Les études, c’est payant
Comment l’éducation influe sur le potentiel de revenus
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On nous dit souvent que les plus belles années de notre vie sont celles qu’on passe sur les bancs d’école. Mais est-ce que toutes ces années d’études rapportent quelque chose?
Apprendre, mais pas juste à l’université
Il existe différents types d’études postsecondaires :
- études universitaires (baccalauréat ou diplômes de cycles supérieurs);
- études collégiales;
- formations professionnelles et en apprentissage.
De plus en plus de Canadiens font des études postsecondaires. En fait, le nombre de personnes qui entreprennent ce genre d’études a beaucoup augmenté depuis 20 ans, surtout dans le cas des formations universitaires :
- En 1997, 15 % de la population en âge de travailler (de 15 à 64 ans) avaient un diplôme universitaire et 29 %, un diplôme d’études postsecondaires non universitaire.
- En 2018, ces proportions étaient passées à 28 % et à 33 %.
Les études postsecondaires, est-ce que ça rapporte?
Une façon de mesurer les bénéfices que procurent les études postsecondaires est de comparer les salaires moyens des travailleurs qui ont fait ce genre d’études à ceux des travailleurs qui n’en ont pas fait. La différence entre ces salaires moyens s’appelle l’« avantage salarial ».
Prenons un exemple tiré de données de Statistique Canada sur des adultes dans la quarantaine. Nous avons choisi cette tranche d’âge parce que c’est probablement à ce moment-là que les travailleurs ont une carrière bien établie tout en n’ayant pas encore commencé à opérer une transition vers la retraite.
En 2018, les travailleurs quadragénaires possédant un diplôme d’études postsecondaires gagnaient en moyenne plus que ceux qui n’avaient pas poursuivi leurs études après le secondaire :
- les diplômés universitaires gagnaient 53 % de plus de l’heure, soit 13 dollars canadiens de plus;
- ceux qui avaient un diplôme d’études postsecondaires (autre qu’un diplôme universitaire) gagnaient 18 % de plus l’heure, soit 4 dollars canadiens de plus.
Les études, ça paie… mais moins qu’avant
L’avantage salarial que procurent les études postsecondaires est considérable, mais il est en baisse depuis les 20 dernières années.
En 1997, il se situait à 63 % pour les diplômes universitaires et à 20 % pour les autres formations postsecondaires.
Pourquoi l’avantage salarial diminue-t-il?
Jetons un coup d’œil à l’offre et à la demande de main-d’œuvre dans un monde théorique où les travailleurs occupent des emplois selon leur niveau d’éducation. Dans ce cas, l’avantage salarial serait déterminé par l’offre et la demande de main-d’œuvre hautement scolarisée par rapport à l’offre et à la demande de travailleurs moins scolarisés. Imaginons maintenant que le nombre de travailleurs plus scolarisés augmente et que tous les autres facteurs restent inchangés.
Qu’arrive-t-il à l’avantage salarial? Il diminue, parce que, au salaire actuel, il y a plus de travailleurs scolarisés qu’il n’y a de travail pour eux. Cette tendance – une hausse de l’offre de main-d’œuvre scolarisée et une baisse de l’avantage salarial – cadre avec ce que l’on observe en réalité, c’est-à-dire avec ce que révèlent les données à ce sujet.
Cette tendance est plus marquée pour les travailleurs qui possèdent un diplôme universitaire. Comme leur nombre a monté plus rapidement que celui des travailleurs ayant poursuivi d’autres types d’études postsecondaires, leur avantage salarial a diminué plus rapidement.
Bien sûr, la demande de travailleurs plus scolarisés pourrait aussi avoir augmenté, mais pas aussi vite que l’offre.
Avantage salarial
La nature de l’emploi compte aussi
Bien que cette théorie de l’offre et de la demande soit intéressante pour expliquer la diminution de l’avantage salarial, les choses sont un peu plus compliquées dans la vraie vie. La prime salariale que vous rapporte votre éducation dépend de nombreux facteurs, notamment des compétences acquises durant vos études.
Votre emploi est un autre facteur important. Votre diplôme pourrait valoir plus si vous utilisez dans votre travail les compétences que vous avez développées sur les bancs d’école.
Même si le lien entre l’éducation et l’emploi n’est pas si évident, on s’attend à ce qu’un diplôme universitaire ait plus de valeur dans un emploi qui exige des qualifications élevées, c’est-à-dire dans des professions libérales comme celles de comptable, de médecin, d’avocat, d’ingénieur, d’enseignant, ainsi que dans des emplois de cadres supérieurs.
On constate toutefois que les diplômés universitaires occupent de plus en plus des emplois qui ne demandent pas de fortes qualifications.
Examinons de plus près l’avantage salarial des diplômés universitaires selon l’emploi qu’ils occupent en nous penchant sur les salaires de trois catégories de travailleurs :
- les diplômés universitaires ayant un emploi qui nécessite des qualifications élevées;
- les diplômés universitaires ayant un emploi qui ne demande pas de fortes qualifications;
- les personnes qui n’ont pas fait d’études postsecondaires.
