Résultats de l’enquête du quatrième trimestre | Vol. 18.4 | 17 janvier 2022

Selon les résultats de l’enquête sur les perspectives des entreprises du quatrième trimestre de 2021, les goulots d’étranglement dans les chaînes d’approvisionnement ainsi que les pénuries de main-d’œuvre demeurent répandus. Les entreprises ont fait état d’une croissance robuste de la demande, quoique celles qui offrent des services où la distanciation est difficile enregistrent toujours des ventes inférieures à ce qu’elles étaient avant la pandémie, même avant que le variant omicron ne commence à se propager un peu partout. L’effet combiné d’une demande forte et des contraintes du côté de l’offre devrait exercer des pressions à la hausse sur les prix au cours de la prochaine année.

Vue d’ensemble

  • Les entrevues de l’enquête ont été réalisées avant la montée rapide des cas de COVID‑19 causée par le variant omicron.
  • Dans l’ensemble, un nombre croissant d’entreprises ont noté une reprise solide des ventes, soutenue par le renforcement de la demande intérieure et étrangère. À mesure que les restrictions sur les activités en personne ont été assouplies, les ventes des entreprises fournissant des services où la distanciation est difficile à respecter se sont redressées, mais restent inférieures aux niveaux prépandémie. Les perspectives des entreprises qui se sont bien tirées d’affaire pendant la pandémie demeurent robustes.
  • Parallèlement, davantage d’entreprises disent subir les effets des pénuries de main-d’œuvre et des perturbations des chaînes d’approvisionnement, qui continuent de peser sur leurs ventes. Les pressions sur la capacité se font largement sentir.
  • Pour faire face à ces pressions, la plupart des entreprises dans l’ensemble des secteurs et des régions sont prêtes à accroître leurs investissements et prévoient augmenter les salaires pour être en mesure d’attirer des travailleurs et de retenir leur personnel. Beaucoup s’attendent aussi à une hausse des prix de vente dans les six prochains mois, en raison des contraintes d’approvisionnement.
  • Les attentes d’inflation pour les deux prochaines années ont continué de s’accroître. La majorité des entreprises pensent que les pressions inflationnistes élevées s’apaiseront et que l’inflation retournera près de la cible de 2 % d’ici un à trois ans.

Les marchés du travail continuent de se resserrer

Davantage d’entreprises font état d’un resserrement des marchés du travail. Environ quatre entreprises sur dix disent que les pénuries de main-d’œuvre freinent leurs ventes. De plus, les répondants ont indiqué que les pénuries de main-d’œuvre continuent de s’intensifier dans l’ensemble des régions et des secteurs et dans de nombreux métiers (graphique 1). Selon eux, trois facteurs sont en grande partie responsables de ce resserrement des marchés :

  • la vigueur de la demande de main-d’œuvre;
  • des problèmes structurels comme le vieillissement de la population et les changements technologiques qui nécessitent de nouvelles compétences;
  • l’évolution des préférences des travailleurs en faveur d’un horaire flexible et de la possibilité de télétravailler.

Les entreprises croient que certains de ces facteurs pourraient avoir un effet durable, susceptible de provoquer des tensions persistantes sur les marchés du travail. Elles ont également fait mention d’autres facteurs qui ont limité l’offre de main-d’œuvre, mais qui commencent à s’atténuer. Il s’agit de facteurs relativement passagers et liés à pandémie, comme les programmes gouvernementaux de soutien du revenu et la réduction des niveaux d’immigration.

Graphique 1 : Environ les trois quarts des entreprises notent une intensification des pénuries de main-d’œuvre

De nombreux répondants font état de perturbations dans les chaînes d’approvisionnement

Un nombre croissant de répondants ont affirmé que les perturbations des chaînes d’approvisionnement limiteraient leur capacité à répondre à une demande accrue (graphique 2). Les goulots d’étranglement du côté de l’offre se traduisent par :

  • une insuffisance des principaux intrants;
  • un manque de biens disponibles à la vente;
  • un accès réduit aux marchés pour certains exportateurs.

