Résumé des commentaires

Le gouvernement canadien sollicite continuellement le point de vue des participants concernant l'efficacité de ses programmes d'emprunt et les modifications susceptibles de leur être apportées. Il tient régulièrement des consultations afin d'atteindre l'objectif stratégique qu'il s'est fixé : maintenir le bon fonctionnement du marché des titres qu'il émet. Les consultations de l'automne dernier visaient à obtenir l'avis des acteurs du marché sur diverses questions reliées à la conception et aux modalités du programme d'émission d'obligations à rendement réel du gouvernement.

Informations générales

Dans le document intitulé Stratégie de gestion de la dette 2003-2004, le gouvernement a annoncé qu'il procéderait à un examen du programme d'émission d'obligations à rendement réel. En septembre et en octobre 2003, des consultations ont été menées sur ce sujet auprès d'un large éventail d'acteurs du marché. Les commentaires reçus à cette occasion sont l'un des éléments pris en considération dans l'évaluation du programme.

Durant ces consultations, le ministère des Finances et la Banque du Canada ont recueilli les commentaires de plus de 50 partenaires institutionnels, dont des négociants principaux, des distributeurs de titres d'État, des investisseurs institutionnels et des conseillers en régime de retraite. Des investisseurs institutionnels et particuliers nous ont également communiqué leur point de vue par courriel en utilisant l'adresse prévue à cet effet.

Pour faciliter la discussion, le gouvernement a publié un questionnaire à l'intention des participants. Celui-ci portait sur quatre grands thèmes :

  • l'utilisation et le traitement des obligations à rendement réel;
  • la demande actuelle et future;
  • la demande de substituts;
  • le développement des marchés primaire et secondaire.

Vue d'ensemble

Les participants estiment globalement que les obligations à rendement réel sont un placement intéressant et que le gouvernement devrait continuer à en émettre. Ils croient que la demande de ces titres est et restera robuste pour deux grandes raisons : 1) les entreprises et les particuliers ayant à leur passif des engagements sensibles à l'inflation souhaitent détenir des obligations à rendement réel pour des motifs stratégiques; 2) celles-ci procurent des avantages sur le plan de la diversification. De l'avis général, le marché primaire fonctionne bien et la situation s'est améliorée sur le marché secondaire, bien que la liquidité y soit naturellement plus faible que sur celui des obligations à rendement nominal, du fait que les investisseurs gardent la plupart du temps leurs titres à rendement réel jusqu'à l'échéance. Les avis sont partagés sur la façon d'améliorer la conception du programme ou la liquidité du marché secondaire.

L'utilisation et le traitement des obligations à rendement réel

Utilisation

La très grande majorité des participants considèrent les obligations à rendement réel comme un placement de longue durée. Les plus gros acheteurs de ces titres, à savoir les caisses de retraite canadiennes, leur réservent une place de choix dans leur portefeuille en contrepartie de leurs engagements à long terme sensibles à l'inflation. Un certain nombre de participants jugent que les obligations à rendement réel offrent des avantages sur le plan de la diversification en permettant aux gestionnaires de fonds d'assumer davantage de risque à l'égard des autres catégories d'actifs. Le pourcentage du portefeuille total devant être alloué en moyenne aux obligations à rendement réel dans le cas des investisseurs ayant des objectifs explicites en la matière varie entre 5 et 10 %.

Les obligations à rendement réel ne sont pas seulement acquises pour des raisons stratégiques. Certains investisseurs canadiens et internationaux privilégient une gestion active (tactique) de leurs portefeuilles d'obligations à rendement réel.

Les investisseurs particuliers indiquent pour leur part qu'ils acquièrent des obligations à rendement réel afin de disposer à la retraite d'une source de revenu protégée de l'inflation.

