une moindre mesure.
Comparativement au scénario de référence :
- Le scénario de croissance élevée ajoute de 0,2 à 0,5 point de pourcentage à la croissance de la production potentielle pendant la période 2024-2026 (tableau 2).
- Le scénario de croissance faible retranche de 0,1 à 0,2 point de pourcentage à la croissance de la production potentielle pendant la période 2024-2026.
Tableau 2 : Comparaison des risques liés à la production potentielle
Risque | Scénario | 2024 | 2025 | 2026 | 2027 |
---|---|---|---|---|---|
Croissance démographique | Moins élevée | -0,1 | -0,2 | -0,2 | -0,2 |
Plus élevée | 0,2 | 0,5 | 0,5 | 0,5 | |
Croissance des investissements | Moins élevée | -0,1 | -0,1 | -0,1 | -0,1 |
Plus élevée | 0,1 | 0,2 | 0,2 | 0,2 | |
Croissance de la productivité totale des facteurs | Moins élevée | -0,2 | -0,3 | -0,3 | -0,3 |
Incidence sur la croissance de la production potentielle (fourchette) | -0,4–0,3 | -0,6–0,7 | -0,6–0,7 | -0,6–0,7 |
L’encadré 2 fournit une analyse plus détaillée de l’incidence du nombre élevé de résidents non permanents sur le marché du travail.
Encadré 2 : Immigration et salaires réels
Encadré 2 : Immigration et salaires réels
Auteurs : Julien Champagne, Mallory Long et Antoine Poulin-Moore
Entre les mois d’octobre 2022 et 2023, la population canadienne a crû à un rythme jamais vu en 65 ans, affichant une progression de 3,2 %, soit environ 1,3 million de personnes, en raison d’une forte migration internationale (graphique 2-A).
Parallèlement, la composition des nouveaux arrivants au Canada a changé considérablement depuis 2015. Historiquement, la croissance de ce segment de la population était surtout attribuable aux résidents permanents14. Les résidents non permanents consistaient surtout en des travailleurs étrangers temporaires munis de permis de travail à court terme; par conséquent, leur contribution à la croissance démographique était négligeable. Cette composition relativement stable a commencé à évoluer en 2015, juste après qu’a été lancé le Programme de mobilité internationale. En 2019, environ le tiers de la contribution des immigrants à la croissance démographique annuelle provenait des résidents non permanents. Cette proportion a récemment doublé, et les résidents non permanents représentaient les deux tiers de la contribution des immigrants de la croissance démographique en octobre 2023.
Graphique 2-A : La croissance démographique canadienne a été stimulée par les résidents non permanents
En utilisant les données de l’Enquête sur la population active, nous étudions comment ces flux modifient les caractéristiques démographiques de la population immigrée15. Nous examinons également les conséquences que les tendances en matière d’emploi par secteur et les revenus relatifs des nouveaux arrivants pourraient avoir pour la productivité du travail16.
La première tendance frappante est la diminution survenue au cours des quatre dernières années de la proportion des résidents non permanents qui occupent une profession spécialisée, telle que définie par la Classification nationale des professions (tableau 2-A)17. L’âge moyen des résidents non permanents ayant un emploi a aussi baissé pendant cette période. Par contraste, l’évolution de ces caractéristiques a été généralement plus stable, voire positive pour ce qui est des résidents permanents (tableau 2-A, deux premières rangées).
La détérioration du niveau moyen de compétences des résidents non permanents coïncide aussi avec des salaires moyens plus faibles. Dans sa dernière colonne, le tableau 2-A récapitule les salaires horaires réels observés en 2019 et en 2023 des travailleurs nés au Canada, des résidents non permanents, et des résidents permanents qui ont immigré soit dans les 10 années qui précèdent, soit il y a plus longtemps. Alors que les salaires des premiers immigrants sont plus proches de ceux des travailleurs nés au Canada et ont augmenté au fil du temps, ceux des résidents non permanents sont beaucoup plus bas et ont chuté au cours de cette période. Puisque les salaires horaires réels sont généralement corrélés à la productivité du travail, cet indice permet de supposer que les résidents non permanents exercent des professions moins productives.
