Le point sur la situation économique : nous devons tous mettre la main à la pâte
Introduction
Merci de m’avoir invité à prendre la parole ici aujourd’hui. C’est une heureuse coïncidence de pouvoir m’adresser à l’organisme Women in Capital Markets, qui est voué à accroître la participation des femmes au sein du secteur financier, à quelques jours à peine de la Journée internationale des femmes. Votre mission est importante, non seulement parce qu’elle consiste à promouvoir des résultats plus équitables dans ce secteur, mais aussi parce que nous savons qu’une main-d’œuvre plus diversifiée et plus inclusive améliore la prise de décision et stimule la croissance économique.
La Banque du Canada a les mêmes objectifs. En 2017, nous avons créé la Bourse de maîtrise pour les étudiantes en économie ou en finance, qui vise à attirer les femmes et à favoriser leur avancement dans les principaux secteurs d’activité de la Banque. Les lauréates obtiennent une bourse, sont mentorées par nos économistes et reçoivent une offre d’emploi. Le mois dernier, la Banque a annoncé les noms des sept dernières boursières ainsi que ceux des lauréats de son programme de bourses à l’intention des étudiants autochtones et des étudiants handicapés. Félicitations à tous!
Aujourd’hui, je vais vous expliquer les raisons qui ont motivé notre décision d’hier d’abaisser notre taux directeur d’un demi-point de pourcentage. Sans surprise, la menace que représente le nouveau coronavirus (COVID-19) pour l’économie mondiale a joué un rôle central dans nos délibérations. De fait, nous coordonnons étroitement nos efforts avec ceux des banques centrales et des autorités budgétaires des autres pays du G7. Les gens sont préoccupés par le COVID-19, et à juste titre, au vu du nombre des victimes et des conséquences tragiques pour ceux qui sont concernés. À ce stade-ci, la maladie n’est pas encore entièrement comprise. Nous nous en remettons aux conseils des autorités de santé publique et comptons sur elles pour contenir la situation.
Le travail de la Banque consiste à réfléchir à l’incidence du coronavirus sur l’économie. Ce virus a déjà fort malmené l’économie chinoise, ce qui a des répercussions sur l’économie mondiale, puisque les producteurs chinois sont fortement intégrés au reste du monde par l’intermédiaire des chaînes d’approvisionnement. Au fil de la propagation de la maladie, ces perturbations pourraient se reproduire dans de nombreux autres pays. Des voyages sont bien entendu annulés, ce qui a des implications évidentes pour les dépenses des consommateurs et les agences de voyage. L’effritement de la confiance des consommateurs et des entreprises pourrait aussi provoquer d’autres effets économiques persistants. En effet, les entreprises canadiennes, dont beaucoup avaient déjà été mises sur la touche en raison de l’incertitude entourant l’avenir de l’Accord de libre-échange nord-américain et la guerre commerciale entre les États-Unis et la Chine, pourraient pâtir à nouveau de cette situation.
L’économie canadienne a fait preuve d’une bonne résilience ces dernières années. Toutefois, cette résilience pourrait être sérieusement mise à l’épreuve par le COVID-19, selon la gravité et la durée de ses effets. Alors, avant de vous entretenir plus en détail de notre décision d’hier concernant le taux directeur, permettez-moi de prendre quelques minutes pour vous parler d’une source essentielle de cette résilience : la vigueur de notre marché du travail.
Le marché du travail aujourd’hui
La situation du marché du travail canadien est en gros semblable à celle qui prédomine dans plusieurs autres grandes économies. Même si le chômage est faible, il existe un sentiment d’inquiétude répandu. Certains craignent de perdre leur emploi à cause des nouvelles technologies ou de la concurrence étrangère, tandis que d’autres s’inquiètent de ne pouvoir trouver un emploi stable dans l’économie des petits boulots.
Cependant, les chiffres prouvent clairement que le marché du travail canadien est sain dans l’ensemble. L’année dernière, près de 300 000 emplois ont été créés au Canada. Le taux de chômage a été inférieur à 6 % tout au long de 2019, ce qui est proche de son niveau le plus bas atteint voilà plus de 40 ans. Parallèlement, le taux de croissance des salaires a augmenté, passant d’environ 2 % à près de 3 %.
