Résultats de l’enquête du 2e trimestre | Vol. 3.2 | 4 juillet 2022
La présente enquête a été menée du 28 avril au 13 mai 20221. Des entrevues de suivi ont été réalisées en juin.
Vue d’ensemble
- Les attentes d’inflation des consommateurs ont augmenté, en parallèle avec les préoccupations relatives aux prix des aliments, aux prix de l’essence et aux loyers. Pour l’horizon à court terme, ces attentes atteignent des sommets. Et pour le long terme, elles se sont nettement accrues au deuxième trimestre de 2022, retournant à leurs niveaux d’avant la pandémie de COVID‑19.
- La plupart des répondants croient que la Banque du Canada peut ramener l’inflation à la cible, quoique certains estiment qu’elle aura de la difficulté à y arriver.
- Les attentes voulant que l’inflation soit plus élevée et que les taux d’intérêt montent nuisent à la confiance des consommateurs. En conséquence, les Canadiens prévoient réduire leurs dépenses, et recherchent des options plus abordables lorsqu’ils magasinent.
- Les hausses salariales anticipées demeurent modestes. Cela dit, elles sont plus élevées parmi les travailleurs du secteur privé que ceux du secteur public. Les modalités de travail flexibles pourraient inciter davantage de personnes à entrer dans la population active. Certains répondants ont d’ailleurs souligné que le télétravail aidait à compenser certains des coûts liés à la montée de l’inflation.
Les attentes d’inflation ont augmenté pour tous les horizons
Les attentes d’inflation à l’horizon d’un an et de deux ans ont continué d’augmenter au deuxième trimestre de 2022 et atteignent un nouveau sommet historique (graphique 1, lignes bleue et jaune). Les consommateurs anticipent une forte montée des prix du côté de dépenses essentielles comme les aliments, l’essence et les loyers. Cela préoccupe particulièrement les personnes à faible revenu (encadré 1). Dans les entrevues de suivi, un répondant a qualifié les hausses des prix des aliments de « drastiques et inquiétantes ». Un autre a fait valoir que « depuis six mois, l’inflation a énormément augmenté dans presque toutes les sphères qui touchent la vie des gens ». La perception répandue est que l’inflation est désormais plus généralisée qu’auparavant.
Les Canadiens sont d’avis que les problèmes de chaîne d’approvisionnement, la pandémie de COVID‑19 et les dépenses publiques élevées sont responsables de la forte inflation (graphique 2). Ces facteurs sont aussi considérés comme plus persistants qu’aux derniers trimestres. Par exemple, davantage de répondants pensent maintenant qu’il faudra plus de deux ans pour régler les problèmes d’approvisionnement. Certains croient que la guerre en Ukraine ne se finira pas de sitôt et que, par conséquent, les prix plus élevés des aliments et de l’essence seront là longtemps. Dans l’ensemble, les consommateurs sont moins sûrs de l’évolution de l’inflation, et sont plus susceptibles d’avoir des avis divergents à ce sujet.
Graphique 1 : Les attentes d’inflation ont augmenté pour tous les horizons
Graphique 2 : Les consommateurs voient les problèmes de chaîne d’approvisionnement comme le principal obstacle à la maîtrise de l’inflation
Catégorie | 2022T1 | 2022T2 |
---|---|---|
Les problèmes de chaîne d’approvisionnement | 37,89 % | 41,76 % |
La persistance de la pandémie | 31,18 % | 23,7 % |
Les dépenses publiques élevées | 18,91 % | 22,92 % |
Malgré une baisse plus tôt durant la pandémie, les attentes d’inflation à long terme ont nettement monté au deuxième trimestre, retournant à leurs niveaux prépandémiques (graphique 1, ligne verte). Les Canadiens estiment que la probabilité que l’inflation reste élevée longtemps a augmenté.
Les consommateurs jugent que la Banque du Canada peut réduire l’inflation
La plupart des répondants ont indiqué que la Banque a la crédibilité et les outils nécessaires pour ramener l’inflation à la cible. Leur confiance dans la capacité de l’institution à remplir cet objectif n’a pas changé de façon notable par rapport à avant la pandémie (graphique 3).
Graphique 3 : Les Canadiens croient que la Banque peut atteindre la cible d’inflation
Catégorie | 2019T4 | 2022T2 |
---|---|---|
Jamais | 7,52 % | 11,67 % |
Parfois | 47,55 % | 46,16 % |
La plupart du temps | 40,25 % | 34,88 % |
Toujours | 4,67 % | 7,28 % |
La majeure partie des répondants savent que la Banque a relevé ses taux d’intérêt, et certains ont remarqué un ralentissement sur le marché du logement. Ces derniers sont plus convaincus que les autres que la Banque est capable de ramener l’inflation à la cible. Cependant, une part de consommateurs estime que la tâche sera difficile. De plus, beaucoup sont incertains des effets qu’auront les hausses de taux d’intérêt sur l’inflation, du fait qu’elles font aussi augmenter les coûts d’emprunt (graphique 4).
