Deux fois par an, la Banque du Canada effectue une enquête auprès d’experts en gestion des risques. Ces experts donnent leur avis sur les risques pesant sur le système financier canadien dans leur domaine respectif, sur la résilience du système, ainsi que sur les tendances naissantes qu’ils observent. Les résultats de l’enquête permettent de comparer les avis et les travaux d’analyse de la Banque avec les opinions externes, en plus d’aider le personnel de l’institution à trouver de nouveaux sujets de recherche et d’analyse.
L’enquête du printemps a été menée entre le 22 février et le 18 mars 2022 auprès de 52 répondants. L’invasion de l’Ukraine par la Russie est survenue pendant cette période. Les tensions entre ces pays reviennent donc souvent dans les réponses.
En plus des questions récurrentes, l’enquête comportait un ensemble de questions sur les risques potentiels associés à la normalisation de la politique monétaire dans le monde. Les participants au marché commençaient à revoir leurs attentes à ce sujet pendant la période où s’est tenue l’enquête. Par conséquent, le resserrement vigoureux de la politique monétaire est un autre thème important qui est ressorti.
Points saillants
- Les répondants croient que le risque qu’un choc perturbe le fonctionnement du système financier a augmenté depuis la dernière enquête en raison de préoccupations liées aux enjeux suivants :
- les risques géopolitiques grandissants;
- le retrait des mesures de soutien monétaire;
- l’inflation élevée.
- Les cyberincidents demeurent le principal risque auquel les organisations doivent faire face. Les tensions géopolitiques figurent au deuxième rang. En plus d’induire des risques pour chacune des organisations, ces risques concernent l’ensemble du système financier :
- une cyberattaque réussie contre une institution financière ou une infrastructure de marché financier importante pourrait causer des perturbations dans l’ensemble du système;
- les tensions géopolitiques pourraient influer sur l’évaluation des prix des actifs risqués dans le monde, ce qui toucherait une variété d’investisseurs et d’émetteurs.
- De façon générale, les répondants s’inquiètent des répercussions que pourrait avoir la réalisation de scénarios imprévus de normalisation de la politique monétaire sur leurs organisations. Les répondants sont d’avis que :
- une normalisation plus rapide que prévu pourrait entraîner une récession et une réévaluation des prix des actifs risqués;
- une normalisation plus lente que prévu mènerait initialement à un niveau d’inflation plus élevé, mais elle pourrait être suivie d’une correction énergique de la politique monétaire entraînant une récession et une réévaluation des prix des actifs risqués plus prononcées.
- Pour se préparer à ces scénarios, certains répondants ont réduit leur exposition au risque ou fait en sorte de disposer de suffisamment de liquidités.
- Si la normalisation de la politique monétaire se déroulait de façon imprévue, un certain nombre de gestionnaires d’actifs, d’assureurs et de banques1 comptent :
- soit réduire leur exposition au risque;
- soit être plus sélectifs au moment d’accroître leur exposition aux actifs risqués.
Risques pesant sur le système financier
Risque global perçu et confiance
Les répondants croient que la probabilité qu’un choc perturbe le fonctionnement du système financier s’est accrue depuis la dernière enquête (graphique 1). Ils pensent aussi que cette probabilité a augmenté davantage à court terme (sur une période de moins d’un an) qu’à moyen terme (période de 1 à 3 ans). Les répondants ont évoqué des raisons semblables pour les deux horizons, dont :
- les risques géopolitiques grandissants;
- le retrait des mesures de soutien monétaire;
- l’inflation élevée.
Graphique 1 : Risque à court et à moyen terme que survienne un choc susceptible de perturber le système financier canadien
Nota : Pondérations de l’indice de risque : totalement improbable : 0 point; peu probable : 1 point; plutôt probable : 2 points; assez probable : 3 points; très probable : 4 points. Cette question est posée depuis l’enquête de l’automne 2021.