Fait important, on observe également une amélioration de la qualité des emplois. Plusieurs éléments permettent d’apprécier cette qualité. Tout d’abord, les gains au chapitre de l’emploi ont surtout concerné les postes à plein temps. Ensuite, la proportion de personnes qui travaillent involontairement à temps partiel a diminué, pour frôler un niveau qui n’avait pas été enregistré depuis plus de dix ans. Dans les prochaines semaines, la Banque publiera une note analytique du personnel qui examine de manière exhaustive un large éventail d’indicateurs de rémunération, de sécurité d’emploi et d’équilibre travail-vie personnelle. Cette note montre que la qualité des emplois s’est nettement améliorée au Canada au cours des cinq dernières années.
Autre signe de la vigueur du marché du travail : beaucoup de personnes changent d’emploi pour occuper des fonctions qui correspondent mieux à leurs compétences et à leur expérience. C’est ce que les économistes appellent « la réallocation de la main-d’œuvre ». À l’échelle nationale, ce processus s’établit aujourd’hui à des niveaux qu’on n’avait pas vus depuis plus de dix ans, avant la crise financière mondiale. Selon les dernières données disponibles, les Canadiens qui changent d’emploi voient leur salaire augmenter de 12 à 14 %. Il ne fait guère de doute que ces changements d’emploi font croître la productivité au sein de l’économie, et de fait, les données les plus récentes révèlent une tendance à la hausse de la productivité.
Et ce n’est pas tout. Il faut en moyenne moins de temps aux chômeurs pour trouver un emploi. Il y a actuellement plus d’un demi-million de postes vacants au sein de l’économie. Cela correspond bien à ce que m’ont rapporté des dirigeants d’entreprise d’un bout à l’autre du pays, c’est-à-dire que leur plus gros défi est de trouver des personnes qualifiées pour pourvoir les postes vacants.
Bien entendu, il s’agit là de statistiques nationales, qui masquent des disparités régionales assez marquées. Nous sommes bien conscients des difficultés auxquelles sont confrontées les régions productrices de pétrole, par exemple. À la fin de 2014, les prix du pétrole avaient dégringolé de 50 %, ce qui avait contribué à une chute similaire des dépenses d’investissement. Cette chute et les contraintes de transport persistantes ont fait grimper le taux de chômage en Alberta. Ce taux, qui avoisinait 4,5 % avant le choc pétrolier, dépassait 9 % à la fin de 2016. Ce sont les jeunes hommes qui ont été les plus touchés. Le chiffre du taux de chômage le plus récent pour l’Alberta est de 7,3 %, ce qui signifie que l’économie s’ajuste, mais que le processus reste long et difficile. D’un autre côté, l’enquête sur les perspectives des entreprises menée par la Banque indique que la situation sur les marchés du travail est relativement tendue en dehors de la région des Prairies. La Colombie-Britannique et le Québec – deux des provinces aux plus fortes économies – ont les taux de postes vacants les plus élevés.
Le taux d’activité constitue une autre mesure importante de l’état de santé du marché du travail. Il s’agit du pourcentage de personnes en âge de travailler qui ont un emploi ou cherchent activement du travail. Une hausse du taux d’activité peut indiquer que des personnes qui avaient quitté la vie active réintègrent le marché du travail, ce qui est positif à la fois pour leurs propres perspectives de croissance et pour le potentiel économique du pays.
Les taux d’activité ont fortement chuté pendant la crise financière mondiale et la lente reprise qui a suivi. À l’époque, l’une des grandes préoccupations de la Banque était la possibilité que les gens restent au chômage si longtemps que leurs compétences se déprécient. Les économistes parlent alors d’« effet cicatrice » sur le marché du travail.
Heureusement, le taux d’activité a augmenté dans tous les groupes d’âge. Les taux de chômage, qui ont atteint les niveaux les plus bas jamais observés, en sont d’autant plus impressionnants, surtout si l’on tient compte des revers que nous avons subis en cours de route, comme la chute des prix du pétrole. Cela ne veut pas dire qu’une forte participation au marché du travail est toujours positive. Prenons l’exemple des aînés : il est possible qu’ils prolongent volontiers leur vie professionnelle, ou qu’ils soient obligés de travailler plus longtemps parce qu’ils ne sont pas entièrement prêts à prendre leur retraite.
