Base de données de la Banque du Canada et de la Banque d’Angleterre sur les défauts souverains : quoi de neuf en 2021?

Introduction

Depuis 2014, la Banque du Canada tient à jour une base de données complète des défauts souverains afin de calculer de façon systématique la valeur nominale des différents types de défauts souverains et de les regrouper. Cette base repose sur des ensembles de données compilées et préalablement publiées par diverses sources, publiques et privées. Elle permet de produire, à partir de données tirées de ces sources et de nouvelles informations, des estimations complètes du montant des engagements financiers étatiques, à savoir les prêts bancaires, les obligations et autres titres négociables, de même que les prêts publics en situation de défaut, tous exprimés en dollars américains, pour la période allant de 1960 à 2020. Cette information est présentée à la fois pays par pays et de manière agrégée, c’est-à-dire à l’échelle mondiale.

La base de données, qui se trouve sur le site Internet de la Banque du Canada, est mise à jour annuellement en partenariat avec la Banque d’Angleterre. La version actualisée de la base et les versions à venir seront utiles aux chercheurs souhaitant analyser les effets économiques et financiers des défauts d’emprunteurs souverains spécifiques ainsi que les impacts sur la stabilité financière mondiale de multiples défauts souverains simultanés.

Dans la présente étude, nous mettons d’abord en lumière les changements visant les défauts souverains observés en 2020. Nous expliquons dans ses grandes lignes la hausse de 48 % du montant global des défauts souverains. Celle-ci tient surtout aux défauts de paiement du Venezuela, de l’Argentine et de Porto Rico sur des obligations en monnaies étrangères. Nous décrivons également les améliorations apportées aux fonctionnalités de la base de données. Puis nous revenons sur certains points importants extraits des données concernant le nombre, la taille et les types de défauts. Nous présentons ensuite un survol historique des données. En particulier, la progression des dettes problématiques depuis 2018, la persistance des défauts de la part des pays pauvres lourdement endettés et la place grandissante des créanciers qui n’appartiennent pas au Club de Paris dans le financement bilatéral1 sont étudiées. Enfin, nous faisons le point sur les progrès accomplis pour intégrer à la base de données des estimations fiables des arriérés budgétaires au sein des États.

Quoi de neuf en 2021?

Dans la mise à jour de cette année, nous estimons la valeur totale des défauts souverains en 2020 à 443,2 milliards de dollars américains (0,5 % de la dette publique mondiale), ce qui représente une hausse de 143,6 milliards de dollars (+48 %) par rapport à 2019, quand elle se chiffrait à 299,6 milliards de dollars américains (total révisé). Cette hausse est supérieure à celle de la dette publique mondiale brute, qui s’établit à 13 %. Les données catégorisées par grands créanciers montrent que la hausse est principalement attribuable aux défauts sur les obligations en devises, dont la valeur a augmenté de 121,2 milliards de dollars américains. Parmi les facteurs expliquant cette poussée, citons :

  • de nouveaux défauts de paiement de l’Argentine, du Belize, de l’Équateur et du Suriname;
  • un premier défaut de paiement du Liban sur des obligations en devises;
  • un montant plus élevé d’intérêts impayés pour des défauts de paiement en cours sur des obligations émises par le Venezuela et Porto Rico2.

Les défauts sur la dette en monnaie nationale ont augmenté de 0,9 milliard de dollars américains. Cette croissance s’explique en grande partie par la restructuration de la dette à court terme de l’Iraq avec l’émission de titres à plus long terme et à taux d’intérêt nominal plus bas.

La taille des défauts qui touchent les créanciers publics, notamment les membres du Club de Paris, la Chine et d’autres prêteurs bilatéraux, a aussi augmenté3. La part des prêts de ces créanciers dans la hausse mondiale s’élève à 19,4 milliards de dollars. Notons que l’Initiative de suspension du service de la dette (ISSD) joue un rôle relativement modeste4. Par ailleurs, la valeur des défauts pour les autres catégories de créanciers a moins varié.