Source : Banque du Canada
Malgré tout, la confiance des répondants dans la résilience du système financier canadien est tout de même à son plus haut niveau depuis la première enquête sur le système financier (graphique 2). Les raisons fournies à ce sujet étaient cohérentes avec celles de l’enquête de l’automne 2021 :
- la bonne dotation en capital du secteur bancaire;
- la bonne réglementation du système financier;
- les mesures prises par les autorités budgétaires et monétaires en réaction à la pandémie.
Certains répondants continuent de s’attendre à ce que les autorités budgétaires et monétaires soutiennent les marchés en cas de grand choc négatif.
Cependant, quelques répondants ont exprimé des préoccupations quant à la capacité des autorités budgétaires et monétaires de réagir à de nouveaux chocs vu les niveaux déjà élevés de la dette publique et des bilans des banques centrales.
Graphique 2 : Confiance dans la capacité du système financier canadien de résister à un choc important
Graphique 2 : Confiance dans la capacité du système financier canadien de résister à un choc important
Nota : Pondérations de l’indice de confiance : pas du tout sûr : 0 point; pas très sûr : 1 point; plutôt sûr : 2 points; très sûr : 3 points; absolument sûr : 4 points. Il n’y a pas eu d’enquête sur le système financier au printemps 2020 en raison de la pandémie de COVID‑19.
Source : Banque du Canada
Les risques les plus importants
Les répondants à l’enquête devaient classer par ordre d’importance les trois risques qui, à leur avis, auraient les retombées les plus négatives sur leur organisation, si jamais ils se matérialisaient. Ils ont également rattaché chacun de ces risques à une catégorie générale. Le graphique 3 présente les trois plus importantes catégories de risques, ordonnées selon leur indice de risque, soit une mesure pondérée de la fréquence de classement des risques par les participants.
Les répondants ont changé l’ordre d’importance des risques pour leur organisation depuis l’enquête de l’automne 2021. Les risques externes restent au premier rang, malgré une légère baisse de leur indice. Les risques économiques et politiques internationaux ont connu la hausse la plus marquée et se trouvent maintenant au deuxième rang. Les risques macroéconomiques pour le Canada ont aussi augmenté et se placent au troisième rang. En même temps, l’indice des risques liés à l’évaluation du prix des actifs a diminué.
Graphique 3 : Principaux risques pour votre organisation
Graphique 3 : Principaux risques pour votre organisation
Nota : Pondérations de l’indice de risque : 1er choix : 3 points; 2e choix : 2 points; 3e choix : 1 point.
Source : Banque du Canada
Les trois plus importantes catégories de risque sont les suivantes :
- Risques externes – il s’agit principalement du risque de cyberincident. Les banques et les assureurs considèrent les cyberincidents comme étant les risques les plus importants pour eux. Les répondants gèrent les risques de cyberincident :
- en investissant de manière soutenue dans la cybersécurité;
- en formant leurs employés;
- en sous-traitant certains processus liés aux technologies de l’information.
- Risques économiques et politiques internationaux – il s’agit principalement de tensions géopolitiques. Les gestionnaires d’actifs et de fonds de pension considèrent les tensions géopolitiques comme étant les risques les plus importants pour eux. Les tensions géopolitiques les plus fréquemment mentionnées sont liées à l’invasion de l’Ukraine par la Russie. Les répondants ont déclaré n’avoir aucune ou très peu d’exposition directe à la Russie, mais ils ont exprimé des inquiétudes quant aux retombées géopolitiques potentielles. Par exemple, si la Chine :
- appuyait la Russie et faisait face à des sanctions économiques;
- envahissait Taiwan.
- Risques macroéconomiques pour le Canada – L’inflation élevée et la faible croissance économique ont été les risques les plus souvent mentionnés dans cette catégorie. Certains des répondants gèrent ces risques :
- en recourant davantage à des mécanismes de protection contre l’inflation, y compris via leur exposition à des actifs privés;
- en diversifiant leur exposition à différents types d’actifs pour atténuer le risque de marché.
