Introduction

Bonjour à tous. Je suis très heureuse d’être à Regina aujourd’hui et de pouvoir vous adresser la parole.

Avant de commencer, j’aimerais prendre quelques minutes pour féliciter une personne de la région, qui a remporté cette année le Prix d’excellence en enseignement de l’économie décerné par le Musée de la Banque du Canada. Andre Boutin Maloney, de la Bert Fox Community High School à Fort Qu’Appelle, a mis au point une simulation interactive du commerce des fourrures à un poste de traite, qui intègre l’histoire des Autochtones ainsi que de nombreux principes économiques. Félicitations à Andre et à ses élèves. L’appel à candidatures pour 2024 a été lancé voici peu. Si vous connaissez des enseignants d’économie particulièrement doués, vous pouvez soumettre leurs noms sur le site Web du Musée.

Aujourd’hui, j’aimerais me pencher sur les différentes répercussions qu’ont eues les événements des dernières années sur les ménages. Même avant la pandémie, les ménages n’avaient pas tous les mêmes niveaux de revenu, de richesse et d’endettement. Et depuis l’arrivée de la COVID-19 au Canada début 2020, la conjoncture économique a changé considérablement à plusieurs reprises. En réaction, les banques centrales et les gouvernements ont adopté des trains de mesures.

Les politiques et la situation économique ont influé sur la façon dont chaque ménage et entreprise a vécu les effets de la pandémie. Et ce vécu a à son tour influencé les décisions de politique monétaire que nous avons prises par la suite. Dans cet environnement complexe et en constante évolution, il a été important de comprendre l’impact de nos décisions sur les ménages et les entreprises.

Les répercussions de la pandémie sur les ménages canadiens

Je vais donc entrer dans le vif du sujet et parler des répercussions de la pandémie sur les ménages, sur le plan individuel. Les données économiques agrégées ne brossent pas toujours un tableau complet. Ce type de données représente des moyennes, mais aucun ménage ne se situe jamais vraiment dans la moyenne. La situation financière et les habitudes de consommation d’un ménage sont aussi uniques que lui. Il n’est donc pas surprenant que les ménages aient vécu très différemment la conjoncture économique inhabituelle des dernières années.

Au début de la pandémie, des confinements ont forcé certaines entreprises à fermer complètement leurs portes ou à limiter le nombre de clients qu’elles pouvaient recevoir dans leurs locaux. Il y avait tout simplement moins d’établissements ouverts. De nombreux commerces ont ainsi vu leur chiffre d’affaires chuter, ce qui a entraîné une foule de licenciements. Dans ce contexte, les gouvernements ont accru les programmes d’aide, et la Banque du Canada a assoupli la politique monétaire.

La pandémie a été marquée par de grandes fluctuations autant de l’offre que de la demande. Dans un premier temps, on a assisté à une explosion de la demande de produits pouvant aider les gens à traverser la crise sanitaire. Mais, de manière plus générale, la demande de beaucoup d’autres biens et services a chuté. Comme les gens sont restés chez eux et que la demande a fortement baissé, l’inflation globale a en fait été quasi nulle pendant plusieurs mois en 2020.

Évidemment, ça n’a pas duré. Alors que de nombreux travailleurs se sont mis à passer plus de temps chez eux, la demande de biens comme le matériel de bureau ou les accessoires de sport pour la maison a grimpé en flèche. De nouveaux défis se sont toutefois présentés. Les dépenses de consommation des ménages ont rebondi assez rapidement (surtout pour les articles que l’on pouvait commander en ligne), mais l’offre a été limitée par des perturbations dans les chaînes d’approvisionnement mondiales. Nous avions déjà observé des perturbations de ce genre, mais jamais de cette ampleur. La forte demande et l’offre restreinte ont commencé à faire augmenter les prix de certains biens, en agissant comme une première force inflationniste.

