Rapport sur la politique monétaire – Déclaration préliminaire à la conférence de presse

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Bonjour. La première sous-gouverneure Wilkins et moi sommes ravis d’être ici parmi vous pour répondre à vos questions sur l’annonce de ce matin concernant les taux d’intérêt et sur le Rapport sur la politique monétaire (RPM). Permettez-moi de débuter comme d’habitude par quelques observations sur les enjeux qui ont revêtu le plus d’importance dans les délibérations du Conseil de direction.

J’aimerais tout d’abord vous rappeler quelle était la situation au moment de la publication du RPM de janvier. Les participants aux marchés financiers étaient très inquiets au début de l’année. Les perspectives de croissance de l’économie mondiale étaient encore révisées à la baisse, les prix des produits de base touchaient de nouveaux creux, et de nouvelles données indiquaient que les sociétés canadiennes du secteur de l’énergie réduiraient leurs investissements encore plus qu’on le croyait précédemment. Dans ce contexte, nous avons dit qu’au début de nos délibérations, nous penchions pour une nouvelle détente monétaire, mais que nous devions d’abord prendre connaissance du plan budgétaire du gouvernement.

Notre nouvelle projection économique tient compte de ce plan budgétaire, mais permettez-moi de traiter dans un premier temps de trois autres changements importants que nous avons aussi pris en considération.

Premièrement, les prévisions de croissance de l’économie mondiale pour 2016 et 2017 ont encore une fois été revues à la baisse. Elles englobent l’économie américaine, où les nouveaux profils d’évolution de l’investissement et du logement impliquent une composition de la demande moins favorable aux exportations canadiennes.

Deuxièmement, les intentions d’investissement dans le secteur canadien de l’énergie ont été de nouveau revues à la baisse. Il est vrai que les prix du pétrole ont nettement remonté par rapport aux creux extrêmes qu’ils avaient touchés. Toutefois, les entreprises canadiennes nous ont signalé que même si les prix continuaient d’avoisiner leurs niveaux actuels, elles procéderaient à de nouvelles réductions importantes supérieures à celles que nous avions prévues en janvier.   Par convention, nous incorporons le prix moyen du pétrole observé au cours des semaines précédant le moment où nous effectuons notre prévision, ce qui nous permet de faire abstraction de la variabilité des marchés. C’est pourquoi nos nouvelles hypothèses relatives aux prix du pétrole ne sont supérieures que de 2 à 3 dollars le baril par rapport à janvier.

Troisièmement, le dollar canadien a aussi remonté par rapport aux creux qu’il avait enregistrés. Notre hypothèse relative au niveau du dollar dans cette projection est de 76 cents US, soit 4 cents de plus qu’en janvier. Même si de nombreux facteurs sont à l’œuvre, dont les prix du pétrole, la majeure partie de la hausse semble attribuable à l’évolution des attentes quant à l’orientation future de la politique monétaire aux États-Unis et au Canada. Le niveau supérieur postulé pour le dollar contribue à un profil plus faible pour les exportations hors ressources dans notre projection, de même que la demande plus basse émanant des États-Unis et d’ailleurs.

Le Conseil de direction estime que la conjugaison de ces facteurs - croissance plus lente de l’économie mondiale et américaine, nouvelle série de réductions des investissements dans le secteur canadien de l’énergie et dollar canadien plus fort -, aurait eu pour effet une révision à la baisse de nos projections de croissance pour l’économie canadienne par rapport à celles de janvier. Je sais que cette prévision semble aller à l’encontre de ce que vous avez entendu ces derniers temps, car une gamme d’indicateurs économiques mensuels ont été robustes au début de l’année. Cette robustesse représente en partie le retard qui a été comblé, après la faiblesse passagère observée au quatrième trimestre, et elle reflète entre autres des facteurs temporaires qui se dissiperont au deuxième trimestre. Nous croyons qu’il vaut mieux faire abstraction de cette variabilité et nous constatons que l’économie semble croître à un rythme moyen de près de 2 % au premier semestre de l’année, ce qui est encourageant.