Pris ensemble, ces indicateurs montrent tout de même que le marché du travail a été – et continue d’être – une source de résilience pour l’économie canadienne. Un emploi solide et stable est un critère primordial pour soutenir la confiance des consommateurs et les dépenses des ménages, qui sont les principaux moteurs d’expansion de toute économie.
Cela dit, il est également clair qu’il reste du pain sur la planche. Les faiblesses sectorielles dans les provinces des Prairies et de l’Atlantique demeurent préoccupantes. Par ailleurs, il y a au pays plusieurs groupes de personnes en situation de sous-emploi chronique, qui représentent un potentiel inexploité significatif. En particulier, le taux d’activité des femmes est toujours moins élevé que celui des hommes d’environ huit points de pourcentage. En outre, le taux d’activité des Autochtones est nettement inférieur à celui de la population générale.
Aider les nouveaux immigrants à intégrer le marché du travail est un autre vecteur de croissance possible. En effet, notre main-d’œuvre vieillit, et notre pays produit à peine assez de nouveaux travailleurs pour remplacer les baby-boomers qui partent à la retraite. L’immigration est donc la clé de notre future croissance économique. En approfondissant l’analyse, on constate que le taux de chômage des immigrants au bout de cinq à dix années au pays est à peu près le même que celui de la population générale. Toutefois, pendant ces cinq premières années, le taux de chômage des nouveaux immigrants est plus élevé que la moyenne, probablement en raison de barrières entourant l’équivalence des études.
Améliorer la santé du marché du travail
Étant donné l’importance qu’a la santé du marché du travail pour la résilience de notre économie, il est naturel de se demander si certaines politiques permettraient de la renforcer davantage. En ce qui nous concerne, à la Banque du Canada, notre rôle est de continuer à mener une politique monétaire arrimée sur la maîtrise de l’inflation. En agissant de manière à maintenir l’inflation à la cible, nous contribuons à stabiliser la croissance de l’économie et nous aidons cette dernière à tourner près des limites de sa capacité. Cela signifie que l’économie crée le plus d’emplois et de revenus possible, sans pour autant que l’inflation s’accélère.
Examinons, par exemple, l’expérience de 2015. Nous savions que l’effondrement des prix du pétrole entraînerait une chute prononcée des revenus et des investissements qui toucherait l’économie tout entière et ferait descendre l’inflation sous la cible. Par conséquent, nous avons abaissé les taux d’intérêt sur-le-champ, sans attendre l’apparition des effets défavorables. Les taux d’intérêt plus faibles ont contribué à rapprocher l’inflation de la cible et ont aidé l’économie dans son ensemble à retourner plus rapidement à son plein potentiel ainsi qu’au plein emploi.
Ce processus d’ajustement semble très simple dans l’abstrait. Mais derrière cette théorie économique, c’est de gens en chair et en os qu’on parle. Pour les personnes directement concernées, les ajustements peuvent être très difficiles et douloureux. De surcroît, cette situation oblige les particuliers à supporter tous les risques connexes.
Prenons l’exemple d’une personne travaillant dans le secteur de l’énergie qui a perdu son emploi à la suite de l’effondrement des prix du pétrole. Même si elle parvenait à trouver un travail convenable dans une autre province, il est possible que cette personne ait un conjoint qui hésite à quitter un bon emploi, et des enfants qui sont bien intégrés à leur école et à leur communauté. Le couple pourrait devoir vendre sa maison, ce qui serait difficile si le marché immobilier local a ralenti. Les logements pourraient être plus chers et difficiles à trouver au nouvel endroit. Il n’est pas aisé de faire face à ces risques et de surmonter ces obstacles. C’est pourquoi le processus d’adaptation prend beaucoup de temps.
En 2015, ces ajustements ont été facilités par la baisse des taux d’intérêt et la dépréciation du dollar canadien. Il est évident que des politiques plus ciblées pour soutenir le marché du travail ne sont pas de notre ressort. Néanmoins, il est logique que les décideurs s’attaquent aux obstacles qui rendent difficile le jumelage des travailleurs avec ce demi-million d’emplois vacants que nous avons au pays. On pourrait peut-être trouver d’autres façons d’aider les gens à faire face aux risques liés à une réinstallation ou à surmonter les obstacles régionaux à une bonne adéquation entre l’offre et la demande d’emploi. Par exemple, il y a peut-être certains secteurs dans lesquels les professionnels et travailleurs qualifiés pourraient plus facilement obtenir les permis nécessaires pour travailler dans une autre province. Nous pourrions également tirer parti de l’expérience internationale pour améliorer nos programmes d’éducation, de formation et de reconversion professionnelle.