- ralenti la croissance à l’échelle mondiale;
- augmenté l’inflation en raison du renchérissement des produits de base;
- perturbé davantage les chaînes d’approvisionnement.
Les trois principaux risques auxquels sont confrontées les organisations concernent également l’ensemble du système financier :
- Comme on en faisait état dans la Revue du système financier de 2021, une cyberattaque réussie contre une grande institution financière ou une infrastructure de marché financier pourrait causer des perturbations dans l’ensemble du système financier, compte tenu de toutes ses interconnexions.
- Les tensions géopolitiques pourraient causer une détérioration des conditions financières et une réévaluation des prix des actifs risqués dans le monde. Par exemple, dans le Rapport sur la politique monétaire d’avril 2022, on indiquait que la guerre en Ukraine avait d’abord entraîné :
- un creusement des écarts de crédit sur les obligations de sociétés;
- une forte chute des indices boursiers.
- Une forte hausse des attentes d’inflation pourrait entraîner une réévaluation des prix des actifs risqués et, possiblement, une récession. Pour des précisions, voir la section sur les risques potentiels découlant de la normalisation de la politique monétaire.
Changements naissants
Les répondants ont aussi signalé des changements naissants que leur organisation a commencé à surveiller dans la dernière année. Bon nombre de ces changements étaient semblables aux trois principaux risques qu’ils ont mentionnés, dont les risques géopolitiques et l’inflation élevée. Les autres changements naissants incluaient :
- Les technologies financières ou le système bancaire ouvert – Certains répondants se sont dits inquiets de perdre des parts de marché si leur organisation n’est pas en mesure de faire concurrence aux entreprises de technologies financières ou de collaborer avec elles.
- Les actifs numériques et les cryptoactifs – Certains répondants ont indiqué que la désintermédiation bancaire et les cybermenaces et fraudes sont des sources de préoccupation pour leur organisation. D’autres ont mentionné la volatilité des cryptoactifs.
- Le recrutement et la fidélisation des employés de talent – Certains répondants ont signalé avoir de la difficulté à attirer des employés et à les maintenir en poste.
Risques potentiels découlant de la normalisation de la politique monétaire
Nous avons invité les participants au marché à nous faire part de leurs points de vue au sujet des risques possibles associés à la normalisation de la politique monétaire. Nous avons présenté aux répondants deux scénarios s’écartant de la trajectoire attendue. Nous leur avons ensuite demandé de choisir celui qui nuirait le plus à leur organisation et d’expliquer :
- comment ce scénario se répercuterait sur les marchés financiers;
- comment ils se sont préparés à ce scénario;
- comment ils adapteraient leurs stratégies si ce scénario se concrétisait.
Incidence d’un scénario de normalisation imprévu de la politique monétaire
Parmi les répondants, 92 % ont indiqué qu’une normalisation inattendue de la politique monétaire aurait des effets négatifs sur leur organisation (graphique 4).
- D’après 61 % des répondants, une normalisation plus rapide que prévu entraînerait les retombées négatives les plus importantes pour leur organisation. Selon eux, ce scénario pourrait provoquer :
- une diminution de la demande de biens et services;
- une hausse du chômage;
- une éventuelle récession.
- Selon 31 % des répondants, une normalisation plus lente que prévu entraînerait les retombées négatives les plus importantes pour leur organisation. Ils craignaient que ce scénario mène initialement à un niveau d’inflation plus élevé, ce qui pourrait réduire la crédibilité des banques centrales et se traduire par un désarrimage des attentes d’inflation. Dans ce contexte, un resserrement de la politique monétaire pourrait être entrepris de manière énergique en vue d’endiguer l’inflation, ce qui pourrait donner lieu par la suite à une récession encore plus grave.