Graphique 4 : Beaucoup de répondants ne sont pas sûrs de l’impact des hausses du taux directeur sur l’inflation
Catégorie | % |
---|---|
Cela va faire baisser le taux d’inflation | 32,12 % |
Cela va faire augmenter le taux d’inflation | 24,6 % |
L’impact est incertain | 43,28 % |
Les attentes à l’égard d’une inflation plus élevée et de hausses de taux d’intérêt pèsent sur la confiance des consommateurs
La confiance des consommateurs est influencée par leur façon de voir différents aspects économiques de leur vie, qu’il s’agisse de leurs attentes quant à l’économie en général, de leurs revenus et situation d’emploi ou encore de la situation financière et des conditions de crédit de leur ménage. Le graphique 5 brosse un portrait sommaire de cette confiance en fonction des résultats d’une combinaison de questions d’enquête liées à ces aspects2.
Graphique 5 : La confiance des consommateurs est plus faible que d’habitude vis-à-vis de la croissance attendue des salaires réels et des conditions de crédit
Graphique 5 : La confiance des consommateurs est plus faible que d’habitude vis-à-vis de la croissance attendue des salaires réels et des conditions de crédit
Nota : Chaque ligne représente 0,5 écart-type par rapport à la moyenne historique.
Les réponses aux questions sur les attentes liées à la croissance des salaires réels et aux conditions de crédit montrent que la confiance des consommateurs est plus faible que d’habitude (graphique 5). L’indicateur de confiance relatif à la croissance des salaires réels est bien inférieur à sa moyenne historique. Les attentes à l’égard de la croissance des salaires demeurent près de 2 %. Autrement dit, les travailleurs ne croient pas que leurs hausses salariales vont suivre l’inflation. Ceux du secteur privé, qui représentent plus des deux tiers des répondants ayant un emploi, ont relevé ces attentes à environ 3 % au cours des derniers trimestres (graphique 6), tandis que ceux de la fonction publique continuent d’anticiper des gains modérés.
Graphique 6 : Les travailleurs du secteur privé anticipent de plus fortes hausses salariales que ceux du secteur public
L’indicateur de confiance relatif aux conditions de crédit est aussi sous sa moyenne historique. C’est parce que, comparativement à d’habitude, les consommateurs entrevoient :
- un accès au crédit plus difficile
- une probabilité accrue de ne pas pouvoir rembourser leurs dettes
- des taux d’intérêt plus élevés
La confiance à l’égard des conditions du marché du travail et des conditions économiques en général est forte, et dépasse la moyenne. En effet, les Canadiens ont une opinion positive de leur situation de travail et de l’économie dans son ensemble.
Les consommateurs prévoient dépenser nettement plus au cours des 12 prochains mois (graphique 7). Cette croissance des dépenses des ménages sera soutenue par le surplus d’épargne que certains ont accumulé pendant la pandémie. Comme au premier trimestre de 2022, ils ont l’intention de dépenser environ le quart de ce surplus au cours de 2022 et 2023.
Cependant, le volume d’achats, lui, pourrait baisser. En effet, même si les Canadiens s’attendent à ce que leurs dépenses montent, ils prévoient que les prix montent encore plus. Résultat : ils en auront moins pour leur argent. Une telle réduction du volume d’achats pourrait être liée en partie à la faiblesse inhabituelle de la confiance des consommateurs, du fait que les gens anticipent que les conditions de crédit vont se détériorer et que la croissance des salaires ne gardera pas le rythme avec l’inflation.
Graphique 7 : La croissance anticipée des dépenses ne suit pas les hausses de prix attendues
Les répondants ont indiqué que les hausses de taux d’intérêt auraient une incidence directe sur leurs dépenses (graphique 8). Parmi ceux ayant répondu qu’ils feraient quelque chose advenant une hausse d’un point de pourcentage :
- La plupart ont signifié qu’ils réduiraient leurs dépenses, épargneraient davantage, remettraient certains achats importants à plus tard et rembourseraient leurs dettes.
- Quelques-uns ont dit prévoir devancer des achats importants, comme une maison, un condo ou des meubles.
