Bonsoir. Je suis ravi d’être ici en compagnie de la première sous-gouverneure Carolyn Rogers pour parler de notre récente annonce concernant le taux directeur et du Rapport sur la politique monétaire de la Banque du Canada.
En octobre, nous avons relevé le taux directeur de 50 points de base pour le faire passer à 3,75 %. Il s’agissait de la sixième hausse consécutive depuis mars. Nous nous attendons aussi à ce que le taux directeur doive encore augmenter. Et jusqu’où il augmentera dépendra de l’efficacité de la politique monétaire pour ralentir la demande, de la résolution des problèmes d’approvisionnement, et de la réaction de l’inflation et des attentes d’inflation au cycle de resserrement en cours.
Notre décision était le reflet de plusieurs considérations.
Premièrement, l’inflation au Canada reste élevée et généralisée, et reflète une forte progression des prix des biens et des services. Elle a diminué ces derniers mois, mais on attend encore une baisse globale des pressions sur les prix.
Deuxièmement, et ce facteur est lié au précédent, l’économie continue d’afficher une demande excédentaire – autrement dit, elle surchauffe. Le nombre de postes vacants a reculé par rapport à son sommet, mais demeure élevé, et les entreprises font encore état de pénuries de main-d’œuvre généralisées.
Troisièmement, les taux d’intérêt plus élevés commencent à peser sur la croissance. C’est de plus en plus évident dans les dépenses sensibles aux taux d’intérêt, comme le logement et les gros achats. Il faudra toutefois du temps pour que les effets des hausses de taux se propagent à l’ensemble de l’économie.
Quatrièmement, il n’y a pas de solution facile pour restaurer la stabilité des prix. Il faut que l’économie ralentisse pour rééquilibrer l’offre et la demande, et réduire les pressions sur les prix. Nous nous attendons à ce que la croissance stagne au cours des prochains trimestres – c’est-à-dire à ce qu’elle soit près de zéro. Mais, passé ce ralentissement, la croissance se redressera, notre économie progressera fortement, et le Canada bénéficiera de nouveau d’une inflation basse et prévisible.
En chiffres, cela signifie que la croissance du produit intérieur brut (PIB) devrait diminuer et passer d’environ 3¼ % cette année à tout juste en deçà de 1 % l’année prochaine, puis monter à 2 % en 2024. Et nous nous attendons à ce que l’inflation oscille autour de 7 % au dernier trimestre de cette année, descende à environ 3 % à la fin de l’année prochaine et retourne à la cible de 2 % à la fin de 2024.
Enfin, nous essayons de mettre en balance les risques liés à un resserrement trop faible ou trop fort.
Si nos interventions sont insuffisantes, les Canadiens continueront de subir les rigueurs d’une forte inflation. Et ils en viendront à s’attendre à ce que cette situation persiste. Si cela se produit, il faudra alors des taux d’intérêt beaucoup plus élevés et, possiblement, une profonde récession pour maîtriser l’inflation. Personne ne veut cela.
Si nous intervenons trop, nous pourrions ralentir l’économie plus que nécessaire. Et nous savons que cela entraverait la capacité des gens à assurer le service de leurs dettes, en plus de nuire à l’emploi et aux entreprises.
La phase actuelle de resserrement arrivera à sa fin. Bientôt, mais pas tout de suite.
Je veux aussi faire le point sur le bilan de la Banque, dont la taille diminue à mesure que se poursuit le resserrement quantitatif. Il avoisinait 415 milliards de dollars la semaine dernière, ce qui représente une baisse d’environ 28 % par rapport au sommet de 575 milliards de dollars atteint en mars 2021. Cette baisse est principalement attribuable à l’arrivée à échéance de nos opérations de pension et à la réduction de notre portefeuille d’obligations du gouvernement du Canada ayant fait suite aux décisions de mettre fin à l’assouplissement quantitatif en octobre 2021 et d’amorcer le resserrement quantitatif en avril de cette année.
Après s’être maintenus au-dessus de la moyenne pendant un certain temps, nos revenus d’intérêts nets entrent maintenant en territoire négatif. La Banque enregistrera des pertes durant une période, puis renouera avec des gains nets positifs. L’ampleur des pertes et la durée de l’épisode dépendront en fin de compte d’un certain nombre de facteurs, notamment la trajectoire des taux d’intérêt et l’évolution de l’économie et du bilan. Les pertes n’ont pas d’incidence sur notre capacité à assurer la conduite de la politique monétaire. Et je tiens préciser que nos décisions à cet égard sont guidées par nos mandats de stabilité des prix et de stabilité financière. Elles ne sont pas prises dans le but de maximiser nos revenus.
La Banque du Canada a pour mandat de veiller à maintenir l’inflation à un niveau bas, stable et prévisible. Nous sommes encore loin du but. Nous considérons les risques entourant notre prévision d’inflation comme étant raisonnablement équilibrés. Mais comme l’inflation est bien au-dessus de la cible, nous nous préoccupons particulièrement des risques à la hausse.
Nous savons qu’il est difficile pour bien des Canadiens et Canadiennes de s’adapter à des taux d’intérêt plus élevés. De nombreux ménages sont très endettés et les hausses de taux viennent alourdir leur fardeau. Nous ne voulons pas que cette transition soit plus difficile que nécessaire. Mais des taux plus élevés à court terme feront descendre l’inflation sur le long terme. La population canadienne cherche à se protéger contre l’augmentation des prix, et nous cherchons à la protéger contre une inflation durable. Revenir à une forte croissance et à un bas niveau d’inflation prendra un certain temps. Mais nous allons y arriver. Il faut traverser cette phase difficile pour revenir à la stabilité des prix et à une croissance économique soutenue, qui sont dans l’intérêt de tous.
La première sous-gouverneure Rogers et moi serons maintenant heureux de répondre à vos questions.