Tant en 1997 qu’en 2015, le salaire des travailleurs qui détenaient un diplôme universitaire et occupaient un emploi demandant de fortes qualifications était beaucoup plus élevé (+ 74 %) que celui des travailleurs qui n’avaient pas fait d’études postsecondaires. Donc, pour ce groupe, l’avantage salarial était élevé et stable.
En revanche, les travailleurs qui possédaient un diplôme universitaire mais qui n’occupaient pas un emploi nécessitant des qualifications élevées avaient un avantage salarial plus faible, qui avait aussi diminué au fil du temps :
- En 1997, l’écart entre le salaire de ces travailleurs et celui des travailleurs qui n’avaient pas fait d’études postsecondaires était de 51 %.
- En 2015, cet écart avait baissé et s’établissait à 35 %.
Avantage salarial des diplômés universitaires par type d’emplois occupés
Encore une fois, cela montre que l’augmentation du nombre de travailleurs titulaires d’un diplôme universitaire a eu un effet important. De plus en plus d’emplois dits « hautement qualifiés » sont offerts, mais le nombre de diplômés universitaires augmente encore plus vite. Au même moment, on remarque qu’un nombre croissant de diplômés universitaires acceptent des emplois qui ne demandent pas de qualifications élevées et qui étaient auparavant occupés par des gens n’ayant pas fait d’études postsecondaires. L’avantage salarial de ces diplômés est donc plus faible, et il rétrécit aussi. Résultat : l’avantage salarial global des travailleurs qui détiennent un diplôme universitaire diminue.
Travailleurs occupant un emploi qui nécessite des qualifications élevées
Qu’en est-il, en fin de compte?
L’avantage salarial que procurent des études postsecondaires diminue, mais il demeure tout de même considérable. Bref, poursuivre des études postsecondaires est toujours payant, surtout si vous décrochez un emploi dans lequel vous utiliserez vos acquis au quotidien.
C’est le cas aujourd’hui. Mais qu’en sera-t-il demain? Les changements en cours dans nos façons de travailler pourraient nous aider à mieux comprendre comment l’avantage salarial évoluera. Par exemple, les personnes titulaires d’un diplôme postsecondaire pourraient être mieux placées pour utiliser des outils de travail liés à de nouvelles technologies comme l’intelligence artificielle. En même temps, les connaissances que l’on acquiert pendant ses études postsecondaires pourraient très vite devenir périmées dans un monde où les changements technologiques s’opèrent à un rythme effréné. Il serait donc plus important de continuer d’apprendre tout au long de sa carrière.
Éducation et pandémie
Bon nombre de Canadiens ont perdu leur emploi ou ont été forcés de réduire leurs heures de travail à cause de la pandémie de COVID‑19. Mais, selon son niveau d’éducation, tout le monde n’a pas été logé à la même enseigne face à la crise.
Pour illustrer ce contraste, nous avons utilisé de nouveau les données de Statistique Canada. Plus précisément, nous avons examiné la situation des travailleurs dans la force de l’âge (le groupe des 25-54 ans) en avril 2020, au moment où une grande partie de l’économie avait été mise à l’arrêt afin de freiner la propagation du virus.
Environ 13 % des travailleurs ont perdu leur emploi depuis février 2020. La plupart des pertes d’emplois sont concentrées dans des métiers qui exigent un contact physique et ne sont pas considérés comme essentiels dans la vie de tous les jours.
Par exemple, environ 24 % des travailleurs du secteur des services personnels (p. ex., vendeurs, chefs cuisiniers, serveurs et personnel d’entretien) ont perdu leur emploi. À l’inverse, les métiers pour lesquels le travail peut être effectué à distance (gestion, affaires, finance, administration, science, etc.) ou qui sont considérés comme essentiels (p. ex., santé et services publics de première ligne) n’ont pas été trop touchés.
Vous avez sûrement remarqué que les emplois qui ont été moins affectés par les mesures mises en place pour freiner la propagation du virus sont surtout ceux qui nécessitent des qualifications élevées. Voilà pourquoi les personnes moins scolarisées ont été les plus touchées par la pandémie. Environ 18 % des travailleurs sans diplôme d’études postsecondaires ont perdu leur emploi comparativement à 8 % des diplômés universitaires. Mais ce qui compte, c’est la nature de l’emploi, et non le niveau d’éducation en soi. En effet, 11 % des diplômés universitaires qui n’occupaient pas un poste nécessitant des qualifications élevées ont perdu leur emploi.
Certains croient qu’on ressentira les effets de la pandémie très longtemps. On dirait aussi que le télétravail est là pour rester, du moins pendant un certain temps. Enfin, la diversification de l’offre dans le domaine de l’enseignement à distance est en train de changer l’accès à l’éducation et le calendrier des inscriptions. Ces changements structurels pourraient, à long terme, modifier l’évolution de l’offre et de la demande de travailleurs ayant différents niveaux de scolarisation.
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