On a assisté à peu près au même moment à un essor sans précédent de l’activité immobilière, qui s’est prolongé et a fait grimper les prix des logements à des niveaux record aux quatre coins du pays. Une dynamique similaire survenait dans d’autres pays, les confinements ayant amené bon nombre de ménages à revenu moyen ou élevé à constituer une épargne importante. Cette situation, conjuguée aux bas taux d’intérêt et au désir des ménages d’avoir plus d’espace, a stimulé la demande. Mais les ménages ont été touchés de façons très différentes, et ces disparités ont continué d’être prises en compte dans nos délibérations en matière de politique monétaire. En voici les raisons.

Environ les deux tiers des ménages canadiens possèdent un logement, et leur avoir propre foncier a augmenté avec la hausse des prix de l’immobilier. Mais certains ménages ont contracté une dette hypothécaire considérable pour financer l’achat d’une propriété sur un marché qui favorisait nettement les vendeurs. Si le marché immobilier a fini par se modérer, cet essor aura eu cependant un effet durable : certains ménages ont maintenant un avoir propre foncier plus élevé, tandis que d’autres sont aux prises avec un niveau d’endettement beaucoup plus élevé.

Le contexte dans lequel tout cela s’est produit est important. Alors même que les taux d’intérêt étaient demeurés très bas avant la pandémie, certains ménages s’étaient lourdement endettés. Les hauts niveaux d’endettement actuels influent sur la manière dont la montée des taux d’intérêt se répercute sur chaque ménage et ont changé l’importance relative des canaux de transmission de la politique monétaire.

Les niveaux d’endettement élevés des ménages et les canaux de transmission de la politique monétaire

J’aimerais maintenant décrire un peu plus en détail ce que sont les canaux de transmission de la politique monétaire et expliquer pourquoi l’un d’entre eux a commencé à avoir une incidence d’une ampleur exceptionnelle au cours du présent cycle de resserrement.

Pour schématiser, lorsque nous augmentons le taux directeur, d’autres taux d’intérêt ont aussi tendance à augmenter, tout comme la valeur du dollar canadien. En gros, c’est de cette manière que fonctionne la politique monétaire. Ces hausses freinent la demande intérieure et les exportations nettes, puis allègent les pressions sur les prix. Mais ce n’est pas tout. La montée des taux d’intérêt a tendance à ralentir la demande, mais les effets de cette hausse sont ressentis différemment d’un ménage à l’autre. Et ce sont ces disparités qui peuvent jouer sur les façons dont agit la politique monétaire.

Jusqu’à présent, les répercussions les plus importantes sont associées à ce qu’on appelle le canal des flux de trésorerie (ou encore, le canal des revenus). Ce canal traduit en partie le fait que les ménages dont les coûts du service de la dette varient en fonction des taux d’intérêt, tels que le taux préférentiel, sont ceux qui ont été touchés de plein fouet. Actuellement, environ 15 % des ménages doivent composer avec des hausses des taux d’intérêt et ont des paiements hypothécaires plus élevés qu’en février 20221. Avec le temps, de plus en plus de gens vont renouveler leur prêt hypothécaire et devoir augmenter leurs versements hypothécaires.

Permettez-moi d’ajouter qu’une dynamique similaire est peut-être à l’œuvre dans la hausse des loyers. En effet, les locateurs qui ont contracté un prêt hypothécaire peuvent également devoir supporter des coûts d’intérêt plus élevés et les répercuter sur les locataires. Par ailleurs, en étant plus élevés, les taux hypothécaires restreignent l’accès des acheteurs au financement hypothécaire, ce qui pourrait pousser certains ménages vers le marché locatif. Le loyer moyen au pays était en hausse de plus de 6 % en août.

Quand on a des frais de logement plus élevés, cela veut dire qu’on a moins de revenu disponible pour s’offrir d’autres choses comme des repas au restaurant ou des vacances. Des taux d’intérêt en hausse alourdissent le fardeau de la dette des ménages2. Les ménages avec un prêt hypothécaire à taux variable et des versements variables ressentent presque immédiatement cet effet quand les taux d’intérêt augmentent. Il en va de même des personnes qui ont contracté des emprunts bancaires à taux variable, comme des marges de crédit garanties par l’avoir propre foncier.