Tableau 2-A : Les caractéristiques démographiques de la population immigrée ont évolué récemment
Année d’immigration | Âge | Compétences | Salaire réel | |||
---|---|---|---|---|---|---|
2019 | 2023 | 2019 | 2023 | 2019 | 2023 | |
Résidents permanents immigrés depuis 1 à 10 ans | 36,6 | 35,9 | 62,9 % | 68,8 % | 19,61 $ | 21,42 $ |
Résidents permanents immigrés depuis plus de 10 ans | 47,2 | 47,6 | 70,2 % | 73,5 % | 23,22 $ | 24,14 $ |
Travailleurs nés au Canada | 41,0 | 41,1 | 69,5 % | 72,1 % | 23,74 $ | 24,43 $ |
Résidents non permanents | 34,0 | 32,7 | 62,7 % | 61,7 % | 19,97 $ | 19,09 $ |
Nota : Ce tableau est basé sur des microdonnées tirées de l’Enquête sur la population active. Il présente les moyennes de caractéristiques du marché du travail associées à des personnes occupant un emploi, selon leur année et groupe d’immigration. La mesure Salaire réel reflète le salaire horaire nominal, qui correspond au salaire hebdomadaire moyen divisé par le nombre effectif d’heures travaillées par semaine, corrigé en fonction de l’indice des prix à la consommation. La variable Compétences représente la part des emplois spécialisés selon la Classification nationale des professions.
Ce constat est aussi corroboré par l’examen de la distribution des résidents non permanents dans les différents secteurs. Si l’augmentation de leur part a été générale, elle a également été disproportionnée dans certains secteurs où la productivité est plus faible, comme l’hébergement et la restauration, le commerce de détail, ainsi que les services aux entreprises, bâtiments et autres services de soutien (graphique 2-B).
Graphique 2-B : La redistribution intersectorielle de la main-d’œuvre immigrée a été importante
Croissance des investissements
Les perspectives de croissance des investissements au Canada sont incertaines. Du côté des scénarios plus optimistes, les investissements des entreprises ont le potentiel d’augmenter. L’expansion marquée de la population active, y compris celle de la population en âge de travailler, poussée par les flux exceptionnels de résidents non permanents, offre aux entreprises de nouvelles occasions de hausser leurs investissements en capital pour mieux tirer parti de cet accroissement de la main-d’œuvre. Notons aussi les mesures incitatives récentes visant à favoriser les investissements qui soutiennent la transition vers une économie verte. De plus, la volonté des gouvernements de mettre en place des mesures incitatives semblables à celles offertes dans d’autres pays pourrait attirer des investissements supplémentaires dans la transition verte (encadré 3).
Du côté des scénarios plus pessimistes, la démondialisation et les perturbations du commerce international demeurent une source de préoccupation. L’incertitude causée par de tels événements peut freiner les investissements des entreprises. Dans l’ensemble, ces risques sont comparables à ceux décrits dans l’évaluation de la production potentielle effectuée l’an passé (Champagne, Hajzler et autres, 2023). L’incertitude liée à la conception et à la mise en œuvre des politiques climatiques pourrait aussi nuire aux investissements des entreprises à moyen terme (encadré 3).
Nous estimons que les risques liés aux investissements sont globalement symétriques, et que leur incidence sur la croissance de la production potentielle devrait se situer entre 0,1 et 0,2 point de pourcentage annuellement (tableau 2).
Encadré 3 : Transition climatique et investissements
Encadré 3 : Transition climatique et investissements
Auteurs : Craig Johnston, Raven Wheesk et Tatjana Dahlhaus
La transition vers une économie à faibles émissions de carbone est un moteur important des changements structurels touchant les différents secteurs, qui oblige les entreprises à réévaluer son incidence sur chacun de leurs investissements. Il est toutefois difficile de prévoir l’effet global de la transition sur les investissements des entreprises, du fait des nombreux canaux concurrents. Nous analysons ci-après les principaux facteurs en jeu sur le plan qualitatif.
Les politiques
Les politiques climatiques peuvent avoir une incidence sur le coût du capital et la rentabilité, en influençant les décisions d’investissement de manière différente selon les secteurs. Par exemple :
- La tarification du carbone accroît le coût des activités à forte intensité de carbone – ce qui incite les entreprises à investir dans des technologies et des pratiques plus propres afin de réduire leurs émissions – et décourage les investissements dans les secteurs à fortes émissions, qu’il est difficile d’atténuer18.
- Les crédits d’impôt à l’investissement dans l’énergie propre rendent plus attrayant économiquement d’investir dans les secteurs et les technologies à faible intensité de carbone que dans les autres secteurs19. En outre, la volonté des gouvernements de s’aligner sur les mesures incitatives offertes à l’étranger peut empêcher certains investissements verts de quitter le Canada20.