Dans les deux scénarios, les répondants s’inquiétaient principalement des effets d’un resserrement rapide de la politique monétaire. Cependant, les points de vue divergeaient quant au moment du resserrement et à ses effets sur l’économie.
Par ailleurs, 8 % des répondants étaient d’avis qu’aucun des scénarios n’aurait d’effets négatifs sur leur organisation. Ces répondants représentaient principalement des bourses de valeurs et des chambres de compensation, des plateformes de négociation et d’autres infrastructures de marchés financiers ayant déclaré ne pas être exposées directement à des actifs risqués. Certains pensaient même que la volatilité accrue entraînée par ces scénarios pourrait être avantageuse pour leur organisation en raison de l’augmentation du volume des transactions.
Graphique 4 : Scénario de normalisation de la politique monétaire qui entraînerait les retombées négatives les plus importantes pour votre organisation
Graphique 4 : Scénario de normalisation de la politique monétaire qui entraînerait les retombées négatives les plus importantes pour votre organisation
Nota : La catégorie « Autre » comprend les agences de notation, les coopératives de crédit, les bourses et chambres de compensation, les sociétés de financement et de fiducie, et les institutions publiques. Pour l’enquête du printemps 2022, la catégorie « Banques » comprend les courtiers.
Source : Banque du Canada
Les participants s’attendent à ce que les scénarios de normalisation de la politique monétaire, qu’ils soient plus rapides ou plus lents que prévu, mènent à une réévaluation des actifs risqués (graphique 5). Ce point de vue concorde avec celui présenté dans la Revue du système financier de 2021, dans laquelle le retrait plus tôt que prévu des mesures de soutien monétaire à l’échelle mondiale est décrit comme un facteur susceptible de provoquer une réévaluation des actifs risqués.
Après la réalisation de l’un ou l’autre de ces scénarios, les répondants s’attendent à ce que :
- les écarts de financement et de crédit se creusent;
- les prix des actions cotées en bourse se replient;
- les devises des économies de marché émergentes se déprécient par rapport à celles des économies avancées.
Les deux scénarios présentent toutefois trois grandes différences :
- Les répondants s’attendent en général à ce que la pente de la courbe des rendements des obligations d’État s’applatisse à la suite d’une normalisation plus rapide que prévu, sous l’effet de la majoration des taux directeurs et de la diminution des attentes concernant la croissance.
- En revanche, dans le scénario d’une normalisation plus lente que prévu, les répondants pensent en général que la pente de la courbe des rendements devrait s’accentuer, car cela refléterait des taux directeurs futurs supérieurs après une période initiale d’inflation élevée et le désarrimage des anticipations d’inflation.
- Par rapport au scénario plus rapide que prévu, dans le scénario plus lent que prévu :
- les prix des actions devraient diminuer dans une moindre mesure;
- les écarts de crédit devraient s’élargir dans une moindre mesure.
- Les prix de l’immobilier devraient baisser à la suite d’une normalisation plus rapide que prévu. Par contre, les attentes concernant les variations de prix consécutives à une normalisation plus lente que prévu sont constrastées. En effet, dans ce scénario, on n’anticipe pas de changement marqué des prix dans l’ensemble. Ce résultat est possiblement dû aux différences quant à l’horizon d’évolution des variables de marché que les répondants ont pris en compte en répondant à la question.
Graphique 5 : Variation des variables de marché escomptée un trimestre après la réalisation inattendue d’un scénario de normalisation de la politique monétaire
Graphique 5 : Variation des variables de marché escomptée un trimestre après la réalisation inattendue d’un scénario de normalisation de la politique monétaire
Nota : Les pondérations de cet indice sont les suivantes : baisse importante : -2 points; légère baisse : -1 point; aucun changement : 0 point; légère hausse : 1 point; hausse importante : 2 points. Les barres quadrillées signalent des écarts importants entre les réponses. EME signifie économies de marché émergentes, EA, économies avancées, et CDOR, Canadian Dollar Offered Rate. La catégorie « gouvernement » couvre les rendements des obligations du Trésor américain et du gouvernement du Canada, compte tenu de la forte similitude entre leurs variations escomptées.
