Résultats de l’enquête du 1er trimestre de 2024 | Vol. 21.1 | 1er avril 2024
Les répondants de l’enquête sur les perspectives des entreprises et du Pouls des leaders d’entreprise (anciennement Le Pouls des entrepreneurs) ont dit que leur confiance et leurs attentes quant à la croissance de leurs ventes ont cessé de se détériorer. La demande reste toutefois modérée, ce qui allège les pressions sur les prix et les tensions sur le marché du travail. Résultat : par rapport à la dernière enquête, moins d’entreprises comptent procéder à des augmentations de prix plus grandes et plus fréquentes que d’habitude au cours des 12 prochains mois.
Vue d’ensemble
- Les entreprises ont affirmé que la demande reste globalement faible. Certains signes révèlent cependant un nouveau vent d’optimisme. On note entre autres que les indicateurs de conditions commerciales, les perspectives de ventes, et les intentions d’embauche se sont améliorés après s’être détériorés pendant plusieurs trimestres. Après une période de faible croissance des ventes, les entreprises s’attendent à une amélioration sur ce plan en raison de la croissance démographique, des efforts déployés pour pénétrer de nouveaux marchés ou développer de nouveaux produits, et des anticipations autour d’une baisse des taux d’intérêt au cours des 12 prochains mois.
- Les répondants sont en train de revoir à la baisse leurs plans d’investissement à cause des hauts coûts d’emprunt, de la faiblesse persistante de la demande et de l’atténuation des contraintes de capacité. Dans cet environnement, moins d’entreprises ressentent le besoin de s’agrandir. Au contraire, elles sont plus nombreuses à axer leurs investissements sur le maintien des capacités existantes.
- Les entreprises trouvent qu’il est plus facile de pourvoir des postes vacants. La croissance des salaires reste élevée, mais la plupart des répondants s’attendent à ce qu’elle ralentisse à mesure que les salaires rattraperont la hausse du coût de la vie.
- Les pratiques d’établissement des prix des entreprises continuent de se normaliser. Cependant, la croissance du prix des produits demeure forte en raison de la faible modération de la croissance des salaires et de la transmission graduelle des coûts élevés.
La confiance des entreprises reste faible, mais il y a des signes d’amélioration
Selon les répondants, les conditions commerciales se sont quelque peu améliorées au premier trimestre (graphique 1), après s’être détériorées pendant presque deux ans. Les entreprises de presque toutes les régions, toutes les tailles et tous les secteurs ont fait état de cette amélioration. De plus, les répondants ont été moins nombreux qu’au dernier trimestre à anticiper une récession au pays au cours des 12 prochains mois (graphique 2).
Graphique 1 : La confiance des entreprises a légèrement augmenté
Graphique 2 : Une plus faible proportion d’entreprises se préparent à une récession
Les préoccupations des entreprises tendent globalement à être les mêmes depuis les derniers trimestres (graphique 3). Les répondants ont été moins nombreux à signaler des contraintes de capacité, notamment des pénuries de main-d’œuvre et des problèmes d’approvisionnement. Toutefois, leurs plus grandes inquiétudes concernent encore de plus en plus la demande, l’incertitude et le crédit. Les pressions sur les coûts restent aussi une de leurs principales préoccupations, près de la moitié des répondants ayant encore fait état d’augmentations de coûts plus importantes qu’à l’habitude. En outre, les entreprises ont été plus nombreuses qu’aux derniers trimestres à déclarer que les impôts et les taxes, ainsi que les réglementations locales ou sectorielles, sont une grande préoccupation.
Graphique 3 : La demande, les coûts et l’incertitude restent les principales préoccupations des entreprises
Les taux d’intérêt continuent de freiner la demande
Les indicateurs de la demande demeurent faibles. La croissance des ventes a été anémique au cours de la dernière année, surtout celle des entreprises dont l’activité est liées aux dépenses discrétionnaires et à l’immobilier résidentiel. Lorsqu’elles ont évoqué la faiblesse de la demande, les entreprises ont souvent mentionné la situation financière de leurs clients et le ralentissement économique observé récemment au pays. Environ trois quarts des répondants ont dit que les taux d’intérêt ont des effets négatifs sur leurs affaires, souvent en réduisant la demande de leurs produits et services. Ces résultats sont semblables à ceux des derniers trimestres. Les effets des taux d’intérêt se font sentir dans l’ensemble des secteurs.
Les perspectives de ventes des entreprises pour les 12 prochains mois donnent à penser que l’activité économique restera ténue. Plus précisément, les indicateurs des ventes futures (carnets de commandes, réservations, demandes de renseignements, etc.) sont pratiquement les mêmes qu’il y a 12 mois (graphique 4, ligne rouge), et se situent à un niveau bas comparativement à la moyenne historique. Les résultats de l’enquête semblent par ailleurs indiquer que la lente croissance économique se poursuivra, car les entreprises s’attendent à ce que la croissance future de leurs ventes soit similaire à celle des 12 derniers mois (graphique 4, barres bleues).
