Assurer la stabilité et l’efficacité du système financier est un aspect essentiel du mandat de la Banque du Canada. Ainsi, l’institution s’emploie à analyser les changements structurels qui influent sur l’économie, comme les changements climatiques. Ces changements pourraient en effet accroître les vulnérabilités du système financier.
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Les changements climatiques exposent le système financier et l’économie à des risques importants. Ces risques comprennent les perturbations découlant de phénomènes météorologiques extrêmes plus fréquents et plus violents, ainsi que les risques liés à la transition vers une économie à faibles émissions de carbone ou carboneutre.
La transition vers une économie sobre en carbone implique de mener des travaux sur plusieurs fronts : mesures internationales, innovations technologiques, finance plus durable, grands changements socio-économiques, etc. Ces efforts pour décarboner l’économie ouvrent des possibilités en matière d’investissement et de croissance verte, mais ils présentent aussi des risques.
Le présent rapport traite de ces risques de transition. Pour le secteur financier, une évaluation erronée du prix des risques pourrait exposer les institutions financières et les investisseurs à des pertes soudaines et importantes. Elle pourrait également retarder les investissements qui sont nécessaires pour atténuer les effets des changements climatiques.
À la fin de 2020, la Banque du Canada et le Bureau du surintendant des institutions financières (BSIF) ont annoncé des plans en vue de mener un projet pilote novateur avec la collaboration de certaines des principales institutions financières du Canada. Les grands objectifs de ce projet étaient les suivants :
- créer la capacité pour les autorités et les institutions financières d’analyser des scénarios de transition climatique;
- aider le secteur financier canadien à mieux évaluer et communiquer les risques climatiques;
- améliorer la compréhension de l’exposition potentielle du secteur financier aux risques associés à la transition climatique.
Le rapport final du projet a été publié le 14 janvier 2022.
Notre approche
Les risques climatiques sont difficiles à évaluer avec exactitude :
- Ils concernent le long terme et dépendent de l’évolution incertaine des politiques et des facteurs socio-économiques.
- Ils sont présents à l’échelle de la planète et de l’économie.
- Ils sont complexes et varient d’une région et d’un secteur à l’autre.
Pour surmonter ces difficultés, la Banque et le BSIF ont eu recours à l’analyse de scénarios – une approche novatrice visant à mieux comprendre les risques de transition. Les scénarios utilisés dans le cadre du projet pilote explorent différentes avenues pour réduire les émissions de gaz à effet de serre et leurs répercussions négatives sur l’économie et le système financier. Ils intègrent également diverses hypothèses concernant les politiques climatiques et le rythme des changements technologiques.
Cette approche met à profit l’expertise que la Banque a acquise dans le cadre des travaux de recherche de son personnel et de sa participation au Réseau des banques centrales et des superviseurs pour le verdissement du système financier. Plus récemment, la Banque a contribué à plusieurs publications visant à mieux comprendre globalement l’incidence des changements climatiques sur le système financier et l’économie mondiale.
Il est important de noter que les scénarios utilisés dans le cadre du projet pilote sont purement indicatifs. Ils montrent les tensions potentielles sur l’économie et le système financier. Il ne s’agit aucunement de prédictions ou de prévisions, ni de tests de résistance d’institutions financières.
De plus, les scénarios sont intentionnellement axés sur les risques de transition, plutôt que sur les risques physiques. Ces risques physiques, ainsi que les mesures visant à les atténuer ou à les éviter, pourraient aussi avoir une incidence notable sur les économies mondiale et canadienne et sur le système financier. D’autres travaux seront réalisés à ce sujet.
Principaux constats
Les institutions participantes ont utilisé des scénarios de transition climatique afin d’explorer de nouvelles méthodes pour évaluer les risques financiers liés aux changements climatiques. Cet exercice a mis en évidence le besoin de concevoir des manières cohérentes d’analyser et de communiquer les risques climatiques. Il a aussi permis aux participants de cibler des lacunes dans les données et de mieux saisir les impacts de la transition climatique sur leurs portefeuilles.
Les scénarios de transition climatique élaborés dans le cadre du projet pilote ont montré que l’ensemble de l’économie subira des changements structurels profonds à mesure que tous les pays effectuent leur transition vers la carboneutralité. Une vaste restructuration pourrait s’avérer nécessaire dans de nombreux secteurs pour assurer l’atteinte des cibles climatiques.
Pour les pays exportateurs de produits de base, comme le Canada, la transition comporte également des risques de répercussions profondes au niveau macroéconomique. Ces dernières sont principalement attribuables aux baisses des prix mondiaux des produits de base découlant des changements apportés aux politiques climatiques mondiales.
Le projet pilote a aussi mis en lumière le rôle important que joue l’innovation, par exemple pour intensifier le développement de technologies d’énergie renouvelable.
Et il est ressorti clairement de l’exercice que, peu importe la trajectoire choisie, une intervention différée accentue les risques pour le secteur financier et l’ensemble de l’économie.
Bien que le rapport ne contienne pas de recommandations de politiques précises, il apporte une contribution importante aux efforts déployés par la Banque pour mieux comprendre et modéliser les répercussions économiques et financières des changements climatiques.
Perspectives d’avenir
Les institutions et autorités financières commencent à peine à mettre sur pied leurs capacités d’évaluation des risques associés aux changements climatiques. Globalement, cet exercice a été un premier pas important pour les aider à améliorer leur aptitude à analyser ces risques financiers. Elles seront ainsi mieux placées pour mesurer leur exposition aux risques liés à la transition climatique, et pourront évaluer les occasions d’affaires stratégiques découlant du passage à une économie carboneutre ou à faibles émissions de carbone.
Pour soutenir les efforts à cet égard du secteur financier dans son ensemble, deux documents complémentaires accompagnent le rapport du projet pilote. Ils décrivent en détail les méthodes d’évaluation des risques financiers utilisées dans le cadre du projet, ainsi que le mode d’élaboration et les résultats des scénarios de transition climatique. La Banque publie aussi les données des scénarios qui ont été recueillies durant l’exercice.