- Les mécanismes de plafonnement et d’échange touchent à l’établissement de plafonds d’émissions et à l’attribution de droits échangeables parmi les entités concernées. D’un côté, ils augmentent les coûts pour les entreprises à fortes émissions, ce qui dissuade les investissements dans ce secteur du fait de sa moins grande rentabilité, mais de l’autre, ils encouragent tout investissement dans des mesures de réduction des émissions qui serait effectué afin d’éviter l’achat de droits supplémentaires.
L’incertitude
L’incertitude peut freiner les investissements des entreprises en suscitant chez elles hésitation et prudence (Bloom, 2009; Bloom et autres, 2018; Baker, Bloom et Davis, 2016; Alexopoulos et Cohen, 2015). Ce canal pourrait être renforcé par le fait que de nombreux projets verts prennent souvent longtemps à se réaliser et que leur viabilité dépend des politiques climatiques. Les principales sources d’incertitude liées à la décarbonation incluent ce qui suit :
- Incertitude entourant les politiques et les réglementations. L’incertitude quant à la conception et à la mise en œuvre des politiques climatiques peut s’accroître au fil du temps (Lin et Hengsong, 2023), décourageant les investissements vu l’imprévisibilité des rendements futurs. En outre, les entraves de nature politique et réglementaire sont difficiles à prévoir et peuvent dissuader d’investir dans des projets futurs et de les réaliser (Karatayev et autres, 2016; Nasirov, Silva et Agostini, 2015; Seetharaman et autres, 2019).
- Incertitude entourant les technologies. La poursuite du développement de technologies émergentes à faibles émissions de carbone, incluant par exemple le captage, l’utilisation et le stockage du carbone et l’hydrogène, pourrait soutenir le maintien de la production et des investissements dans les secteurs à fortes émissions.
- Incertitude entourant des intrants essentiels et la géopolitique. Le degré de fiabilité de l’offre et des chaînes d’approvisionnement en minéraux et matières premières essentiels à la transition vers une économie à faibles émissions de carbone peut avoir une influence sur les décisions d’investissement. Parmi les principales difficultés à prévoir, citons l’augmentation attendue de la demande de certains métaux essentiels pour atteindre les objectifs climatiques21 et la concentration de l’offre de nombreux minéraux clés dans une poignée de régions22.
- D’un côté, l’offre incertaine et la vulnérabilité des chaînes d’approvisionnement en minéraux essentiels engendrent des risques de pénurie de ressources, et les perturbations de l’approvisionnement pourraient entraver le développement de technologies à faibles émissions de carbone et les investissements dans ce domaine.
- D’un autre côté, les efforts visant à préserver la transition énergétique d’éventuels problèmes de chaînes d’approvisionnement pourraient stimuler l’investissement intérieur.
Le financement
L’incapacité à mobiliser un financement suffisant constitue un risque pour tout investissement. Pour que les objectifs climatiques soient atteints, on estime qu’une hausse significative des investissements pourrait être nécessaire23. Or, les investisseurs peuvent être dissuadés pour diverses raisons, dont le risque d’écoblanchiment et des inquiétudes quant à la viabilité financière à long terme des projets à faibles émissions de carbone.
- L’écoblanchiment, c’est-à-dire la présentation trompeuse d’un produit, d’un service ou d’une entreprise comme étant respectueux de l’environnement, peut décourager les investissements axés sur le climat en minant la confiance des investisseurs dans ce domaine. Toutefois, l’élaboration de taxonomies vertes peut contribuer à clarifier la situation pour les marchés de capitaux en définissant les investissements financiers ou les actifs qui appuient les objectifs climatiques.
- La décision des investisseurs d’orienter leurs capitaux vers des projets à faibles émissions de carbone dépend également des attentes à l’égard des futures politiques climatiques. Une incertitude accrue entourant ces politiques pourrait entraver la mise à disposition de capitaux pour les initiatives en matière de climat.
Croissance de la productivité totale des facteurs
La croissance de la PTF est associée aux changements technologiques et organisationnels ainsi qu’aux économies d’échelle. Les investissements des entreprises sont souvent consacrés à des technologies modernes qui augmentent la PTF (voir, par exemple, Restuccia, 2004). Si la faiblesse de l’accumulation du capital observée au Canada depuis le milieu des années 2000 devait se poursuivre, ou même s’accentuer, la croissance de la PTF pourrait être inférieure aux prévisions dans notre scénario de référence (Gu, 2024).
De plus, il y a un risque que la croissance de la PTF soit touchée par les différences initiales de productivité entre les nouveaux arrivants et les travailleurs nés au Canada ou les immigrés plus anciens. Les données récentes semblent montrer un écart salarial grandissant entre les résidents non permanents et les employés nés au Canada (encadré 2). Cet écart est particulièrement important durant les premières années des nouveaux arrivants au pays, puisqu’il faut du temps pour s’adapter à un nouveau marché du travail et y atteindre son plein potentiel. Dans la mesure où les salaires reflètent partiellement la composante de rémunération de la PTF, les flux de résidents non permanents pourraient peser sur la croissance de la PTF à court terme24.