J’ai mentionné précédemment que malgré un faible taux de chômage, les gens expriment un sentiment d’insatisfaction et de malaise quant à leur avenir. Il est possible que la distribution des revenus y contribue. La part du revenu total du travail dans l’économie a commencé à diminuer il y a près d’une trentaine d’années et elle s’inscrit dans une fourchette basse depuis dix à quinze ans. Les possibilités de mondialisation des chaînes d’approvisionnement et l’essor constant des technologies d’automatisation ont sans aucun doute réduit le pouvoir de négociation des employés au fil du temps, sans parler de la diminution de l’affiliation syndicale. Sachant que la mondialisation et l’automatisation entraînent également une croissance économique qui profite à tous, il est clair qu’il n’y a pas de solution toute simple à ce problème. Toutefois, il est utile d’en assurer le suivi au moment où l’on envisage des pistes d’action différentes.
Notre décision d’hier
Cela dit, le marché canadien du travail a certainement joué un rôle important dans la résilience de l’économie. Sa vigueur a favorisé la croissance des revenus et de la consommation des ménages que nous avons constatée. Néanmoins, ce n’est que l’un des facteurs que le Conseil de direction de la Banque examine lorsqu’il doit prendre des décisions de politique monétaire. Permettez-moi de passer maintenant à la décision que nous avons prise hier.
Il est important de mettre les évolutions récentes en contexte. Ces trois dernières années, les investissements des entreprises ont été inférieurs aux attentes au Canada. Il y a six mois, on observait des signes que la guerre commerciale entre les États-Unis et la Chine commençait à affecter encore plus les exportations et les investissements canadiens. En octobre, nous avons noté que l’économie canadienne suivait deux trajectoires, c’est-à-dire que la faiblesse des exportations et des investissements était contrebalancée par le redressement de l’activité dans le secteur du logement, la vigueur du marché du travail et la robustesse des dépenses de consommation. Mais nous redoutions que les effets de la guerre commerciale finissent par faire pencher la balance des risques contre nous. Comme l’économie tournait très près de son potentiel, que le taux de chômage frôlait son creux historique et que l’inflation était à la cible, le Conseil de direction a jugé que le risque d’un ralentissement de la croissance n’était pas suffisant pour justifier une baisse de taux. La principale raison était que des taux d’intérêt moins élevés pourraient réduire le risque à la baisse qui pèse sur la croissance, mais aussi accroître les vulnérabilités financières. Et il serait alors plus compliqué d’atteindre la cible d’inflation à l’avenir.
En janvier, les conditions avaient changé, mais nous avons tenu à peu près le même raisonnement pour prendre notre décision. La confiance des consommateurs s’était détériorée à la fin de 2019, mais il semblait y avoir des chances raisonnables que ce soit temporaire. De plus, des signes montraient que l’économie mondiale avait touché un creux, et le consensus autour de l’idée que la croissance économique mondiale allait se raffermir légèrement en 2020 était de plus en plus large. Nous avons donc de nouveau reconnu que des risques à la baisse pesaient sur l’économie canadienne. Mais, comme le marché du travail était très solide, nous avons jugé que ces risques n’étaient pas suffisants pour justifier une baisse de taux.
Il s’est passé bien des choses depuis six semaines. Entre autres, l’économie mondiale sera, à tout le moins, sérieusement perturbée par le COVID-19 pendant la première moitié de l’année. La reprise sera peut-être rapide une fois que les professionnels de la santé auront géré la situation et que les conditions seront revenues à la normale. Mais l’éclosion du virus et ses effets pourraient être plus durables. La confiance des consommateurs et des entreprises pourrait rester faible plus longtemps, ce qui causerait un ralentissement plus persistant de la croissance économique. Il pourrait y avoir des mises à pied à long terme, par exemple. Pour le moment, on ne sait pas comment les choses vont évoluer.