Source : Banque du Canada
Les répondants ont des attentes semblables à l’égard des variables de marché dans les deux scénarios, mais, là encore, sur différents horizons. Par conséquent, nous combinons les réponses pour les deux scénarios dans le reste du rapport.
Les participants au marché ont indiqué qu’une normalisation inattendue de la politique monétaire aurait des répercussions négatives sur leur organisation selon différents canaux. Certains ont mis en place des stratégies pour atténuer ces effets potentiels :
- Les gestionnaires d’actifs seraient les plus lourdement touchés par un élargissement des écarts de crédit sur les obligations de bonne qualité et par une baisse du cours des actions. Par conséquent, certains ont réduit :
- leur exposition aux actions cotées en bourse et au risque de crédit;
- la duration de leurs portefeuilles de titres à revenu fixe.
- Les fonds de pension seraient les plus lourdement touchés par une baisse du cours des actions et des prix de l’immobilier commercial. Ils comptent atténuer les risques :
- en faisant appel à des stratégies prudentes de gestion des liquidités, notamment en utilisant des tests de résistance pour les chocs de liquidité importants;
- en recourant à des stratégies permettant de couvrir les risques extrêmes;
- en réduisant leur recours au levier financier;
- en accroissant leur proportion d’actifs offrant des flux de revenus stables.
- Les banques seraient les plus lourdement touchées par une baisse des prix de l’immobilier résidentiel et commercial. Elles comptent atténuer les risques :
- en appliquant des critères d’octroi de prêts plus stricts;
- des stratégies prudentes pour la gestion du risque de liquidité.
- Selon leur modèle d’affaires, les assureurs se sont dits préoccupés par différentes variables de marché.
- Les sociétés d’assurance-vie croient qu’une hausse des rendements des obligations d’État à 10 ans auraient les effets les plus importants pour elles, et elles ont utilisé l’appariement de la duration comme stratégie de gestion des risques.
- Les sociétés d’assurances multirisques s’attendent à ce qu’une baisse des cours des actions ait la plus forte incidence et ont donc réduit leur exposition aux actions cotées en bourse.
- Certains répondants ont déclaré que les facteurs suivants ont influencé leur degré de gestion des risques :
- les coûts et la diminution des rendements attendus dans des conditions de marché stables;
- les faibles probabilités de réalisation de l’un ou l’autre de ces scénarios.
Stratégies suivant la réalisation d’un scénario imprévu de normalisation de la politique monétaire
Les répondants adapteraient leur stratégie différemment en cas de réalisation d’un scénario imprévu de normalisation de la politique monétaire (graphique 6).
- Globalement, les gestionnaires d’actifs ne changeraient pas de stratégie. Toutefois, les réponses individuelles étaient constrastées :
- Certains répondants :
- réduiraient leur levier financier
- diminueraient leur exposition au risque de crédit
- augmenteraient la liquidité de leur portefeuille
- D’autres rehausseraient leur exposition au risque en augmentant soit :
- la proportion des actifs risqués qu’ils gèrent;
- la duration de leur portefeuille de titres à revenu fixe.
- Certains répondants :
Ces diverses stratégies pourraient témoigner de différences selon les clients. Les gestionnaires d’actifs dont les clients ont un horizon de placement à long terme peuvent être moins exposés aux rachats ou à d’autres besoins de liquidité. Il se peut donc qu’ils aient plus de latitude pour augmenter leur exposition au risque en cas de normalisation inattendue de la politique monétaire2.
- En règle générale, les banques et les assureurs comptent :
- soit réduire leur exposition au risque pour accroître la liquidité;
- soit être plus sélectifs au moment d’accroître leur exposition aux actifs risqués.