Traitement

Les participants ne traitent pas tous les obligations à rendement réel comme une catégorie d'actifs distincte des titres à revenu fixe, mais ils sont de plus en plus nombreux à le faire. Les investisseurs pour qui ce type d'obligations constitue une catégorie à part entière sont essentiellement ceux qui sont tenus d'apparier leurs éléments d'actif et de passif, tels que les caisses de retraite et les fonds de dotation. Ces investisseurs n'ont pas tendance à comparer le rendement de leurs portefeuilles d'obligations à rendement réel à celui d'autres catégories d'actifs ou d'autres indices, car ils détiennent ces obligations à des fins d'appariement.

Les participants ne se servent pas tous des mêmes méthodes pour le calcul de la duration ni des mêmes indices de référence pour la comparaison des rendements. Les indices de référence les plus utilisés sont l'indice obligataire universel et l'indice des obligations à rendement réel publiés par Scotia Capitaux. En outre, d'après certains participants, les obligations à rendement réel sont un bon exemple d'actif sans risque à partir duquel on peut évaluer le prix relatif des actions et des obligations à rendement nominal et comparer les prix des obligations en dollars canadiens à leurs prix à l'étranger.

La demande actuelle et future

Demande actuelle

Le niveau élevé de la demande observée ces derniers temps est attribuable à un recours grandissant tant à la répartition stratégique qu'à la répartition tactique de l'actif. Cette évolution découle d'une meilleure compréhension du comportement des obligations à rendement réel sur le marché secondaire et du rôle qu'elles peuvent jouer dans un portefeuille de placements. Les conseillers en régime de retraite recommandent depuis quelque temps aux investisseurs institutionnels d'inclure ces titres dans leurs portefeuilles stratégiques à des fins de gestion actif-passif et de limitation des risques. Aussi certains fonds institutionnels ont-ils acquis des volumes importants de ces obligations afin de respecter les pourcentages recommandés ou nouvellement prescrits.

La demande stratégique d'obligations à rendement réel s'est également accrue en raison de la tenue relativement médiocre des marchés boursiers jusqu'au printemps 2003 et des faibles taux d'intérêt affichés récemment sur les marchés de titres à revenu fixe. Selon certains participants, cette évolution a coïncidé avec une modification de la prime de risque sur les actions qui a amené les investisseurs à délaisser celles-ci au profit des titres à revenu fixe. Par ailleurs, les obligations à rendement réel s'étant très bien comportées au cours des dernières années, bon nombre de caisses de retraite ont décidé de les intégrer à leurs politiques de placement.

La quasi-totalité des participants conviennent que les décisions de nature tactique se sont également multipliées durant les douze derniers mois. Désireux de tirer parti des écarts de rendement entre les obligations à rendement réel du gouvernement canadien et les obligations indexées sur l'inflation des autres émetteurs souverains, les investisseurs internationaux ont été particulièrement actifs. De l'avis de plusieurs, cette activité traduit la faveur accrue dont jouit ce type d'obligations à l'échelle mondiale ainsi qu'une hausse du volume d'émission de la part d'emprunteurs souverains déjà bien établis ou nouvellement entrés sur le marché.

Demande future

Les participants s'attendent majoritairement à une hausse de la demande globale d'obligations à rendement réel. Ils estiment que l'évolution de la demande individuelle des gestionnaires de fonds dépendra de divers facteurs, dont l'écart entre le pourcentage effectif de ces obligations dans les portefeuilles et le pourcentage visé, le rééquilibrage des portefeuilles, le réinvestissement des coupons et les modifications éventuelles apportées par les caisses de retraite à leur politique de placement. Dans l'ensemble, les gestionnaires pratiquant la répartition tactique de l'actif sont d'avis que leurs besoins seront déterminés par la dynamique des marchés et les occasions de profit qui se présenteront à eux.

