Bonjour. Je suis ravi d’être ici en compagnie de la première sous-gouverneure Carolyn Rogers pour parler de l’annonce d’aujourd’hui concernant le taux directeur, ainsi que du Rapport sur la politique monétaire de la Banque du Canada.
Aujourd’hui, nous avons relevé le taux directeur de 25 points de base pour le faire passer à 5 %. De plus, nous poursuivons notre politique de resserrement quantitatif.
Cette décision reflète deux grandes considérations.
Premièrement, la politique monétaire fonctionne, mais les pressions inflationnistes sous-jacentes s’avèrent plus tenaces qu’anticipé.
Nous avons fait beaucoup de progrès dans notre lutte contre l’inflation. L’inflation mesurée par l’indice des prix à la consommation (IPC) est passée d’un sommet de 8,1 % l’été dernier à 3,4 % en mai. Même si cette baisse cadre essentiellement avec nos prévisions, il reste que les pressions inflationnistes sous-jacentes se font plus persistantes que prévu. Il faut des taux d’intérêt plus élevés pour ralentir la croissance de la demande et alléger les pressions qui s’exercent sur les prix.
Deuxièmement, nous nous efforçons de bien doser notre resserrement monétaire. Si nous n’en faisons pas assez maintenant, il faudra probablement en faire beaucoup plus par la suite. Et si nous en faisons trop, nous risquons de plonger tout le monde dans une situation économique inutilement difficile.
Nous avons parcouru beaucoup de chemin, et nous ne voulons pas que nos progrès soient en vain. Il faut garder le cap si nous voulons rétablir la stabilité des prix pour la population canadienne.
Laissez-moi vous parler davantage de ces considérations et de quelques points qui ressortent des délibérations du Conseil de direction.
Depuis le début de l’année, la croissance mondiale a été plus forte que prévu. La baisse des prix de l’énergie et du taux d’augmentation des prix des biens ont aidé à freiner l’inflation dans le monde. Mais des pressions inflationnistes subsistent dans le secteur des services, alimentées par la robustesse de la demande et les tensions sur les marchés du travail. Nous estimons que la croissance économique mondiale en 2023 dépassera nos prévisions de janvier et d’avril.
La situation est similaire au Canada. L’économie a progressé avec une force étonnante et reste en situation de demande excédentaire. Les dépenses des consommateurs en services demeurent robustes. Quant aux dépenses en biens habituellement sensibles aux taux d’intérêt, elles ont ralenti, mais pas autant que nous nous y attendions. L’activité sur le marché du logement s’est aussi un peu redressée.
Plusieurs facteurs semblent soutenir les dépenses des ménages.
Le marché du travail est encore tendu, malgré quelques signes de détente. Le taux de chômage a légèrement augmenté, mais reste à un niveau historiquement bas, et la croissance des salaires s’est située entre 4 et 5 % pour plusieurs mois, ce qui est trop élevé pour assurer la stabilité des prix.
De nombreux ménages ont accumulé de l’épargne durant la pandémie de COVID-19. Certains ont depuis réduit leurs dépenses du fait que l’inflation et les taux élevés ont plombé leur budget, et d’autres peinent à joindre les deux bouts. Mais il est possible que beaucoup utilisent leur surplus d’épargne comme coussin et pour soutenir leurs dépenses.
La croissance démographique rapide contribue tant à l’offre qu’à la demande. Les nouveaux arrivants au Canada rejoignent la population active, venant pallier les pénuries de main-d’œuvre. En même temps, ils stimulent la consommation et soutiennent la demande de logements.
Parlons maintenant de l’inflation. Même si l’inflation mesurée par l’IPC a baissé relativement vite, cela reflète surtout les prix plus bas de l’énergie et les effets de glissement annuel, qui font que les fortes hausses de prix de l’an dernier n'entrent plus dans le calcul de l’inflation sur douze mois. Nos mesures privilégiées de l’inflation fondamentale – utilisées pour mesurer les pressions inflationnistes sous-jacentes – ont reculé, mais pas autant qu’escompté. Les taux d’inflation fondamentale sur trois mois se situent autour de 3½-4 % depuis septembre dernier, laissant supposer que la dynamique à la baisse est faible. Les attentes d’inflation à court terme exprimées par les consommateurs et les entreprises se modèrent, mais restent élevées. Par ailleurs, les entreprises indiquent qu’elles continuent d’augmenter leurs prix plus souvent qu’avant la pandémie.