Dans les entrevues, certains consommateurs ont mentionné qu’ils avaient pu verrouiller le taux de leurs prêts automobiles ou hypothécaires avant les récentes hausses, ce qui les met un peu à l’abri des taux d’intérêt plus élevés à court terme. Mais ces mêmes personnes pensent également qu’elles seront durement touchées au moment de renouveler leurs emprunts si l’inflation reste forte et que les taux d’intérêt continuent de monter.
D’après les réponses recueillies dans le cadre des entrevues, les dépenses en services seraient moins sensibles aux taux d’intérêt plus élevés que celles en biens. Les répondants ont indiqué que même s’ils vont faire moins de gros achats, ils s’attendent à augmenter leurs dépenses en services à mesure que les restrictions sanitaires seront davantage assouplies et qu’ils seront moins préoccupés par la COVID‑19.
Graphique 8 : Face à des hausses de taux d’intérêt, les consommateurs réduiraient leurs dépenses et rembourseraient leurs dettes
Catégorie | % |
---|---|
Réduire les dépenses et épargner davantage | 22,78 % |
Remettre des achats importants à plus tard | 13,81 % |
Rembourser des dettes | 12,62 % |
Devancer des achats importants | 7,4 % |
Les modalités de travail flexibles pourraient attirer plus de gens sur le marché de l’emploi
Parmi les répondants âgés de 18 à 54 ans qui ne sont pas dans la population active, plus de la moitié ont dit qu’ils envisageraient de chercher un emploi s’ils avaient la possibilité de télétravailler ou d’avoir des modalités de travail flexibles (graphique 9). Dans les entrevues, certains ont indiqué que l’inflation élevée était l’un des facteurs qui rendent ces modalités si intéressantes, car le télétravail leur permettrait d’économiser en stationnement, en essence, en laissez-passer d’autobus, en lunchs et en vêtements.
Environ la moitié de ce groupe de répondants hors population active chercherait aussi un emploi si les salaires étaient meilleurs. Par ailleurs, dans les entrevues, des travailleurs bientôt en âge de prendre leur retraite ont précisé que le haut niveau d’inflation pourrait les forcer à continuer de travailler plus longtemps, car ils s’inquiètent que leur pension ne suive pas l’augmentation du coût de la vie.
Graphique 9 : Des modalités de travail flexibles et de meilleurs salaires pourraient accroître la participation au marché du travail
Catégorie | 18 à 54 ans | 55 à 70 ans |
---|---|---|
Je ne retournerais pas travailler, peu importe les conditions | 17,69 % | 75,15 % |
Capacité de travailler à partir de la maison | 53,79 % | 16,16 % |
Modalités de travail flexibles et/ou horaire de travail flexible | 54,56 % | 11,75 % |
Meilleur salaire | 46,89 % | 5,46 % |
Résolution des problèmes liés à la COVID-19 | 14,61 % | 6,13 % |
Travailler dans un autre secteur d’activité ou occuper un autre emploi | 13 % | 3,53 % |
Options de services de garde plus flexibles ou plus abordables | 15,08 % | 0,53 % |
Encadré 1 : L’inflation élevée met les consommateurs sous pression
L’inflation a monté pour les biens et services essentiels, soulevant des inquiétudes chez bon nombre de Canadiens. À l’épicerie, les importantes hausses de prix, de même que la réduction de la qualité des produits et de la taille des emballages, ne sont pas passées inaperçues. Certains groupes sont plus vulnérables que d’autres au renchérissement des produits essentiels. Les personnes âgées et celles à faible revenu sont davantage préoccupées par les prix de l’épicerie et les loyers que les répondants plus jeunes et les ménages mieux nantis (graphique 1‑A). Les jeunes consommateurs sont, quant à eux, plus susceptibles de s’en faire avec les prix des logements, du fait qu’ils envisagent peut-être l’achat d’une première maison.