De façon plus fondamentale, la demande découlant des décisions de nature stratégique devrait s'accroître à mesure que les caisses de retraite, les fonds de dotation et les fondations accorderont une place grandissante aux obligations à rendement réel dans leur politique d'appariement des avoirs et des engagements. Dans le même ordre d'idées, certains participants laissent entendre qu'une partie de la hausse de cette demande pourrait provenir de caisses de retraite privées sous-capitalisées qui cherchent à obtenir un taux de rendement minimal. La demande pourrait aussi augmenter sous l'effet des besoins accrus de réinvestissement des coupons et de rééquilibrage de portefeuilles entraînés par la croissance naturelle des actifs. Les changements démographiques associés au vieillissement de la population devraient eux aussi stimuler la demande naturelle d'obligations à rendement réel.

Les opinions sont partagées quant à l'ampleur des besoins de remplacement des obligations à rendement réel détenues en portefeuille par d'autres dont l'échéance serait plus éloignée. Les participants ne s'accordent pas sur la possibilité de recourir à des rachats assortis d'une conversion de titres pour répondre à ces besoins de rotation. Ceux qui privilégient la méthode du rachat considèrent qu'il faudrait pouvoir échanger des titres de l'émission de référence contre des titres d'anciennes émissions aussi bien que l'inverse (pour rapprocher ou éloigner les échéances), mais que cette méthode serait surtout efficace lorsque le terme à courir est inférieur à dix ans. Pour leur part, les investisseurs qui ont l'habitude de conserver leurs obligations à rendement réel jusqu'à l'échéance mettent en doute l'urgence de réduire le nombre d'anciennes émissions.

Plusieurs courtiers et gestionnaires de fonds prévoient une progression de la demande des investisseurs particuliers. Dans leurs commentaires, ces derniers soulignent effectivement que les obligations à rendement réel représentent pour eux un instrument utile de planification de la retraite.

La demande de substituts

Les participants estiment, pour la plupart, qu'il n'existe actuellement aucun substitut parfait aux obligations à rendement réel sur le marché canadien. Ils se disent réticents à détenir des obligations indexées sur l'inflation autres que celles du gouvernement canadien, en raison des risques de crédit et de la longue durée des engagements qu'ils doivent assumer. À défaut d'obligations à rendement réel, ils se tourneraient vers des placements tels que les obligations indexées sur l'inflation émises par des provinces et celles émises par des sociétés — notamment les titres destinés à financer des travaux d'infrastructure — ou encore vers l'immobilier. L'impression générale qui se dégage des commentaires est que la majorité des solutions de rechange, surtout les obligations à rendement réel du secteur privé, ne procurent qu'une protection imparfaite contre l'inflation et comportent des risques inhérents de crédit et de liquidité. L'insuffisance de l'offre et la faible liquidité des obligations indexées sur l'inflation autres que celles du gouvernement canadien sont deux facteurs sur lesquels les participants insistent particulièrement. Les produits de base, les actions, les billets à taux variable et les bons du Trésor sont d'autres substituts mentionnés par certains participants.

Dans la grande majorité des cas, les gestionnaires de fonds n'incluent pas, dans leurs portefeuilles stratégiques, d'obligations indexées sur l'inflation émises en devises par des États étrangers. Ils en justifient généralement l'omission par le fait que les engagements auxquels ils doivent apparier les titres sont libellés en dollars canadiens et varient en fonction de l'inflation au pays. Ils invoquent également la règle sur les biens étrangers. Certains participants, cependant, indiquent qu'ils songent à acquérir de tels titres à l'avenir dans une optique de répartition tactique.

Le développement des marchés primaire et secondaire

Marché primaire

En général, les investisseurs institutionnels et les intermédiaires s'entendent sur le bon fonctionnement du marché primaire, notamment le processus d'adjudication à la hollandaise (adjudication à prix uniforme). Certains participants considèrent que ce processus favorise une vive concurrence entre les investisseurs institutionnels et réduit la probabilité que l'État n'obtienne pas les résultats escomptés. Il est aussi fait mention des avantages que pourraient retirer les investisseurs institutionnels d'un accès direct aux adjudications. Quelques participants, peu nombreux, vont jusqu'à proposer que l'État émette des titres à la demande.