Pour la suite, nous nous attendons encore à ce que la croissance économique se modère et que l’inflation descende, mais cela prendra plus de temps que nous l’avions prévu en janvier et en avril. Alors que l’activité économique mondiale ralentira et que les effets des taux d’intérêt plus élevés se feront sentir dans l’économie canadienne, la croissance économique devrait avoisiner 1 % en moyenne durant la deuxième moitié de 2023 et la première de 2024. Ainsi, nous nous attendons à ce que l’économie commence à afficher une modeste offre excédentaire au début de 2024, ce qui devrait alléger les pressions sur les prix. Nous prévoyons que l’inflation mesurée par l’IPC restera autour de 3 % pour l’année à venir, puis baissera graduellement avant d’atteindre la cible de 2 % au milieu de 2025, soit environ six mois plus tard que dans la projection d’avril.
Notre décision de relever le taux directeur reflète la persistance de la demande excédentaire et des pressions inflationnistes sous-jacentes, ainsi que nos perspectives pour l’activité économique et l’inflation. Le consensus au sein du Conseil de direction était que la politique monétaire devait être plus restrictive pour que l’inflation puisse revenir à la cible de 2 %.
Ce genre de décision n’est pas facile à prendre. Nous avons bel et bien discuté de la possibilité de ne pas changer les taux et de recueillir plus d’information pour valider la nécessité de les relever. En définitive, nous avons jugé qu’il y avait plus de risques que d’avantages à retarder notre action.
L’inflation élevée est un fardeau pour tout le monde, particulièrement les plus vulnérables. Nous sommes pleinement conscients que les hausses de taux créent une situation difficile pour une grande partie de la population canadienne. Et nous savons que beaucoup de gens se demandent si les taux vont arrêter de monter ou s’ils vont devoir monter encore plus pour alléger les pressions sur les prix. En bref, sachez que chacune de nos décisions repose sur les données les plus à jour dont nous disposons.
Nous pouvons toutefois dire que la politique monétaire fonctionne, et nous savons qu’il faudra plus de temps pour que les effets des hausses de taux d’intérêt passées se fassent pleinement sentir dans l’économie. Avec les hausses du taux directeur de juin et juillet, nous projetons que l’inflation va retourner graduellement à la cible de 2 %. Mais bien des choses doivent se produire pour que l’inflation continue à baisser, et nous sommes particulièrement préoccupés par deux risques à la hausse qui pèsent sur nos perspectives.
Tout d’abord, nous n’avions pas anticipé une telle persistance de la demande excédentaire et de l’inflation sous-jacente au Canada et dans le monde. Nous savons que les hausses de taux d’intérêt ont des effets dans l’économie, mais nous ne sommes pas certains de l’ampleur qu’ils auront. Ensuite, l’inflation s’est mise à descendre moins vite et nous prévoyons qu’elle se situera autour de 3 % pour l’année à venir. Nous sommes donc préoccupés par le risque que les progrès vers la stabilité des prix puissent stagner, et que l’inflation monte à nouveau si certains chiffres dépassent nos prévisions.
Comme je l’ai mentionné, nous nous efforçons de bien doser notre resserrement monétaire. Si de nouvelles données indiquent que nous devons en faire plus, nous sommes prêts à relever encore le taux directeur. Mais nous ne voulons pas en faire plus que nécessaire.
Nos prochaines décisions seront guidées par notre évaluation des nouvelles données et les perspectives d’inflation. Il faut que la progression de la demande ralentisse, que les pressions sur les salaires se modèrent et que les entreprises reviennent à des pratiques de fixation des prix normales. Il faut aussi que les attentes d’inflation à court terme et les mesures de l’inflation fondamentale descendent encore.
Permettez-moi maintenant de conclure. La baisse marquée de l’inflation depuis un an est une bonne nouvelle pour tout le monde au pays. Mais la politique monétaire a encore un rôle à jouer et nous ne pourrons pas crier victoire tant que l’inflation ne sera pas de retour à la cible de 2 %. Quand elle se maintient à ce niveau, l’inflation aide l’économie à croître de façon durable, en plus de rétablir les forces concurrentielles et d’offrir aux ménages canadiens la stabilité des prix nécessaire pour planifier leurs dépenses et leurs investissements en toute confiance.
Sur ce, la première sous-gouverneure et moi serons heureux de répondre à vos questions.
Rapport sur la politique monétaire – Juillet 2023
L’inflation au Canada et dans le monde a diminué. La Banque prévoit que l’inflation restera autour de 3 % au cours de la prochaine année et retournera à la cible de 2 % au milieu de 2025.
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Conférence de presse : Rapport sur la politique monétaire – Juillet 2023
Publication du Rapport sur la politique monétaire — Conférence de presse donnée par le gouverneur Tiff Macklem et la première sous-gouverneure, Mme Carolyn Rogers. (vers 11 h, heure de l’Est)