Voilà qui m’amène au quatrième changement important survenu depuis janvier : le dernier budget fédéral. Nous ne pouvons être certains à 100 % des effets complets du budget sur l’économie, certains étant fonction de la réaction des ménages au fil du temps. Cependant, le Conseil de direction estime que les mesures budgétaires viendront plus que compenser les effets négatifs des trois autres changements que je viens de mentionner. L’effet net est que nos projections de croissance pour l’économie canadienne sont généralement plus élevées que celles présentées en janvier.

Quand vient le temps de prévoir l’inflation, nous devons considérer nos prévisions de croissance économique par rapport au potentiel de l’économie, ou ses capacités. Nous effectuons une évaluation complète du potentiel économique du Canada à cette époque chaque année. Et elle a occupé une place particulièrement importante dans les délibérations du Conseil de direction. En effet, ainsi que nous l’avons souligné dans le RPM d’octobre, il est particulièrement difficile de mesurer les capacités d’une économie lorsqu’elle subit un ajustement structurel, comme c’est le cas pour le Canada. Il en découle une incertitude accrue au sujet de la taille de l’écart de production et de la vitesse à laquelle il se résorbera, et donc du moment auquel les pressions désinflationnistes que nous observons aujourd’hui disparaîtront.

Plus précisément, la chute des investissements dans le secteur des produits de base se traduira par un ralentissement du taux de croissance potentiel de l’économie. À court terme, nous avons abaissé le taux de croissance de la production potentielle de 1,8 à 1,5 %. Vous trouverez plus de renseignements à ce sujet dans une note analytique du personnel de la Banque publiée aujourd’hui. Plus tard cette année, la succession naturelle caractérisée par une augmentation des exportations hors ressources et un resserrement des contraintes de capacité devrait entraîner une hausse des investissements et de l’emploi dans l’économie hors ressources et, par conséquent, un accroissement des capacités. Au-delà de la période de projection, la croissance de la production potentielle de manière générale devrait se redresser de nouveau. Ces nouvelles capacités pourraient permettre une croissance économique non inflationniste supérieure à celle que nous postulons aujourd’hui.

Les prévisions d’aujourd’hui donnent à penser que les capacités excédentaires au sein de l’économie se résorberont probablement un peu plus tôt que nous l’escomptions en janvier, soit au cours du deuxième semestre de 2017. Toutefois, comme je l’ai dit, le moment où cela surviendra est entaché d’une incertitude plus grande que d’habitude. Par exemple, nous adoptons une approche prudente en prenant pour hypothèse que seuls certains des effets durables des dernières années, comme la réduction du taux d’activité des jeunes, seront inversés dans les prochaines années. Le potentiel de l’économie regagnerait ainsi une partie du terrain perdu. Toutefois, nous devrons suivre attentivement les données sur l’investissement, la réintégration de la population active et la création d’entreprises afin de mettre à jour cette évaluation au fil du temps.

Bref, les données économiques récentes ont été encourageantes dans l’ensemble, mais également assez variables. L’économie mondiale pourrait nous décevoir davantage, l’ajustement complexe à la détérioration des termes de l’échange bridera la croissance du Canada pendant la majeure partie de notre période de projection, et les réactions des ménages aux mesures budgétaires du gouvernement feront l’objet d’un suivi étroit. Nous n’avons constaté jusqu’à maintenant aucune indication tangible d’une hausse des investissements et d’une solide création d’entreprises. Voilà certains des ingrédients nécessaires à un retour à une croissance naturelle et autosuffisante, et à une inflation se maintenant à la cible de façon durable.

À la lumière de l’ensemble de ces considérations, le Conseil de direction estime que le niveau actuel de notre taux directeur demeure approprié.

Sur ce, Carolyn et moi serons heureux de répondre à vos questions.  

Rapport sur la politique monétaire - Avril 2016

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