Ces perturbations freinent les ventes d’environ le tiers des entreprises. Les répondants ont de nouveau indiqué que les problèmes liés aux chaînes d’approvisionnement sont attribuables aux effets de la pandémie dans d’autres pays, aux difficultés dans les ports ainsi qu’à d’autres difficultés logistiques. Les inondations survenues en Colombie-Britannique ont également aggravé la situation. Dans la mesure du possible, les entreprises réagissent en conservant davantage de stocks, surtout dans les secteurs du commerce et de la fabrication.

Graphique 2 : Les goulots d’étranglement dans les chaînes d’approvisionnement et les obstacles liés à la main-d’œuvre continuent de s’accroître

Les entreprises ne savent pas trop quand ces problèmes liés aux chaînes d’approvisionnement seront réglés, mais beaucoup pensent qu’il faudra plus d’un an pour que la situation revienne à la normale. Selon elles, des facteurs comme les variants du coronavirus et les pénuries d’intrants persistantes causées par les contraintes de transport mondiales risquent de ralentir la reprise.

La vigueur de la demande s’est généralisée

Les résultats de l’enquête montrent des signes d’une généralisation de la reprise de la demande. Les indicateurs des ventes futures (comme les carnets de commandes et les demandes de renseignements) pour les clients du Canada et de l’étranger demeurent élevés, ce qui laisse entrevoir une forte demande dans la plupart des secteurs et des régions (graphique 3). Les ventes devraient demeurer solides pour la plupart des entreprises des secteurs qui se sont bien portés durant la pandémie, à savoir le logement, le commerce de détail et la fabrication. Par contre, pour d’autres entreprises de ces secteurs, les contraintes du côté de l’offre freinent de plus en plus la croissance des ventes (graphique 4).

Graphique 3 : Les indicateurs des ventes futures s’améliorent pour la plupart des entreprises

Graphique 4: Le manque de capacité et de compétences est devenu une contrainte plus importante pour les ventes des entreprises

 Ventes intérieuresExportations
2019T4-20-10
2020T1-6-4
2020T2-6-12
2020T3-8-7
2020T4-12-16
2021T1-7-11
2021T2-10-4
2021T3-24-20
2021T4-28-35

Les entreprises les plus durement touchées par la pandémie, notamment celles des secteurs de l’hôtellerie, du tourisme, du voyage et de l’immobilier commercial, remontaient la pente grâce à l’assouplissement des restrictions sanitaires et aux campagnes de vaccination à l’été et à l’automne. Toutefois, avant la montée des cas de COVID‑19 causée par le variant omicron, le tiers des entreprises faisaient état d’un niveau des ventes inférieur à ce qu’il était avant la pandémie, dont toutes les entreprises des secteurs des services où la distanciation est difficile à respecter. Même si les consommateurs se sentaient plus confiants à l’idée de voyager, certaines entreprises étaient d’avis qu’elles ne verraient pas de véritable regain de la demande tant que d’autres restrictions ne seraient pas levées. C’était particulièrement le cas pour les segments qui étaient encore loin d’être rétablis, comme les voyages internationaux et les voyages d’affaires. Confrontées à des pénuries de main-d’œuvre, certaines entreprises pourraient avoir besoin de plus de temps que prévu pour se rétablir complètement, même si la demande s’accroît.

La plupart des entreprises font état de pressions sur la capacité

Les pressions sur la capacité de production sont généralisées, sous l’effet de l’élargissement de la demande et des problèmes d’approvisionnement qui persistent. Plus des trois quarts des entreprises ont indiqué qu’elles auraient du mal à répondre à une augmentation inattendue de la demande (graphique 5). Pour bon nombre d’entre elles, ces pressions sont importantes et réduisent leur capacité à vendre leurs produits. Même si certains de ces problèmes d’approvisionnement devraient être temporaires, beaucoup d’entreprises s’attendent à ce que la situation se prolonge pendant plus de six mois. La plupart des entreprises, dont certaines des secteurs des services où la distanciation est difficile à respecter, considèrent les pénuries de main-d’œuvre et les perturbations des chaînes d’approvisionnement comme la principale source des pressions sur la capacité. Mais dans les secteurs qui ont connu une forte demande durant la pandémie, comme celui du logement et du commerce de détail, la demande accrue a aussi été évoquée à quelques reprises comme une source majeure de ces pressions.