Ce redoublement de prudence chez ces acteurs peut se manifester par un ralentissement de la prise de risques supplémentaires, un relèvement du seuil d’octroi des prêts ou par une préférence pour des actifs de meilleure qualité, comme les obligations d’État.
- Les fonds de pension tendent à réagir de manière contracyclique, profitant de l’occasion pour s’exposer davantage aux actifs risqués, vendus à un prix plus avantageux. Certains gestionnaires de fonds de pension ont indiqué qu’ils commenceraient par acheter des actions cotées en bourse puis qu’ils augmenteraient progressivement leur exposition aux actifs privés.
Graphique 6 : Variation de stratégie escomptée un trimestre après la réalisation inattendue d’un scénario de normalisation de la politique monétaire
Graphique 6 : Variation de stratégie escomptée un trimestre après la réalisation inattendue d’un scénario de normalisation de la politique monétaire
Nota : Les pondérations de l’indice d’ajustement sont les suivantes : augmentation de l’exposition au risque : -1; aucun changement : 0; plus grande sélectivité ou atténuation de l’exposition au risque : 1. Le trait plein représente le niveau de l’indice d’ajustement signalant aucun changement. Pour l’enquête du printemps 2022, la catégorie « Banques » comprend les courtiers.
Source : Banque du Canada
Quand les participants au marché qui ont l’intention de réduire leur exposition au risque vendent des actifs, les conditions de liquidité du marché sont susceptibles de se détériorer s’ils vendent plus d’actifs que ce que les banques sont capables de prendre en charge. Pour des précisions à ce sujet, voir la partie « Vulnérabilité 4 : la capacité du marché à répondre à une forte demande potentielle de liquidités » de la Revue du système financier de 2021.
Les fonds de pension et certains gestionnaires d’actifs qui comptent réagir de manière contracyclique pourraient néanmoins acheter les actifs que proposent d’autres participants au marché. Les différences en ce qui concerne les montants et les moments où se dérouleraient les transactions entre les acheteurs et les vendeurs, mais aussi en ce qui concerne les types d’actifs échangés, pourraient limiter le volume des transactions se compensant mutuellement :
- Les acteurs du marché qui souhaitent vendre des actifs risqués pourraient avoir besoin de le faire rapidement, tandis que ceux qui comptent acheter davantage d’actifs risqués pourraient préférer le faire de manière graduelle3.
- Les participants au marché qui ont l’intention d’augmenter leur exposition au risque pourraient le faire dans des proportions différentes de celles des vendeurs d’actifs risqués.
- La plupart des gestionnaires de fonds de pension ont indiqué qu’ils comptaient d’abord acquérir des actions cotées en bourse, puis des actifs privés; il se peut toutefois que d’autres participants au marché vendent des actifs différents.
En raison de ces différences potentielles, les marchés pourraient subir des tensions pendant un certain temps après la réalisation d’un scénario imprévu de normalisation de la politique monétaire.
Notes
- 1. En ce qui concerne l’enquête sur le système financier du printemps 2022, la catégorie « Banques » comprend les courtiers.[←]
- 2. Pour savoir comment les fonds communs de placement canadiens ont fait face à de fortes demandes de rachat pendant la pandémie, voir G. Ouellet Leblanc et R. Shotlander (2020), Ce que la pandémie nous a appris sur la résilience des fonds obligataires, note analytique du personnel no 2020-18, Banque du Canada.[←]
- 3. Pour comprendre comment la plupart des fonds de pension ont repoussé le rééquilibrage jusqu’en avril 2020 au lieu d’agir de manière contracyclique au début du choc de la COVID‑19 en mars 2020, voir G. Bédard-Pagé, D. Bolduc, A. Demers, J.-P. Dion, M. Pandey, L. Berger-Soucy et A. Walton (2021), COVID‑19 Crisis: Liquidity Management at Canada’s Largest Public Pension Funds, note analytique du personnel no 2021-11, Banque du Canada.[←]