Jusqu’à maintenant, le canal des flux de trésorerie a non seulement eu les effets les plus marqués, mais il a aussi été plus important que dans les cycles passés. Je reviendrai sur ce point un peu plus tard.

Traditionnellement, le retardement ou le devancement des dépenses des ménages constitue la principale voie par laquelle la politique monétaire influence la demande. Pour bien comprendre, il faut avoir recours au concept des taux d’intérêt réels. Il s’agit du niveau des taux d’intérêt dont vous entendez tout le temps parler, moins le taux d’inflation anticipé. La posture de la politique monétaire, telle que reflétée dans les taux d’intérêt réels, n’est devenue vraiment restrictive que récemment, dans la foulée des hausses du taux directeur et de la baisse des attentes d’inflation.

Les taux d’intérêt réels influent sur la décision du consommateur d’acheter quelque chose tout de suite ou d’attendre. L’idée est que, quand les taux d’intérêt réels sont élevés, le rendement de l’épargne est supérieur à la progression attendue des prix. Donc, au lieu d’acheter quelque chose maintenant, on pourrait l’acheter plus tard, et finir par avoir un peu d’argent en plus, grâce aux intérêts touchés sur l’épargne. Qu’ils soient considérés comme augmentant le coût de l’emprunt ou le rendement de l’épargne, des taux d’intérêt réels plus élevés contribuent à réduire la demande dans l’économie et à faire diminuer l’inflation.

Les effets de richesse constituent le troisième canal par lequel les hausses du taux directeur peuvent freiner la demande. Quand les taux d’intérêt s’accroissent, la valeur de nombreux actifs – comme le prix des maisons et des actions – a tendance à baisser. Si les consommateurs voient leur richesse diminuer, ils peuvent être portés à réduire leurs dépenses. Les prix des actifs peuvent réagir assez vite aux hausses de taux d’intérêt, mais l’incidence d’une diminution de la richesse sur la consommation tend à prendre plus de temps à se manifester.

Nous tenons compte de ces trois canaux lorsque nous fixons l’orientation de la politique monétaire et les suivons de près pour évaluer son efficacité. Nous avons vu la demande ralentir depuis que nous avons commencé à relever le taux directeur. Ce ralentissement s’est d’abord fait sentir dans le secteur du logement, mais s’est ensuite propagé à d’autres types de dépenses sensibles aux taux d’intérêt. La croissance du crédit s’est également modérée. Du côté de l’épargne, les particuliers se sont tournés vers les dépôts à terme, car ils ont tendance à rapporter davantage (graphique 1).

Enfin, nous avons observé un recul à la fois de l’inflation mesurée par l’indice des prix à la consommation (IPC) et de l’inflation fondamentale. Mais dans toutes nos décisions, nous avons été confrontés à de nouveaux défis au moment d’établir la politique monétaire.

Un grand exercice d’équilibriste, ou comment tenir compte des différences parmi la population dans l’établissement de la politique monétaire

La vérité, c’est que ces deux dernières années ont mis notre régime de ciblage de l’inflation à rude épreuve. Ce régime a été mis en place en 1991. Depuis lors, il y a eu des épisodes où l’inflation dépassait la limite supérieure de notre fourchette de maîtrise de l’inflation, qui va de 1 à 3 %. Mais ils ne duraient pas et étaient souvent associés à des flambées temporaires ne concernant qu’un sous-ensemble de prix.

Cette fois-ci, il n’en a pas été de même.

La plus grosse différence est que l’inflation a atteint un niveau beaucoup plus élevé et qu’elle s’est inscrite au-dessus de la fourchette cible pendant plus longtemps. En outre, il y a eu des hausses de prix considérables qui ont frappé un vaste ensemble de produits et services. Toutes les couches de la population ont été touchées, et les effets ne sont pas toujours directement liés au niveau de revenu des ménages. La hausse des prix du carburant a des effets disproportionnés pour ceux qui vivent dans des régions où l’on se chauffe au mazout ou qui ont de grandes distances à parcourir en voiture. Et certains secteurs sont beaucoup plus pénalisés que d’autres. Par exemple, celui de l’agriculture fait un grand usage d’essence et de carburant diesel, et les agriculteurs ressentiront les effets des prix plus élevés de l’énergie bien davantage que la plupart.