Graphique 5 : De plus en plus d’entreprises font état de pressions sur la capacité

La forte demande et les pressions sur la capacité alimentent de fermes intentions d’investissement

Compte tenu des pressions contraignantes sur la capacité et de la hausse des ventes, la majorité des entreprises prévoient accroître leurs dépenses en machinerie et matériel par rapport à l’an dernier (graphique 6). Les intentions d’augmenter les investissements sont généralisées dans l’ensemble des secteurs et des régions et, dans de nombreux cas, elles englobent des dépenses en bâtiments et structures. Les conditions du crédit sont favorables à l’investissement, bien que les entreprises entrevoient une hausse du taux préférentiel sur leurs emprunts au cours des six prochains mois. Guidées par des perspectives à plus long terme, certaines ont dit éprouver le besoin de procéder à des investissements qui avaient été retardés par la pandémie afin de s’assurer d’être bien outillées pendant la reprise et par la suite. L’intensification des pénuries de main-d’œuvre et les difficultés à attirer et à retenir des travailleurs en poussent certaines à augmenter leurs investissements dans les technologies numériques et l’automatisation.

Graphique 6 : Les intentions d’investissement sont généralisées

Bien que les perspectives d’investissement de la plupart des entreprises soient encourageantes, certaines s’attendent à ce que les leurs soient assombries par les effets négatifs des perturbations persistantes des chaînes d’approvisionnement. Par exemple, pour quelques entreprises, les longs délais de livraison de nouveaux camions, de machinerie lourde et d’autres machines industrielles sont une source d’incertitude qui retarde leurs investissements.

Les salaires augmentent à l’heure où les entreprises comptent embaucher sur des marchés du travail plus tendus

Les intentions d’embauche au cours des 12 prochains mois se sont accrues et demeurent généralisées. La majorité des entreprises dans l’ensemble des régions et des secteurs prévoient augmenter leurs effectifs (graphique 7). Les trois quarts des entreprises ont indiqué que ceux-ci étaient déjà revenus complètement à leurs niveaux prépandémie. Beaucoup embauchent maintenant davantage pour pouvoir répondre à une hausse de la demande intérieure et étrangère ou soulager les pressions sur la capacité induites par le manque de main-d’œuvre. La plupart des entreprises espèrent être en mesure de trouver les travailleurs dont elles ont besoin, mais une partie d’entre elles doutent de leur capacité à y parvenir. Dans certains cas, les tensions sur le marché du travail les dissuadent d’embaucher et nuisent à leur reprise.

Graphique 7 : La plupart des entreprises prévoient embaucher davantage pour répondre à la demande et soulager les problèmes de capacité

La demande généralisée de main-d’œuvre exerce une pression à la hausse sur les salaires. La grande majorité des entreprises ont l’intention de majorer les salaires à un rythme plus rapide au cours des 12 prochains mois (graphique 8). Elles prévoient aussi offrir, en moyenne, des augmentations plus généreuses. Avec les pénuries de main-d’œuvre qui se sont intensifiées, le besoin d’attirer et de retenir les travailleurs est devenu le principal facteur qui alimente les pressions sur les salaires (graphique 9). On fait état d’une intensification de la concurrence salariale entre les entreprises, et ce, dans la plupart des régions et des secteurs, en particulier chez les professionnels hautement qualifiés et dans le domaine des technologies. L’augmentation du coût de la vie induit également une pression croissante sur les salaires. Certaines entreprises ont indiqué avoir l’intention de faire du « rattrapage salarial » en accordant les augmentations qu’elles n’avaient pas les moyens d’offrir plus tôt durant la pandémie.

Graphique 8 : Les pressions à la hausse sur les salaires sont généralisées

Graphique 9 : Les entreprises comptent augmenter les salaires principalement pour attirer et retenir les travailleurs

 2021T32021T4
Attirer des travailleurs4554
Retenir les travailleurs3754
Ajustement au coût de la vie2643
Rattrapage du marché1020
Autre716

Les entreprises ajustent leurs prix de vente en réponse à l’augmentation des coûts