Graphique 4 : Les entreprises continuent de s’attendre à une croissance modérée de leurs ventes
Cela dit, certains signes laissent entrevoir un nouveau vent d’optimisme concernant la demande, ses indicateurs ayant remonté après avoir baissé pendant de nombreux trimestres. Plus précisément, les entreprises qui ont subi les effets de la baisse des dépenses de consommation ces 12 derniers mois s’attendent à une accélération de la croissance de leurs ventes au cours des 12 prochains mois. Parmi toutes les entreprises qui anticipent une amélioration de la croissance de leurs ventes, près de la moitié disent prévoir des baisses de taux d’intérêt. Cette anticipation conditionnelle d’une reprise de la croissance des ventes est particulièrement manifeste dans les secteurs sensibles aux taux d’intérêt, comme celui du logement. Plusieurs répondants ont aussi indiqué que la forte croissance démographique continuerait de soutenir leurs ventes à l’avenir. Malgré cela, bon nombre d’entre eux prennent des mesures pour élargir leur clientèle, notamment en :
- intensifiant leurs activités de marketing
- gardant leurs prix à des niveaux concurrentiels
- adaptant leurs produits et services aux besoins des consommateurs qui ont davantage de contraintes financières qu’avant
Les intentions d’investissement se sont affaiblies
Les contraintes de capacité des entreprises sont essentiellement les mêmes qu’au trimestre précédent et demeurent à un niveau bien en deçà du sommet atteint en 2022 (graphique 5). La proportion des entreprises qui auraient quelques difficultés à faire face à une hausse inattendue de la demande a augmenté au cours de ce trimestre. Cependant, la proportion de celles qui auraient de sérieuses difficultés à cet égard a baissé à tout juste 6 %, après avoir atteint un pic de 30 % au début de 2022. La demande étant modérée en ce moment, ces grandes pressions sur la capacité se sont atténuées. Les problèmes restants sont souvent liés à des foyers de tension, notamment :
- des pénuries de main-d’œuvre – souvent de nature structurelle – liées à des enjeux démographiques de longue date ou à des professions ou des secteurs particuliers
- des difficultés persistantes dans les chaînes d’approvisionnement, qui ont souvent des effets négatifs mineurs, comme des délais plus longs que d’habitude pour obtenir certains articles
Graphique 5 : Moins d’entreprises sont confrontées à des contraintes de capacité importantes
Dans ce contexte, les intentions d’investissement des entreprises se sont affaiblies comparativement à leurs niveaux historiques (graphique 6). Les répondants attribuent ces modestes intentions à plusieurs facteurs :
- l’incertitude persistante et la faiblesse générale de la demande
- des contraintes de capacité moins nombreuses
- des coûts d’emprunt élevés
- le recul des prix de certains produits de base observé récemment, surtout du gaz naturel
La faiblesse des intentions d’investissement peut être en partie attribuée aux effets à long terme des hausses passées de taux d’intérêt, les projets à long terme qui avaient été financés quand les taux d’intérêt étaient plus bas étant terminés. Au lieu d’entamer de nouveaux projets pour stimuler la productivité ou augmenter la production, beaucoup d’entreprises axent simplement leurs plans d’investissement sur la réparation ou le remplacement de machines et de matériel afin de maintenir leur capacité actuelle.
Graphique 6 : Les intentions d’investissement sont faibles
Les répondants ont affirmé qu’après s’être resserrées pendant deux ans, les conditions de crédit sont pratiquement restées inchangées ces trois derniers mois (graphique 7). À peu près les trois quarts des entreprises ayant fait état d’un assouplissement de leurs conditions de crédit ont mentionné avoir des coûts d’emprunt plus bas. Cette situation reflète la baisse des rendements obligataires à long terme observée ces récents mois.
Graphique 7 : Les entreprises ne font plus état d’un resserrement des conditions de crédit
Les pénuries de main-d’œuvre continuent de se résorber, mais la croissance des salaires reste forte
Moins d’un quart des entreprises ont dit souffrir de pénuries de main-d’œuvre. Dans l’ensemble, les répondants ont signalé que les tensions sur le marché du travail sont moins intenses qu’il y a 12 mois (graphique 8). L’assouplissement des conditions sur ce marché découle à la fois d’une demande plus faible pour de nouveaux travailleurs et d’une plus grande offre de travailleurs disponibles.
En tout, 43 % des répondants ont l’intention d’accroître leurs effectifs. Ces plans d’embauche pour les 12 prochains mois sont guidés par un regain de confiance des entreprises, par la légère amélioration des perspectives concernant la demande, et par un meilleur équilibre sur le marché du travail.