La deuxième grosse différence est la conjoncture qui prévalait au moment où tout cela a commencé. Avant la pandémie, on se situait dans un contexte de faibles taux d’intérêt, qui perdurait depuis plus d’une décennie (graphique 2). Ces taux bas ont permis aux ménages d’emprunter plus facilement davantage d’argent. De fait, le niveau moyen d’endettement des ménages était élevé au moment où la pandémie s’est déclarée. Puis, durant la pandémie, même si certains ménages ont profité de leur épargne excédentaire pour rembourser leurs emprunts, les faibles taux d’intérêt en ont encouragé d’autres à s’endetter davantage.

Comme le niveau d’endettement était élevé et que les taux ont été si bas pendant si longtemps, l’effet des flux de trésorerie s’est révélé beaucoup plus important que par le passé.

Cette période de taux faibles pendant une longue durée veut dire, en particulier, qu’il est probable que tous les prêts hypothécaires à taux fixe sur cinq ans octroyés avant 2022 connaîtront une hausse substantielle de leur taux d’intérêt quand ils seront renouvelés (graphique 3). On l’a déjà constaté, et cela pourrait continuer de se vérifier pendant encore trois ans et demi. L’effet modérateur sur les dépenses qui en découle pourrait se faire sentir encore plus longtemps.

Une troisième différence est que, comme je l’ai déjà mentionné, pendant la pandémie, certains ménages ont vu s’accroître leur avoir propre foncier ou leur richesse boursière, tandis que d’autres ont simplement consommé beaucoup moins que d’habitude et épargné davantage.

En d’autres termes, le contexte actuel est compliqué. Comme l’inflation était très haute l’an passé, il fallait que les taux d’intérêt augmentent beaucoup. C’est pourquoi nous sommes intervenus énergiquement, en les relevant rapidement. L’inflation a baissé depuis, mais elle est encore trop élevée. Cela tend à signifier que les taux d’intérêt réels doivent, eux aussi, rester élevés.

Mais le niveau actuel de l’inflation n’est pas le seul facteur pertinent. La recherche d’un équilibre entre ces deux éléments contradictoires associés à la pandémie que sont la dette accumulée et la richesse accumulée a marqué l’élaboration de la politique monétaire durant ce cycle de resserrement. La combinaison d’un haut niveau d’épargne et d’une demande refoulée peut vouloir dire que certains ménages ont une envie et une capacité plus importantes de dépenser, et que leurs dépenses sont moins sensibles aux hausses des taux d’intérêt.

Par contraste, lorsque les ménages sont très endettés, leurs dépenses sont plus sensibles aux hausses des taux d’intérêt. Il est essentiel d’évaluer l’effet global de ces changements sur la transmission de la politique monétaire pour établir le degré approprié de resserrement à appliquer. C’est juste une des raisons qui expliquent pourquoi nous consacrons beaucoup de temps à surveiller des données détaillées sur les emprunts, les dépenses et l’épargne. Grâce à un ensemble diversifié de sources d’information, nous sommes en mesure de mieux comprendre ce qui se passe à une plus petite échelle et d’évaluer d’autres scénarios approfondis qui accordent un poids différent à la situation contrastée des ménages.

Par exemple, grâce à notre analyse de microdonnées anonymisées, nous savons que certains ménages, comme ceux dont les taux d’intérêt et les versements hypothécaires sont variables, font face à tout un défi budgétaire, du fait de l’augmentation de leurs paiements hypothécaires. Nous n’avons pas encore constaté de hausse disproportionnée des défauts de paiement sur les prêts hypothécaires pour ce groupe. Mais nous savons aussi que la proportion des ménages endettés accusant au moins 60 jours de retard dans le remboursement de tout produit de crédit a fortement augmenté depuis le début de l’année dernière et a essentiellement renoué avec les niveaux observés dans les années précédant la pandémie (graphique 4).

