Bonjour. Je suis ravi d’être ici en compagnie de la première sous-gouverneure Carolyn Rogers pour parler de l’annonce d’aujourd’hui concernant le taux directeur, ainsi que du Rapport sur la politique monétaire de la Banque du Canada.
Aujourd’hui, nous avons maintenu le taux directeur à 5 %, et nous poursuivons notre politique de resserrement quantitatif.
L’inflation a beaucoup baissé depuis l’été 2022, mais comme tout le monde le sait, elle est encore trop élevée.
Nous avons laissé le taux directeur au même niveau parce que la politique monétaire est en train de ralentir l’économie et d’alléger les pressions sur les prix, et parce que nous voulons lui laisser le temps de faire son travail. Mais la baisse de l’inflation devrait se poursuivre lentement, et les risques inflationnistes ont augmenté.
Laissez-moi vous en dire plus là-dessus et vous parler des implications pour la politique monétaire.
La croissance économique mondiale ralentit comme attendu, la demande étant restreinte par la montée des taux d’intérêt et le resserrement des conditions financières. Mais le profil de cette croissance n’est plus exactement comme nous l’avions prévu en juillet : l’économie des États-Unis affiche une vigueur surprenante, et celle de la Chine a ralenti plus que prévu. En même temps, les tensions géopolitiques se sont accrues. La guerre d’agression que la Russie mène à l’Ukraine se poursuit, et les attaques perpétrées par le Hamas en Israël ont fait éclater un conflit en Israël et à Gaza. Ces guerres causent d’immesurables souffrances. Elles nuisent à l’économie mondiale et viennent teinter d’incertitude les perspectives.
Au Canada, l’économie a ralenti, et les données semblent indiquer que l’offre et la demande s’approchent du point d’équilibre. Comme on s’attend à ce que l’offre devienne excédentaire cette année et à ce que la croissance soit faible pendant quelques trimestres, les pressions sur les prix devraient encore s’atténuer. Nous prévoyons que l’inflation baissera graduellement, puis retournera à la cible de 2 % en 2025. Cela dit, nous craignons que les prix plus élevés de l’énergie et la persistance de la forte inflation sous-jacente soient en train de freiner ces progrès.
Depuis la parution du Rapport de juillet, il est plus clair que les taux d’intérêt plus élevés modèrent les dépenses et rééquilibrent l’offre et la demande. La croissance économique a ralenti au cours de la dernière année, se chiffrant à 1 % en moyenne. La croissance du crédit aux ménages s’est affaiblie, tout comme la demande de logements et de nombreux biens durables. Depuis peu, la demande de services se modère également. Puisque les dépenses de consommation devraient demeurer modestes presque toute l’année prochaine, nous avons révisé à la baisse nos perspectives de croissance. Ainsi, nous prévoyons maintenant une croissance du produit intérieur brut inférieure à 1 % jusque vers la fin de 2024. Elle devrait ensuite s’accélérer pour atteindre 2½ % en 2025.
Comme vous le savez, nous suivons de près les indicateurs de l’équilibre entre l’offre et la demande. Mais, en ce moment, ces indicateurs ne vont pas tous dans le même sens. Les estimations de l’écart de production semblent indiquer que l’équilibre serait déjà essentiellement atteint, et même que l’offre aurait légèrement dépassé la demande. Des indicateurs du marché du travail montrent que les pénuries de travailleurs auraient beaucoup diminué par rapport à leurs niveaux élevés, mais que le marché serait encore plutôt tendu. Les postes vacants ont baissé, mais restent plus nombreux que la normale. Et malgré une légère hausse, le taux de chômage demeure bas. La croissance des salaires reste forte, se situant entre 4 et 5 %. Ce qui est plus clair, toutefois, c’est que les pressions exercées par la demande se sont atténuées plus rapidement que prévu dans le Rapport de juillet.
Donc, quelles sont les implications pour l’inflation? Déjà, de plus en plus de données montrent que le resserrement monétaire réduit les pressions sur les prix de nombreux biens et services. Et comme l’offre dépasse déjà – ou ne tardera pas à dépasser – la demande, il faut s’attendre à ce que davantage de pressions à la baisse viennent s’exercer sur l’inflation. Pourtant, nos perspectives d’inflation à court terme sont plus élevées qu’en juillet. Je vous explique pourquoi.