Graphique 1-A : Les Canadiens à faible revenu sont plus préoccupés que les autres par les prix à l’épicerie et les loyers
Catégorie | Moins de 40 000 $ | De 40 000 à 100 000 $ | Plus de 100 000 $ |
---|---|---|---|
Épicerie | 59,82 % | 53,12 % | 49,03 % |
Essence | 13,82 % | 21,47 % | 25,38 % |
Prix des maisons | 8,13 % | 14,9 % | 16,8 % |
Loyer | 14,78 % | 5,45 % | 1,49 % |
Coûts liés à l’hypothèque | 1,9 % | 2,42 % | 4,47 % |
Voitures | 1,55 % | 2,64 % | 2,83 % |
Le graphique 1-B montre que les consommateurs, particulièrement ceux à faible revenu, adoptent différents changements pour s’adapter à l’inflation élevée :
- réduire leurs dépenses
- reporter des achats importants
- chercher des rabais plus souvent
- choisir des produits plus abordables
Les répondants à faible revenu ont été plus nombreux que ceux à revenu plus élevé à mentionner qu’ils réduiraient leurs dépenses discrétionnaires pour privilégier les produits de première nécessité, comme l’épicerie et l’essence. Par exemple, une personne a résumé sa situation ainsi : « Maintenant, mes dépenses sont plus axées sur des besoins que des désirs. » Les gens font plus souvent le tour des magasins pour trouver le meilleur prix, et font des réserves lorsqu’il y a des rabais. Certains ont mentionné qu’ils s’en tiennent à un budget strict pour l’épicerie et achètent plus de marques maison, ou qu’ils ont cessé d’acheter des choses jugées moins essentielles. D’autres s’en remettent davantage aux récoltes de leur potager ou à des modes de transport plus économiques, comme le vélo. Les Canadiens s’attendent à devoir apporter d’autres changements à leurs habitudes de consommation si l’inflation reste élevée encore longtemps. Les résultats de l’enquête montrent que ceux qui anticipent une plus forte inflation prévoient dépenser moins que les autres dans l’avenir et repoussent des dépenses importantes3.
Graphique 1-B : Les groupes à faible revenu ont plus à faire pour s’adapter à l’inflation élevée
Catégorie | Moins de 40 000 $ | De 40 000 à 100 000 $ | Plus de 100 000 $ |
---|---|---|---|
Je réduis mes dépenses | 60,77 % | 50,24 % | 45,02 % |
Je cherche des rabais, des bons de réduction | 60,64 % | 58,6 % | 50,86 % |
J’achète des produits et services plus abordables | 48,37 % | 46,88 % | 37,17 % |
Je remets certains achats à plus tard | 40,06 % | 33,37 % | 27,88 % |
Notes
- 1. L’enquête sur les attentes des consommateurs au Canada recueille l’opinion des ménages au sujet de l’inflation, du marché du travail et de leur situation financière. L’enquête du deuxième trimestre de 2022 a été réalisée en ligne du 28 avril au 13 mai 2022. Nielsen, entreprise spécialisée dans les études de marché, a mené des entrevues téléphoniques de suivi pour le compte de la Banque du Canada du 3 au 10 juin 2022. Des précisions sur le questionnaire et les réponses obtenues sont présentées dans le site Web de la Banque du Canada. Les résultats de l’enquête constituent un condensé des opinions exprimées par les répondants et ne reflètent pas forcément le point de vue de la Banque du Canada.[←]
- 2. La plupart des indicateurs sommaires sont une moyenne des réponses aux questions concernées de l’enquête, à l’exception de l’indicateur relatif à la croissance des salaires réels. Pour qu’on puisse comparer les résultats d’une question à l’autre, ceux-ci sont normalisés selon l’équation suivante : (résultat trimestriel - moyenne historique)/écart-type. Croissance des salaires réels : attentes à l’égard de la croissance des salaires dans 12 mois, moins attentes d’inflation au cours des 12 prochains mois; Conditions du marché du travail : probabilité de trouver un emploi dans les 3 mois suivant la perte de l’emploi principal, probabilité de quitter un emploi dans les 12 prochains mois, probabilité de perte d’emploi au cours des 12 prochains mois (effet négatif sur la confiance); Situation financière des ménages : croissance attendue du revenu global du ménage au cours des 12 prochains mois, croissance attendue des dépenses totales du ménage au cours des 12 prochains mois; Conditions de crédit : taux d’intérêt attendus dans 12 mois (effet négatif sur la confiance), solde des opinions sur la facilité ou difficulté accrue d’obtenir du crédit au cours des 12 prochains mois par rapport à maintenant, probabilité de ne pas être capable de faire un versement pour rembourser une dette au cours des 3 prochains mois; Conditions économiques générales (chaque question a été posée à la moitié des répondants) : probabilité que le taux de chômage au Canada soit plus bas qu’à l’heure actuelle dans 12 mois, probabilité que le taux de chômage au Canada soit plus élevé qu’à l’heure actuelle dans 12 mois (effet négatif sur la confiance), probabilité que le cours des actions du marché boursier soit plus élevé qu’à l’heure actuelle dans 12 mois, probabilité que le cours des actions du marché boursier soit plus bas qu’à l’heure actuelle dans 12 mois (effet négatif sur la confiance).[←]
- 3. Pour des précisions, voir M. Jain, O. Kostyshyna et X. Zhang (à paraître), How Do People View Price and Wage Inflation?, document de travail du personnel, Banque du Canada.[←]