Graphique 8 : Les pressions sur le marché du travail continuent de s’atténuer
Les entreprises s’attendent à ce que la croissance des salaires soit plus lente qu’au cours des 12 derniers mois, du fait de l’assouplissement des conditions sur le marché du travail. Cependant, les ajustements salariaux prévus – qui s’élèvent à 4,1 % – demeurent supérieurs à la moyenne (graphique 9). Les entreprises ont dit devoir encore tenir compte du coût élevé de la vie quand elles déterminent les salaires.
- Plus de 60 % des entreprises ont déclaré que le coût de la vie influe sur leurs décisions concernant l’établissement des salaires, mais moins d’un tiers d’entre elles estiment que ce coût exerce plus de pressions sur la croissance des salaires que l’an passé.
- Les entreprises qui pensent que l’inflation dépassera 3 % prévoient des augmentations salariales plus importantes au cours de l’année à venir que les autres répondants.
La normalisation du processus d’établissement des salaires continue à se faire graduellement. Un peu plus de 40 % des entreprises – une proportion similaire à celle observée au dernier trimestre – ont dit que leurs augmentations salariales ne sont plus anormalement élevées. Cependant, la part des entreprises qui s’attendent à ce que la croissance anormalement élevée des salaires persiste jusqu’en 2025 est passée à 23 %, alors qu’elle s’élevait à 14 % au dernier trimestre.
Graphique 9 : La croissance attendue des salaires ralentit, mais reste exceptionnellement élevée
Les pratiques d’établissement des prix des entreprises continuent de se normaliser
Les entreprises croient que le coût de leurs intrants et leurs prix de vente augmenteront au cours des 12 prochains mois dans une proportion inférieure à celle des 12 derniers mois. La part des entreprises qui anticipent une hausse importante du coût de leurs intrants et de leurs prix de vente a considérablement baissé par rapport au sommet atteint en 2022 (graphique 10). Dans le cas de celles qui prévoient des hausses de prix moins grandes que les augmentations des 12 derniers mois, les facteurs suivants ont contribué à cette évaluation :
- demande plus faible et concurrence accrue
- transmission continue des coûts plus bas liés au matériel et aux chaînes d’approvisionnement
- croissance des salaires plus lente
Graphique 10 : Les attentes à l’égard d’une hausse importante des coûts et des prix de vente avoisinent les niveaux habituels
Moins d’entreprises comptent effectuer des hausses de prix inhabituellement élevées ou fréquentes au cours des 12 prochains mois (graphique 11). Selon ce groupe minoritaire d’entreprises, un petit nombre de facteurs les empêchent de revenir à des pratiques normales d’établissement des prix :
- la croissance des salaires est bien supérieure à celle d’avant la pandémie
- la transmission incomplète des coûts élevés des dernières années
- dans le cas de certaines entreprises, les marges de profit qui ne sont pas encore revenues à leurs niveaux habituels
Graphique 11 : La part des entreprises qui envisagent d’effectuer des hausses de prix inhabituellement élevées ou fréquentes baisse graduellement
Les attentes d’inflation poursuivent graduellement leur descente
Les attentes d’inflation à court terme ont continué de baisser graduellement (graphique 12). Les répondants pensent que la politique monétaire allège les pressions à la hausse qu’exercent la demande et les contraintes de capacité sur l’inflation. En même temps, les hausses de coûts liées au logement, à l’alimentation et aux salaires freinent la baisse des attentes d’inflation.
Seulement 27 % des répondants à l’enquête sur les perspectives des entreprises croient que l’inflation restera au-dessus de 2 % pendant au moins trois ans, comparativement à 37 % au trimestre précédent.
Graphique 12 : Les attentes d’inflation à court terme continuent de diminuer graduellement
Les résultats de l’enquête représentent des opinions exprimées par les répondants et ne reflètent pas forcément le point de vue de la Banque du Canada.
L’Enquête sur les perspectives des entreprises contient une synthèse de l’information qui a été obtenue dans le cadre d’entrevues réalisées par le personnel des bureaux régionaux de la Banque auprès des responsables d’une centaine d’entreprises, choisies en fonction de la composition du produit intérieur brut du secteur canadien des entreprises. Les données de cette enquête ont été recueillies par téléphone, par vidéoconférence et dans le cadre d’entrevues en personne entre les 5 et 23 février 2024. Des précisions sur le questionnaire et les réponses obtenues sont présentées dans le site Web de la Banque du Canada.
Le Pouls des leaders d’entreprise (anciennement Le Pouls des entrepreneurs) est une enquête en ligne menée chaque mois par la Banque du Canada auprès de 700 à 1 000 dirigeants d’entreprises canadiennes, qui sont appelés à répondre à l’un des trois courts questionnaires de l’enquête. La présente publication comprend les résultats des enquêtes menées en janvier, février et mars 2024. Pour en savoir plus sur Le Pouls des leaders d’entreprise, voir T. Chernis, C. D’Souza, K. MacLean, T. Reader, J. Slive et F. Suvankulov, The Business Leaders’ Pulse—An Online Business Survey, document d’analyse du personnel 2022-14, Banque du Canada (juin 2022).