Les entreprises s’attendent à ce que les prix de la plupart des intrants continuent d’augmenter environ au même rythme que l’an dernier, quand la croissance était forte (graphique 10, barres rouges). Le raffermissement généralisé de la demande leur permet d’incorporer l’augmentation des prix des intrants et des salaires dans leurs prix de vente (graphique 10, barres bleues). On prévoit ainsi une forte croissance du prix des extrants. Dans bien des cas, ces hausses avaient été retardées tout au long de la dernière année en raison de la grande incertitude liée à la pandémie. Les entreprises ont également l’intention de répercuter sur leurs prix les coûts induits par les récentes contraintes d’approvisionnement, et beaucoup d’entre elles comptent le faire au cours des six prochains mois. C’est particulièrement vrai dans les secteurs de la fabrication et du commerce. On s’attend à ce que les prix de certains produits de base qui avaient fortement grimpé dans la dernière année – comme le bois d’œuvre, les métaux, l’énergie et plusieurs produits agricoles – n’exercent pas autant de pressions à la hausse sur le coût des intrants et le prix des extrants.

Graphique 10 : On s’attend à une croissance forte et stable du prix des intrants et des extrants

Les attentes d’inflation sont élevées

Les attentes à l’égard de l’inflation mesurée par l’indice des prix à la consommation global ont monté d’un cran, les deux tiers des entreprises s’attendant désormais à ce que l’inflation se maintienne au-dessus de 3 % pour les deux prochaines années (graphique 11). Comme dans l’enquête précédente, les répondants ont évoqué plusieurs facteurs concourant à une inflation plus élevée, dont :

  • les perturbations des chaînes d’approvisionnement;
  • les prix de l’essence, des autres produits énergétiques et des aliments de base;
  • l’effet des politiques monétaire et budgétaire expansionnistes.

La pression à la hausse des salaires sur l’inflation a également été citée plus souvent, surtout par les entreprises qui s’attendent à ce que l’inflation demeure au-dessus de la cible de 2 % pendant une plus longue période. En réponse à une question spéciale, la plupart des répondants ont toutefois déclaré s’attendre à ce que les pressions inflationnistes élevées du moment se dissipent avec le temps, et à ce que l’inflation revienne près de la cible d’ici un à trois ans.

Graphique 11 : Les deux tiers des entreprises s’attendent à une inflation supérieure à 3 %

L’indicateur de l’enquête a encore augmenté, porté par le resserrement des capacités et l’élargissement de la demande

L’indicateur de l’enquête est une moyenne pondérée de mesures individuelles calculées à partir des réponses à différentes questions. Il s’est à nouveau inscrit en hausse ce trimestre, en partie en raison de l’amélioration des indicateurs des ventes ainsi que des intentions des entreprises d’investir et d’embaucher davantage (graphique 12, barres jaunes). Les pressions sur la capacité influent aussi sur l’indicateur de l’enquête, l’essentiel de la hausse observée depuis le début de 2021 leur étant attribuable (graphique 12, barres bleues). Dans le passé, les pressions accrues sur la capacité étaient habituellement causées par une forte demande, et elles laissaient présager une hausse de l’activité économique. Mais aujourd’hui, ces pressions sont en grande partie attribuables aux goulots d’étranglement dans les chaînes d’approvisionnement et au resserrement des marchés du travail. Par conséquent, le niveau élevé de l’indicateur de l’enquête est le reflet d’un contexte d’affaires complexe, conjugué à un raffermissement de la confiance des entreprises.

Graphique 12 : Les pressions sur la capacité ont fait monter l’indicateur de l’enquête au cours des trois derniers trimestres


Le présent bulletin contient une synthèse de l’information qui a été obtenue dans le cadre d’entrevues réalisées par le personnel des bureaux régionaux de la Banque auprès des responsables d’une centaine d’entreprises, choisies en fonction de la composition du produit intérieur brut du secteur canadien des entreprises. Les données de cette enquête ont été recueillies par téléphone et par vidéoconférence entre le 15 novembre et le 6 décembre 2021. Le solde des opinions peut varier entre +100 et -100. Les chiffres étant arrondis, le total des pourcentages n’est pas nécessairement égal à 100. Des précisions sur le questionnaire et les réponses obtenues sont présentées dans le site Web de la Banque du Canada. Les résultats de l’enquête constituent un condensé des opinions exprimées par les répondants et ne reflètent pas forcément le point de vue de la Banque du Canada.

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