Bien entendu, le coronavirus n’est pas le seul enjeu. La semaine dernière, Statistique Canada a publié son rapport économique détaillé pour le quatrième trimestre de 2019. Comme on s’y attendait, ce rapport indique que l’économie a beaucoup ralenti à la fin de 2019. Ce ralentissement est dû en partie à des facteurs particuliers, comme l’arrivée précoce de l’hiver qui a ruiné certaines récoltes, la grève au Canadien National et la fermeture de l’usine de General Motors à Oshawa. Mais la croissance économique au quatrième trimestre a tout de même été inférieure à 1 % si on fait abstraction de l’incidence des facteurs particuliers. C’est parce qu’une partie du ralentissement est due à des facteurs plus structurels, soit la faiblesse continue des exportations, la baisse des investissements des entreprises et la modération de la reprise dans le secteur du logement.
Le seul aspect positif a été les dépenses de consommation, qui sont restées solides même si le taux d’épargne a continué d’augmenter. Comme nous l’espérions, la confiance des consommateurs a rebondi en janvier. Bref, la vigueur du marché du travail dont nous avons parlé plus tôt contribue à la résilience de l’économie.
Que dire du début de 2020? Aux effets du COVID-19 viennent s’ajouter ceux des grèves des enseignants en Ontario, des conditions météorologiques inhabituelles et des barrages de voies ferrées. On peut espérer que tous ces facteurs seront temporaires, mais il semble que la croissance économique sera très faible pendant au moins un autre trimestre. Puisque nous sommes déjà en mars, ces facteurs pourraient facilement se répercuter sur le deuxième trimestre. Le risque que la confiance des entreprises et des consommateurs s’érode davantage est bien réel, ce qui créerait un ralentissement plus persistant, surtout après le recul récent des indices boursiers.
Par ailleurs, les prix mondiaux des produits de base ont baissé de plus de 10 %, et les prix du pétrole de près de 20 % depuis le début de l’année. Les prix des produits de base sont un des principaux canaux par lesquels les chocs internationaux se transmettent à l’économie canadienne. Les tensions étant déjà élevées dans les régions productrices de pétrole du Canada, ce choc ne peut qu’alourdir et prolonger le processus d’ajustement mentionné tout à l’heure. Et il n’y a pas que le pétrole qui sera touché. Ces tensions finiront par se propager des régions productrices de matières premières aux autres régions du pays, puisque les gens touchés directement vont dépenser moins en général.
Compte tenu de tous ces facteurs, les perspectives de l’économie canadienne sont nettement plus faibles qu’elles ne l’étaient en janvier. Quand l’économie tourne près de son potentiel et que l’inflation est à la cible, il est souvent recommandé dans le cadre d’une approche axée sur la gestion des risques de laisser la politique monétaire inchangée lorsque survient un petit choc. Toutefois, cette approche exige que des mesures importantes soient adoptées rapidement en cas de choc plus grave pour que l’économie reste bien ancrée. Le Conseil de direction a convenu que les risques à la baisse pesant actuellement sur l’économie l’emportent amplement sur nos préoccupations persistantes au sujet des vulnérabilités financières. En effet, une détérioration de la confiance des consommateurs réduirait naturellement l’activité sur le marché du logement. Dans un tel contexte, la baisse des taux d’intérêt ne créera pas d’effervescence sur le marché du logement, mais contribuera plutôt à le stabiliser. Nous nous attendons de plus à ce que la ligne directrice B-20 continue d’améliorer la qualité de l’ensemble des prêts hypothécaires.
Les conséquences du COVID-19 dépassent dans bien des cas le champ d’action de la politique monétaire, et les autorités au Canada et ailleurs dans le monde cherchent à résoudre la situation. La politique monétaire peut toutefois contribuer à en atténuer les effets sur la confiance des consommateurs et des entreprises pour aider l’économie à traverser la situation. Cette contribution peut être particulièrement puissante quand le choc est d’envergure mondiale et que la réaction est coordonnée.
À mesure que la situation du COVID-19 évolue, le Conseil de direction se tient prêt à ajuster de nouveau la politique monétaire au besoin pour soutenir la croissance économique et maintenir l’inflation à la cible. Bien que les marchés continuent de bien fonctionner, la Banque continuera de veiller à ce que le système financier canadien dispose de liquidités suffisantes. La Banque continue aussi de surveiller de près les conditions économiques et financières, en coordination avec les autres banques centrales et les autorités budgétaires du G7.
Je tiens à remercier Erik Ens de l’aide qu’il m’a apportée dans la préparation de ce discours.