Nous estimons que ces deux risques à la baisse pourraient faire baisser la croissance de la production potentielle de 0,2 à 0,3 point de pourcentage annuellement entre 2024 et 2027 (tableau 2).
Annexe
Tableau A-1 : Projections de la production potentielle au Canada par rapport aux estimations d’avril 2023
Croissance annuelle | Croissance du facteur travail tendanciel | Croissance de la productivité tendancielle du travail | Fourchette de croissance | Révisions du niveau de la production potentielle (%) | |
---|---|---|---|---|---|
2023 | 2,3 (2,3) | 2,9 (1,5) | -0,6 (0,8) | —— | 0,8 |
2024 | 2,5 (2,1) | 3,0 (1,3) | -0,5 (0,8) | 2,1–2,8 | 1,2 |
2025 | 1,7 (2,1) | 0,9 (1,2) | 0,8 (0,9) | 1,1—2,4 | 0,8 |
2026 | 1,5 (2,2) | 0,6 (1,2) | 0,9 (1,0) | 0,9—2,2 | 0,1 |
2027 | 1,7 | 0,6 | 1,0 | 1,1—2,4 | —— |
Nota : Les taux estimés en avril 2023 sont indiqués entre parenthèses. Parce que les chiffres sont arrondis, la somme des éléments ne correspond pas toujours au total. La fourchette de la croissance de la production potentielle correspond à l’étendue méthodologique déduite des scénarios de risque.
Références
Alexopoulos, M. et J. Cohen. 2015. « The Power to Print: Uncertainty Shocks, Markets, and the Economy ». International Review of Economics & Finance, vol. 40, p. 8-28.
Arnold, J. et J. Leech. 2023. « Débloquer les investissements nécessaires à la transition énergétique du Canada avec la taxonomie des investissements climatiques ». Institut climatique du Canada.
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Notes
- 1. Statistique Canada, 2023.[←]
- 2. Ces estimations visent la population âgée de 15 ans et plus. L’estimation de la croissance démographique pour l’année 2023 repose sur des données tirées de l’Enquête sur la population active et les estimations démographiques trimestrielles de Statistique Canada.[←]
- 3. Les révisions historiques à la hausse du PIB sont associées à une croissance plus forte du PIB en 2021-2022 et à une croissance plus modeste en 2023, poussant la croissance estimée de la PTF tendancielle dans les mêmes directions. La mise à jour des données sur les flux et les stocks est associée à une estimation de la PTF relativement faible en 2022, ce qui induit une croissance de la PTF tendancielle plus basse en 2022 et en 2023. Globalement, la croissance de la PTF tendancielle est un peu plus élevée en 2022 et un peu plus basse en 2023.[←]
- 4. Pour une description détaillée du modèle de cohortes pour le FTT, voir Barnett (2007).[←]
- 5. Pour des précisions, voir le tableau A-1 en annexe.[←]
- 6. L’approfondissement du capital correspond à croissance du stock global de capital en fonction du nombre tendanciel d’heures travaillées, lequel est mesuré au moyen du FTT. Il est donc positivement corrélé à l’accumulation de capital (p. ex., les investissements en capital fixe) et négativement corrélé au FTT.[←]
- 7. Voir Brouillette, Devakos et Wheesk (à paraître).[←]
- 8. Nous avons employé une régression de forme réduite de la PTF sur les indicateurs de la numérisation et du vieillissement de la population pour estimer les effets de ces deux facteurs structurels. Pour estimer ceux des politiques climatiques, nous avons utilisé G-cubed, l’un des modèles d’équilibre général axés sur les changements climatiques en usage à la Banque. Nous avons ensuite ajusté les profils sectoriels de la PTF du scénario de référence pour tenir compte des effets estimés des facteurs structurels. Enfin, nous avons combiné ces profils aux parts des différents secteurs (calculées à l’aide de G-cubed) afin d’obtenir la PTF globale.[←]
- 9. G-cubed est un modèle d’équilibre général à plusieurs pays et à plusieurs secteurs qui a été élargi pour évaluer l’incidence des politiques climatiques (voir notamment McKibbin et Wilcoxen, 2013).[←]
- 10. Gu et Willox (2023) et Haun et Sargent (2023) proposent d’autres décompositions sectorielles de la productivité du travail selon la source de croissance. Ils comparent également la croissance de la productivité au Canada avec celle des États-Unis.[←]
- 11. Voir Mollins et Taskin (2023) pour une analyse plus approfondie du lien entre la numérisation et la productivité.[←]
- 12. Voir Guenette et Shao (à paraître) pour une discussion générale de questions liées à la démographie et à la productivité.[←]
