Publication de la Revue du système financier
Bonjour. La première sous-gouverneure Wilkins et moi-même sommes heureux d’être parmi vous pour discuter de la Revue du système financier (RSF) publiée aujourd’hui. Permettez-moi d’abord de dire quelques mots au sujet des délibérations du Conseil de direction.
Premièrement, un bref rappel de notre méthodologie. Les analyses présentées dans la RSF portent principalement sur les vulnérabilités observées ici au Canada. Il s’agit de conditions préexistantes pouvant interagir avec les changements touchant la situation économique du pays et poser des risques pour le système financier. Il se produit sans cesse des chocs macroéconomiques et les économies s’y adaptent. Cependant, si des vulnérabilités financières importantes sont présentes, les effets de ces chocs sur l’économie et le système financier sont susceptibles d’être amplifiés du fait d’interactions avec les vulnérabilités sous-jacentes. L’image que nous utilisons pour illustrer ce concept est celle d’un tronc d’arbre qui a une fente profonde : la situation peut s’améliorer ou empirer avec le temps, mais il n’y a pas de crise immédiate tant qu’une forte tempête ne se lève pas.
Selon ce cadre d’analyse, un grand nombre de chocs possibles pourraient, en théorie, transformer des vulnérabilités financières en risques pour la stabilité financière. Les scénarios de risque présentés dans la RSF ont une valeur indicative. Bien entendu, il est possible d’établir des liens logiques entre à peu près n’importe quel choc macroéconomique dans le monde et la stabilité financière ici au Canada, comme un « effet papillon ». Nous ne cherchons pas à répertorier toutes ces possibilités, dont les conséquences seraient assez semblables. Nous concentrons plutôt notre analyse sur les vulnérabilités sous-jacentes ici au pays.
Cela étant dit, les vulnérabilités financières des ménages continuent de s’accroître au Canada. Nous distinguons deux catégories de vulnérabilités : l’endettement des ménages et les déséquilibres sur le marché du logement. Cette distinction est importante, car, quoique ces vulnérabilités aillent souvent de pair, il se peut que, au fil du temps, l’une d’elles diminue davantage que l’autre.
Nous avons toujours fait cette distinction dans nos analyses, mais le Conseil de direction a tenté de l’affiner dans la présente livraison de la RSF. La raison en est que les autorités ont adopté ces derniers mois des mesures macroprudentielles qui serviront essentiellement à atténuer les conséquences potentielles de la hausse de l’endettement des ménages sur le système financier. Ces mesures portent sur les critères d’admissibilité à l’assurance hypothécaire, qui contribueront à améliorer la qualité sous-jacente des dettes des ménages avec le temps. Elles touchent aussi les exigences de fonds propres et les critères d’établissement des prix applicables aux institutions financières, qui rendront ces dernières plus résilientes aux chocs à l’avenir.
Par conséquent, ces politiques aideront à atténuer les risques pesant sur la stabilité financière au fil du temps. En ce qui a trait à l’activité et aux prix sur le marché du logement, les mesures influeront sur la demande, surtout de logements plus coûteux. Cependant, la demande liée à l’évolution démographique demeure robuste, la création d’emplois et la croissance du revenu sont fortes dans le Grand Vancouver et le Grand Toronto, et les contraintes de l’offre de logements subsistent. Un encadré de la RSF fait état des mesures macroprudentielles qui sont entrées en vigueur et de leurs effets potentiels attendus sur les facteurs fondamentaux du marché du logement. Le message important que je veux faire passer est que l’on ne peut juger de l’efficacité de ces politiques simplement en examinant si les prix des logements continent de monter. Les mesures visent non pas les prix des logements, mais bien l’atténuation des risques qui pèsent sur les ménages et sur le système financier. Les effets de ces politiques se feront sentir davantage à Vancouver et à Toronto, car c’est dans ces régions que sont consentis la majorité des prêts hypothécaires présentant un ratio élevé de prêt au revenu.
Dans ce contexte, le Conseil de direction a indiqué que la progression des prix a commencé à ralentir de façon notable à Vancouver, mais il est trop tôt pour déterminer la nouvelle tendance. Il importe de souligner que l’activité sur le marché a commencé à ralentir avant l’instauration de l’impôt spécial sur la vente de propriétés à des non-résidents, ce qui donne à penser que d’autres facteurs pourraient avoir commencé à interrompre le cycle d’anticipations de hausse des prix de nature extrapolative. La situation demeure toutefois très incertaine, et aucun signe d’une modération similaire dans la région de Toronto n’a été observé. Là encore, nous devons insister sur le fait qu’un ralentissement du marché du logement, comme nous l’avons vu à Calgary, par exemple, peut contribuer à atténuer les inquiétudes entourant la stabilité financière sur un front, mais laisser l’endettement des ménages à un niveau très élevé.
Les délibérations du Conseil de direction concernant ces risques ont aussi été influencées par la remontée des rendements obligataires mondiaux depuis les élections aux États-Unis. Les rendements obligataires canadiens ont réagi, comme c’est le cas habituellement, mais pas dans la même mesure. Par la suite, les taux hypothécaires canadiens ont connu une certaine hausse. Nous allons surveiller de près ces évolutions dans les mois à venir. Comme nous l’avons précisé dans notre dernière annonce au sujet du taux directeur, nous continuerons à mener une politique monétaire indépendante au Canada, axée sur le retour de l’inflation à la cible de 2 %.
Enfin, le manque possible de liquidité sur les marchés obligataires a suscité beaucoup de discussions dans les marchés financiers. Bon nombre d’entre eux se sont dits d’avis que les changements réglementaires contribuent à cette situation. Dans le même temps, les marchés ont fonctionné exceptionnellement bien dans la foulée du vote référendaire en faveur du retrait du Royaume-Uni de l’Union européenne et des élections aux États-Unis.
Cette question retient encore l’attention à l’échelle internationale. Dans la présente livraison de la RSF, nous proposons de nouvelles analyses, qui s’appuient sur une enquête approfondie auprès des marchés menée par le Forum canadien des titres à revenu fixe, un groupe sectoriel mis sur pied par la Banque. Le Conseil de direction reconnaît que des problèmes de liquidité sont plus évidents dans certains segments, dont ceux des obligations de sociétés et des anciennes émissions d’obligations d’État ainsi que certains marchés des pensions. Toutefois, nous reconnaissons aussi le fait que les marchés ne se sont pas encore complètement ajustés aux nouvelles exigences réglementaires. En outre, la période qui a précédé la crise n’est peut-être pas le meilleur point de comparaison qui soit, car la liquidité était excessive et ne coûtait presque rien à l’époque. Il est raisonnable de s’attendre à ce que la liquidité soit légèrement plus coûteuse, et la tenue de marché moins lucrative, en vertu de la nouvelle réglementation, et que les participants des marchés continuent de s’adapter dans un contexte de résilience accrue du système financier. Nous continuerons de suivre de près le comportement des marchés et de consulter les participants de ces derniers, tout en poursuivant nos travaux sur l’incidence des réformes réglementaires à l’échelle internationale.
Sur ce, madame Wilkins et moi serons heureux de répondre à vos questions.