Alors que certains participants se disent satisfaits de la taille actuelle des adjudications ou n'ont pas d'opinion tranchée sur la question, plusieurs courtiers et investisseurs croient que l'État devrait offrir davantage de titres pour répondre à l'excédent de la demande. Celle-ci est particulièrement forte lors des adjudications qui ont lieu aux alentours des dates de versement, et donc de réinvestissement, des coupons.

Certains accepteraient que l'État restreigne l'offre annuelle d'obligations à rendement nominal et de bons du Trésor pour accroître légèrement celle des obligations à rendement réel.

Certains participants considèrent qu'il pourrait être avantageux d'émettre des obligations à rendement réel dont l'échéance différerait de 30 ans. L'introduction d'une émission à dix ans, en particulier, permettrait d'étendre la courbe des rendements réels et, peut-être, d'améliorer l'efficience des marchés. Les avis sont toutefois partagés sur les acheteurs éventuels de tels titres. Les investisseurs ayant recours à la répartition tactique et les particuliers sont les acquéreurs potentiels les plus fréquemment mentionnés. À l'inverse, de nombreux investisseurs institutionnels affirment que cette échéance ne leur conviendrait guère compte tenu de leurs engagements à très long terme. Plusieurs participants font observer que les échéances de l'encours actuel diminueront graduellement, ce qui permettra d'obtenir une courbe des rendements réels.

Les participants se disent généralement indifférents au processus d'établissement des taux de coupon des obligations à rendement réel. On laisse aussi entendre qu'il serait inutile d'assortir le principal de ces titres d'une protection contre la déflation, une telle évolution étant jugée peu probable sur les 30 années de vie d'une émission. De nombreux investisseurs institutionnels, enfin, suggèrent d'étoffer les résultats divulgués à la suite des adjudications pour y inclure les parts respectives attribuées aux investisseurs et aux courtiers.

Marché secondaire

En règle générale, les participants s'accordent à dire que la liquidité du marché secondaire des obligations à rendement réel s'est améliorée au fil du temps, mais qu'elle demeure inférieure à celle du marché secondaire des obligations à rendement nominal. On impute la situation à plusieurs facteurs, dont la tendance des investisseurs à conserver leurs placements jusqu'à l'échéance, l'insuffisance de l'offre et l'absence d'instruments efficaces qui permettraient aux courtiers de se protéger contre les variations de prix de ces titres. Certains considèrent que le premier facteur exerce une influence déterminante, qui continuera de peser sur la liquidité du marché peu importe la taille des émissions.

Les participants font remarquer que le marché des obligations à rendement réel n'est toujours pas en mesure d'absorber les opérations d'importance sans que les prix ne s'en ressentent fortement. Certains soulignent que la liquidité inférieure du marché ne pose pas problème si les contreparties sont prêtes à conclure à la place plusieurs opérations de faible valeur étalées sur une certaine période. Habituellement, les opérations de 10 millions de dollars et moins sont relativement faciles à exécuter. Celles de 25 millions et plus soulèvent d'ordinaire davantage de difficultés. Certains courtiers disent avoir tendance à se tourner vers le marché primaire, au lieu de tenter leur chance sur le marché secondaire, pour exécuter les grosses commandes provenant d'investisseurs qui ont recours à la répartition tactique. Certains participants constatent que la liquidité du marché secondaire atteint un sommet durant la semaine qui précède et celle qui suit chaque adjudication, surtout aux dates de versement des coupons, mais qu'elle est plutôt épisodique en dehors de ces périodes.

Selon les participants, le fait que les obligations à rendement réel s'avèrent parfois plus coûteuses pour l'État que celles à rendement nominal tient à plusieurs raisons. Parmi celles-ci, on trouve la prime de liquidité intégrée aux obligations à rendement réel, l'écart entre les taux d'inflation attendu et effectif et l'absence d'instruments de couverture efficaces, ce qui peut parfois exercer une pression à la hausse sur le rendement des obligations à rendement réel.

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