Contexte

À l'automne 2004, des responsables du ministère des Finances et de la Banque du Canada ont entrepris de réexaminer le cadre de distribution des titres de dette du gouvernement canadien dans le but d'évaluer l'efficacité avec laquelle ce cadre assure au gouvernement un accès continu à des sources stables de financement à faible coût, à moyen terme, et préserve le bon fonctionnement du marché de ses titres. Le cadre englobe les règles qui régissent les adjudications et la surveillance du comportement des agents du marché primaire des titres d'État. Le dernier réexamen remonte à 1998. Des mesures avaient alors été instaurées pour améliorer la fiabilité de l'accès du gouvernement à des sources de financement et éviter que le processus d'adjudication n'entraîne une concentration excessive des titres ou ne confère un avantage concurrentiel déloyal à quelque participant que ce soit.

Depuis, la participation aux adjudications des titres d'État a été soutenue, et ce, à des prix concurrentiels. Parallèlement, on observe une concentration accrue de la participation aux adjudications en raison d'un nombre réduit de courtiers en valeurs pour assurer la vente des titres du gouvernement. Le marché secondaire des titres d'État, à l'instar d'autres segments du marché intérieur des titres à revenu fixe (par ex., ceux émis par les administrations provinciales et les sociétés), est lui aussi davantage concentré; en effet, il est dominé par une poignée de grandes maisons de courtage et de quelques autres de taille moyenne. Parmi les autres tendances constatées depuis le dernier réexamen, mentionnons l'intérêt des investisseurs à prendre part directement aux adjudications, la hausse de la transparence des prix, les débuts des systèmes de négociation électroniques et l'évolution des pratiques de gestion de la dette suivies par les autres États souverains.

Des consultations ont été tenues auprès de distributeurs de titres et d'investisseurs institutionnels en octobre et en novembre 2004. Les participants étaient invités à se prononcer sur l'efficacité actuelle du cadre de distribution et sur l'opportunité de réviser celui-ci en vue d'en maintenir la bonne marche future.

Sommaire

À ce jour, le message principal qui se dégage des consultations est que le cadre de distribution des titres de dette du gouvernement canadien fonctionne bien dans la structure de marché actuelle et qu'il n'y a pas lieu d'y apporter des changements majeurs pour l'instant.

Dans l'ensemble, les participants se disent préoccupés par la question de la liquidité, dans un contexte où l'offre de titres ne cesse de diminuer et où on ignore comment le marché s'adapterait à une intensification de la concentration chez les courtiers en valeurs et les investisseurs. Toutefois, ils considèrent que le cadre de distribution préserve un juste équilibre entre les intérêts divergents des acteurs du marché et favorise le bon fonctionnement du marché des titres d'État et, par extension, de celui des titres à revenu fixe.

Distribution des titres

Les participants aux consultations sont généralement d'avis que le marché compte suffisamment de courtiers pour demeurer concurrentiel. Beaucoup estiment que le marché s'ajusterait naturellement à une hausse de la concentration parmi les courtiers, sans pour autant savoir comment un tel ajustement s'opérerait.

Certains investisseurs craindraient de se trouver désavantagés, du moins temporairement, si la poursuite de la concentration les privait des services d'un courtier sur lequel ils comptent pour négocier des titres, en particulier ceux de sociétés. D'autres s'inquiètent du faible nombre de courtiers actuellement en exercice, mais n'ont rien de précis à suggérer pour remédier à la situation.

Certains courtiers nationaux soulignent que la tenue du marché des titres d'État est une activité peu rentable en soi, mais qu'elle en appuie d'autres plus lucratives, comme la négociation des titres de sociétés et des produits dérivés. Des petits négociants principaux canadiens estiment qu'ils pourraient accroître leur chiffre d'affaires si les investisseurs modifiaient la répartition de leurs opérations, dans l'éventualité d'une augmentation de la concentration parmi les courtiers.

Les courtiers américains, autrefois présents au pays, négocient maintenant les titres du gouvernement par l'intermédiaire de courtiers canadiens. Ils soulignent la rareté des capitaux à l'échelle internationale et leur centralisation croissante sur de grandes places financières comme Londres et New York. Dans un tel contexte, il est difficile pour les petits marchés de capitaux de conserver un réseau concurrentiel de courtiers intérieurs.