Nous devons être conscients que, parfois, des circonstances particulières exigent un examen plus poussé si l’on veut bien comprendre les données. Par exemple, même si les données d’enquête nous ont indiqué que de nombreux ménages éprouvent des difficultés, la consommation globale a été très forte au premier trimestre. Nous estimons que cela tient en partie à un certain nombre de facteurs exceptionnels, dont la demande refoulée de services, les retards de livraison de certains biens durables précommandés et une croissance démographique étonnamment vigoureuse.

En septembre, nous avons décidé de laisser le taux directeur inchangé, à 5 %. Les données les plus récentes démontrent que nos relèvements précédents du taux directeur ralentissent la demande. La progression du crédit aux ménages s’est modérée, puisque les taux d’intérêt plus élevés ont eu comme effet de réduire les dépenses d’un vaste éventail d’emprunteurs. Au second trimestre, une baisse marquée de la croissance de la consommation et un recul de l’activité dans le secteur du logement ont contribué à un net ralentissement de la croissance économique. Et nous sommes conscients du fait que les majorations passées des taux d’intérêt continueront de peser sur l’activité.

En ce qui concerne l’inflation, l’inflation mesurée par l’IPC a considérablement diminué, passant d’un sommet de 8,1 % en juin 2022 à 2,8 % en juin dernier, mais elle a augmenté depuis, pour atteindre 3,3 % en juillet et 4,0 % en août. Des fluctuations de cette ampleur ne sont pas rares, et c’est une des raisons qui nous incitent à examiner les mesures de l’inflation fondamentale – lesquelles font abstraction des composantes dont les mouvements des prix sont plus volatils – pour nous faire une idée de l’inflation sous-jacente.

Les mesures de l’inflation fondamentale ont baissé, mais les données récentes sur l’IPC nous amènent à penser que les pressions inflationnistes demeurent généralisées. Le nombre de composantes de l’IPC ayant enregistré des hausses de prix supérieures à 5 % est plus bas qu’avant, mais est toujours beaucoup plus élevé que d’habitude, quand l’inflation est stable et proche de 2 %. Plus généralement, l’inflation sous-jacente n’a guère fléchi ces derniers temps.

La question de l’’inflation est complexe. Nous examinons en détail la façon dont les prix évoluent à l’intérieur du panier de biens et de services utilisé pour calculer l’IPC, et pas simplement le taux d’inflation global. Par exemple, nous savons que le coût de l’intérêt hypothécaire a augmenté dans la foulée de nos relèvements du taux directeur, et que ce coût a augmenté davantage au cours de la dernière année que les prix de n’importe quelle autre composante de l’IPC. Cela tient en partie au fait que les taux hypothécaires ont été si bas pendant si longtemps. Selon certains, comme les variations du taux directeur peuvent influencer directement et immédiatement certains taux hypothécaires, nous devrions faire abstraction de cette composante dans nos analyses de l’inflation.

Il convient de rappeler que l’un des avantages de nos mesures de l’inflation fondamentale est qu’elles excluent les variations extrêmes des prix, qu’il s’agisse de hausses ou de baisses. L’IPC-tronq est une de nos mesures de l’inflation fondamentale. Bien qu’elle exclue le coût de l’intérêt hypothécaire depuis plus d’un an, elle s’est située entre environ 3,5 et 4 % ces derniers mois.

Certains observateurs estiment que le coût de l’intérêt hypothécaire provoque une distorsion à la hausse dans le panier de l’IPC. Permettez-moi de présenter un autre calcul, à leur intention. Prenons un panier de l’IPC qui comporterait exactement les mêmes biens et services, à l’exception du coût de l’intérêt hypothécaire. Si l’on applique les méthodes de calcul de l’inflation fondamentale à ce panier légèrement plus petit, on constate que les nouvelles mesures de l’inflation fondamentale sont un peu plus faibles, mais seulement d’environ un quart de point de pourcentage (graphique 5).

Autrement dit, l’inflation sous-jacente dépasse encore nettement le niveau qui serait compatible avec l’atteinte de notre cible de 2 % pour l’inflation mesurée par l’IPC.