- 13. Voir Barr, Foltin et Tang (2023) pour une analyse des transitions numérique et verte au Canada.[←]
- 14. Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada définit un résident permanent comme une personne qui a obtenu ce statut en immigrant au Canada, mais qui n’est pas encore citoyen canadien. Les résidents non permanents incluent généralement les demandeurs d’asile et les personnes qui détiennent un permis de travail ou d’études.[←]
- 15. Il convient de noter que l’Enquête sur la population active pourrait ne pas échantillonner correctement la population de résidents non permanents. Skuterud (2023) propose une vue d’ensemble des biais potentiels.[←]
- 16. Cette question de recherche fera l’objet d’un examen plus approfondi dans une note analytique du personnel à paraître.[←]
- 17. Dans la Classification nationale des professions de 2021, il y a six catégories de FEER (formation, étude, expérience et responsabilités). Les quatre premières correspondent à des emplois demandant des compétences très spécialisées. Pour de plus amples renseignements, voir le site Web de Statistique Canada.[←]
- 18. Selon certains, il se pourrait que les producteurs de pétrole et de gaz cherchent à vendre plus de pétrole aujourd’hui en procédant sans attendre à une montée en puissance des investissements et de l’extraction, avant que les politiques climatiques n’entraînent l’effondrement de la demande (Baur et Todorova, 2023; Li, Trencher et Asuka, 2022; Sinn, 2012). Les résultats de l’enquête de la Banque du Canada tendent à montrer que ce n’est pas le cas actuellement au pays.[←]
- 19. Depuis 2022, le gouvernement du Canada propose des crédits d’impôt à l’investissement dans les technologies propres, la production d’hydrogène propre, le captage de carbone, la fabrication de technologies propres et l’électricité propre.[←]
- 20. Par exemple, des prêts partiellement radiables et des subventions à la production sont envisageables, comme l’illustre l’annonce récente d’un investissement de 7 milliards de dollars de fonds publics dans le projet d’usine de production de batteries pour véhicules électriques Northvolt.[←]
- 21. À titre d’exemple, selon le scénario le plus prudent de l’Agence internationale de l’énergie, la demande de lithium augmenterait de 150 % entre 2022 et 2030. Dans le cadre d’un scénario où la carboneutralité serait atteinte, la demande lithium augmenterait de 450 % d’ici à 2030.[←]
- 22. Par exemple, le cobalt est un composant essentiel de nombreuses batteries, mais plus de 70 % des réserves mondiales de cobalt se trouvent dans la République démocratique du Congo (U.S. Geological Survey, 2023).[←]
- 23. Selon certaines estimations, le Canada pourrait avoir besoin de nouveaux investissements allant de 80 à 115 milliards de dollars par an pour atteindre ses cibles climatiques (Arnold et Leech, 2023; Conseil d’action en matière de finance durable, 2022).[←]
- 24. La composante « rémunération du travail » de la PTF est parfois appelée « composition de la main-d’œuvre ». Elle rend compte des variations de la productivité globale liées à l’évolution des compétences moyennes et du capital humain de la population active.[←]
Remerciements
Nous soulignons la contribution de Dany Brouillette, Julien Champagne, Tatjana Dahlhaus, Mallory Long, Youngmin Park, Kurt See et Raven Wheesk à l’analyse exposée dans le présent document. Nos remerciements vont également à Marc-André Gosselin et Alexander Ueberfeldt pour leurs commentaires et suggestions. Enfin, nous sommes reconnaissants à Carole Hubbard et Jordan Press pour leur aide à la rédaction de la version anglaise, ainsi qu’à Denis Clairand et Philippe Audet-Cayer pour la traduction française.
Avis d’exonération de responsabilité
Les notes analytiques du personnel de la Banque du Canada sont de brefs articles qui portent sur des sujets liés à la situation économique et financière du moment. Rédigées en toute indépendance du Conseil de direction, elles peuvent étayer ou remettre en question les orientations et idées établies. Les opinions exprimées dans le présent document sont celles des auteurs uniquement. Par conséquent, elles ne traduisent pas forcément le point de vue officiel de la Banque du Canada et n’engagent aucunement cette dernière.
DOI : https://doi.org/10.34989/san-2024-11