Accès aux adjudications

Tous les grands courtiers se déclarent favorables au maintien des limites de soumission à paliers, structure qu'ils estiment équitable compte tenu de l'importance de leurs parts de marché et des capitaux qu'ils engagent. Selon eux, réviser le cadre de distribution à l'avantage des petits courtiers pourrait décourager les grands courtiers d'allouer de leur capital de risque à la distribution et à la tenue du marché des titres de dette du gouvernement. Pour stimuler la participation aux adjudications et faciliter l'acceptation de commandes de plus en plus grosses des investisseurs, certains suggèrent de relever légèrement leurs propres limites de soumission et/ou celles des investisseurs.

Dans l'ensemble, les petits négociants principaux se disent eux aussi à l'aise avec le maintien du statu quo et considèrent que les limites de soumission sont équitables et non restrictives. Ils souhaiteraient toutefois que des modifications soient apportées au cadre de distribution afin de soutenir l'expansion de leurs activités (p. ex., inclusion des opérations de rachat dans le calcul des limites de soumission, ou hausse plus rapide de leurs limites de soumission lorsque leur part du marché secondaire augmente).

Les opinions sont partagées chez les responsables de systèmes de négociation électroniques quant à l'intérêt de prendre part directement aux adjudications. Certains trouvent qu'un tel changement serait contraire aux pratiques optimales en matière de respect de la réglementation (par ex., de la règle « bien connaître son client »), tandis que d'autres y voient un nouveau débouché intéressant. Certains courtiers s'opposent à l'idée de permettre un accès direct des systèmes de négociation électroniques aux adjudications parce qu'ils estiment que ces systèmes n'offrent pas de services de tenue de marché comme les courtiers et requièrent ainsi moins de capital.

Un petit nombre de courtiers est d'avis que le recours aux adjudications à prix uniforme (c.-à-d. à la hollandaise) favoriserait une plus grande participation en atténuant les risques auxquels s'exposent les soumissionnaires moins bien informés sur le volume des transactions sur le marché. Les grands négociants principaux sont, pour la plupart, fermement opposés à ce mode d'adjudication qui, d'après eux, réduirait leur avantage sur le plan de l'information et, en définitive, leur intérêt à soumissionner. En outre, de nombreux grands courtiers sont réfractaires à l'idée de relever les limites de soumission non concurrentielle pour stimuler la participation d'agents moins bien informés.

Les investisseurs ont des points de vue variés sur la question de la participation aux adjudications. La majorité d'entre eux manifestent peu d'intérêt pour l'accès direct aux adjudications. Ils réalisent généralement des opérations sur le marché secondaire par l'intermédiaire de courtiers. Plusieurs, par contre, aimeraient prendre part directement aux adjudications, principalement parce que cela leur éviterait d'avoir à divulguer leurs offres et leur stratégie de placement aux courtiers. Ils avouent cependant qu'une telle pratique s'opposerait à leur préférence pour un cadre où la liquidité est assurée par les courtiers et où les obligations sont achetées normalement auprès de ces derniers, avant ou après les adjudications.

Peu de commentaires ont été recueillis de la part des investisseurs particuliers. Les courtiers ne s'opposent pas à ce que le cadre de distribution soit révisé en vue d'améliorer l'accès de ces investisseurs au marché des titres du gouvernement canadien, par exemple en haussant les limites de soumission non concurrentielle. Ils s'interrogent néanmoins sur l'intérêt des investisseurs particuliers à soumissionner directement aux adjudications. Les grands négociants principaux estiment que leurs réseaux de distribution permettent à ces investisseurs de se procurer des titres du gouvernement canadien à juste prix.

Transparence de l'information relative aux opérations et intégrité du marché

De l'avis de tous les participants aux consultations, les normes de transparence des prix sur le marché institutionnel canadien sont élevées, quoique moins que celles en vigueur aux États Unis. En revanche, nombre d'entre eux croient qu'il y aurait lieu d'améliorer la transparence pour les investisseurs particuliers et en ce qui concerne les obligations de sociétés. Plusieurs courtiers remettent en question le bien-fondé de l'instauration d'une transparence instantanée parfaite quant au volume des opérations. Ils craignent, en effet, que cela ne nuise à la liquidité du marché et aux écarts acheteur-vendeur.

Au chapitre de l'intégrité du marché, les participants estiment que les règles d'adjudication ainsi que le Principe directeur no 5 de l'Association canadienne des courtiers en valeurs mobilières (le code de déontologie du marché intérieur des titres de dette) favorisent le bon fonctionnement du marché et réduisent le risque de manipulation de celui-ci.

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