Conclusion

Quand elle prend ses décisions de politique monétaire, la Banque du Canada doit tenir compte des multiples façons dont l’évolution du contexte économique touche les différents ménages. Nous n’établissons pas notre politique en fonction de ce qui arrive à un sous-ensemble de ménages ou au prix d’un bien ou service en particulier. Mais nous faisons de notre mieux pour saisir ce qui se produit de manière plus détaillée. Cela nous aide à mieux prévoir la trajectoire probable de l’économie et à mettre en balance les risques.

Nous tenons compte de données provenant d’un large éventail de sources au moment de mettre en balance les risques liés à un resserrement trop faible ou trop fort de la politique monétaire. Nous savons que si nous n’en faisons pas assez maintenant, il faudra probablement en faire beaucoup plus par la suite. Et que si nous en faisons trop, nous risquons de nuire inutilement à l’économie.

Nous ne prenons pas ces décisions à la légère. Nous savons que la hausse des taux a été très douloureuse pour certains, mais aussi que le fardeau d’une inflation élevée persistante pèse sur tous les ménages, quels que soient leurs niveaux de revenu et les régions du pays. Nous voyons des signes que la politique monétaire fonctionne. L’inflation a baissé, tout comme les attentes d’inflation, et il y a un recul de la demande excédentaire au sein de l’économie. De plus, les mesures de politique monétaire que nous avons prises par le passé continueront à faire sentir leur effet à mesure qu’elles se répercuteront sur l’économie.

Néanmoins, lorsque nous avons rendu publique notre plus récente décision de politique monétaire, nous avons aussi indiqué que la persistance de l’inflation sous-jacente nous préoccupait. Nous continuerons donc de jauger si l’évolution de la demande excédentaire, les attentes d’inflation, la croissance des salaires et les pratiques de fixation des prix des entreprises sont compatibles avec l’atteinte de la cible d’inflation de 2 %. Et nous sommes prêts à relever de nouveau le taux directeur si nécessaire.

La prise de décisions de politique monétaire exige à la fois des réflexions approfondies et des mesures fermes. Nous savons que les raisons qui sous-tendent les décisions de la Banque du Canada ne sont pas toujours évidentes aux yeux du public, et j’espère avoir pu éclairer notre façon d’aborder ces décisions. Nous étudions attentivement des données provenant d’une grande variété de sources, effectuons une multitude de recherches supplémentaires et tenons compte des nombreuses façons dont la politique monétaire touche la population.

L’expérience de notre pays en matière de ciblage de l’inflation a démontré que la meilleure façon de promouvoir le bien-être économique et financier des Canadiennes et des Canadiens est d’avoir un taux d’inflation bas, stable et prévisible. Nous avons la responsabilité de ramener l’inflation à la cible de 2 %. Et la Banque reste déterminée à rétablir la stabilité des prix pour l’ensemble de la population.

Je tiens à remercier Russell Barnett et Stephen Murchison de l’aide qu’ils m’ont apportée dans la préparation de ce discours.

Information connexe

19 septembre 2023

Les différences entre les ménages et la politique monétaire

Sommaire du discours Sharon Kozicki Université de Regina Regina (Saskatchewan)
La sous-gouverneure Sharon Kozicki explique comment les différents niveaux d’endettement, de revenu et d’épargne ont influé sur la façon dont chaque ménage a vécu la pandémie de COVID-19 et comment ces différences influencent aujourd’hui la politique monétaire.
19 septembre 2023

Discours : Université de Regina

Comment les différences entre les ménages ont influé sur la politique monétaire depuis le début de la pandémie de COVID-19 — La sous-gouverneure Sharon Kozicki prononce un discours à l’Université de Regina. (vers 14 h, heure de l’Est).

  1. 1. Ce chiffre reflète le fait qu’environ deux tiers des ménages sont propriétaires de leur logement, qu’à peu près 60 % des propriétaires ont un prêt hypothécaire et que plus ou moins 40 % d’entre eux ont dû faire face à une hausse de leurs versements depuis février 2022.[]
  2. 2. L’effet sur l’économie de la hausse des taux d’intérêt peut, en théorie, être partiellement compensé par l’augmentation des revenus d’intérêt que les ménages perçoivent sur leur épargne.[]