Les effets des taux d’intérêt plus élevés se constatent particulièrement du côté des prix des biens durables que les gens achètent généralement à crédit, comme les meubles et les électroménagers. Ils s’étendent également à bon nombre de biens semi-durables – une catégorie qui comprend notamment les vêtements et les chaussures – et à de nombreux services hors logement. L’inflation dans ces catégories se tient maintenant à 2 % ou moins en général. Le taux d’augmentation des prix des aliments en épicerie, bien qu’encore élevé à près de 6 %, a aussi baissé et devrait continuer dans cette voie.
Malgré ces effets, nous avons revu nos perspectives d’inflation à la hausse. Les prix plus élevés de l’énergie, les pressions structurelles sur le marché canadien du logement et la persistance de la forte inflation sous-jacente sont tous des facteurs qui ralentissent le retour à la cible d’inflation.
Les prix de l’essence ont grimpé sous l’effet de la montée des prix mondiaux du pétrole, lesquels devraient rester plus élevés que postulé en juillet. Les frais de logement progressent à un rythme de plus de 6 %, ce qui tient en partie à l’augmentation des intérêts hypothécaires découlant des hausses du taux directeur. Mais l’augmentation des loyers et autres frais de logement y est aussi pour quelque chose, même si elle est davantage liée à la pénurie structurelle de logements. Enfin, les attentes d’inflation à court terme et la croissance des salaires demeurent élevées, et les entreprises mettent du temps à reprendre leurs pratiques normales d’établissement des prix. Tout cela rend la forte inflation sous-jacente plus persistante.
Vu l’effet combiné de ces facteurs, nous prévoyons maintenant que l’inflation avoisinera 3½ % jusqu’au milieu de l’an prochain environ. En phase avec l’accroissement de l’offre excédentaire, l’inflation devrait poursuivre sa baisse en 2024, pour atteindre 2 % en 2025.
Des risques tant à la hausse qu’à la baisse pèsent sur ces prévisions, et la trajectoire de l’inflation demeure incertaine. Dans l’ensemble, les risques inflationnistes ont augmenté depuis juillet. Dans la projection d’aujourd’hui, la trajectoire de l’inflation est plus haute que dans la précédente. De plus, la montée des tensions à l’échelle internationale accroît les risques. Dans un monde plus hostile, les prix de l’énergie pourraient grimper brusquement et les chaînes d’approvisionnement pourraient être à nouveau perturbées, ce qui ferait monter l’inflation aux quatre coins du globe.
Pour avoir l’assurance que le taux directeur est assez élevé pour ramener l’inflation à 2 %, nous devons voir nos mesures de l’inflation fondamentale baisser davantage. Nous continuons de surveiller attentivement divers indicateurs des pressions inflationnistes sous-jacentes, particulièrement l’équilibre entre l’offre et la demande, les attentes d’inflation, la croissance des salaires et les pratiques d’établissement des prix des entreprises.
Sur la base de signes plus clairs que la politique monétaire fonctionne, le Conseil de direction a jugé que nous pouvions être patients et maintenir le taux directeur à 5 %. Nous allons continuer d’évaluer si la politique monétaire est assez restrictive pour rétablir la stabilité des prix et allons surveiller les risques de près. La décision d’aujourd’hui témoigne aussi du fait que nous tentons de doser notre resserrement monétaire le mieux possible : nous ne voulons pas ralentir l’économie plus que nécessaire, mais nous ne voulons pas non plus que les Canadiennes et les Canadiens continuent de vivre avec l’inflation élevée, ni que celle-ci s’enracine. Et si les pressions inflationnistes persistent, nous sommes prêts à relever encore le taux directeur pour rétablir la stabilité des prix.
Nous avons fait beaucoup de progrès, mais nous ne pouvons pas encore crier victoire. Nous devons garder le cap. Parce qu’une fois la stabilité des prix rétablie, l’économie fonctionnera mieux pour tout le monde.
Sur ce, la première sous-gouverneure et moi serons heureux de répondre à vos questions.
Rapport sur la politique monétaire – Octobre 2023
Les taux d’intérêt plus élevés viennent alléger les pressions sur les prix au Canada et l’inflation est en baisse, même si les progrès vers la cible de 2 % sont lents. La Banque prévoit que l’inflation demeurera autour de 3,5 % jusqu’au milieu de 2024 pour retourner à la cible en 2025.
Information connexe
Conférence de presse : Rapport sur la politique monétaire – Octobre 2023
Publication du Rapport sur la politique monétaire — Conférence de presse donnée par le gouverneur Tiff Macklem et la première sous-gouverneure, Mme Carolyn Rogers. (vers 11 h, heure de l’Est)