Pour ce qui est du traitement des données sur les pays qui ont participé à l’ISSD, nous avons inclus dans la base de 2020 les remises de remboursements de dette accordés par les créanciers bilatéraux publics aux emprunteurs souverains qui, selon le Fonds monétaire international ou la Banque mondiale, sont déjà surendettés ou courent un risque élevé de l’être. La période de suspension des remboursements, qui devait aller initialement de mai à décembre 2020, a été prolongée jusqu’en décembre 2021. Les emprunteurs souverains participent volontairement au programme et l’allègement consenti n’a pas d’impact sur la valeur nette actualisée de leur dette. Toutefois, si nous avons décidé d’inclure dans la base de données les paiements suspendus dans le cadre de l’ISSD, c’est que sans l’ISSD, bon nombre de ces pays vulnérables – dont certains ont déjà d’autres arriérés – auraient probablement demandé un allègement de dette. Le montant total des remises de remboursements en rapport avec l’ISSD compris dans la base de données s’élève à 4,7 milliards de dollars américains, ce qui correspond à environ 1 % de la totalité des dettes en souffrance que nous avons répertoriées à l’échelle mondiale.

Voici quelques-uns des changements rapportés dans cette note :

  • l’ajout de données concernant les défauts de paiement sur les prêts de la Chine à des entités souveraines depuis 2000;
  • la mise à jour des données annuelles (selon la disponibilité) sur la dette totale du gouvernement central de chaque pays;
  • des révisions mineures des données agrégées et des données par pays sur les défauts de paiement pour la période allant de 1960 à 2019;
  • l’intégration de données, par pays et à l’échelle mondiale, sur les arriérés internes enregistrés depuis 2005 – les données les plus complètes sont fournies pour les années 2018-2020 (voir la section sur les arriérés internes).

Nous avons également mis à jour le contenu de deux onglets au bas de la principale feuille de calcul de la base de données : l’onglet DATA fournit les données sur les défauts, agrégés et par pays, en format téléchargeable; l’onglet DEBTOTAL contient les données sur l’encours de la dette publique totale par pays. L’onglet DOMARS, qui figurait dans les versions antérieures de la feuille de calcul, n’est pas inclus dans la version de cette année puisque les arriérés internes se trouvent maintenant dans le premier onglet.

Enfin, toutes les données peuvent désormais être téléchargées en format CSV, JSON et XML.

  1. 1. Le Club de Paris se compose des membres permanents suivants : Allemagne, Australie, Autriche, Belgique, Brésil, Canada, Corée du Sud, Danemark, Espagne, États-Unis, Finlande, France, Irlande, Israël, Italie, Japon, Norvège, Pays-Bas, Royaume-Uni, Russie, Suède et Suisse. Pour de plus amples renseignements, consulter le site Web du Club de Paris.[]
  2. 2. Les défauts de paiement de moindre valeur concernent les anciennes obligations argentines dont l’échange n’est pas terminé, ainsi que les créances non productives émises par Nauru et le Zimbabwe.[]
  3. 3. Sont exclus de ces catégories de créanciers le Fonds monétaire international, la Banque internationale pour la reconstruction et le développement, ainsi que l’Association internationale de développement.[]
  4. 4. En 2020, en réaction au choc économique et financier planétaire causé par la pandémie de COVID‑19, le G20 – de concert avec le Fonds monétaire international et la Banque mondiale – a lancé l’Initiative de suspension du service de la dette qui a permis à 73 pays à faible revenu de bénéficier d’une suspension temporaire des paiements dus au titre du service de la dette contractée auprès de leurs créanciers bilatéraux publics. Le G20 a également appelé les créanciers privés à participer à cette démarche sur des bases comparables, mais en vain. Pour en savoir plus sur cette initiative, consulter le site du Groupe de la Banque mondiale (2021).[]

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DOI : https://doi.org/10.34989/san-2021-15

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